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Colloque CIV, viande et alimentation durable : tout est question d’équilibre

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Clarifier le rôle de la viande dans le développement durable, tel était l’objectif du CIV, le Centre d’information des viandes, dans le cadre du colloque organisé le 14 mai à l’Institut Pasteur. La consommation de viande rouge cristallise nombre d’inquiétudes dans les pays développés : est-ce bon pour la santé, pour l’environnement ? Le sujet est complexe, nourri par des idées reçues, des craintes et hyper médiatisé. Dans ce cadre, les maîtres mots sont «  prudence et nuance ». Prudence sur les données avancées, le consommateur a besoin d’être rassuré et informé sur les pratiques d’élevage mais aussi de transformation. Et « nuance » dans les réponses, en s’inscrivant à l’opposé d’un raisonnement binaire ou simpliste, construit dans l’esprit « bon ou pas bon » et opposant par exemple chimique et naturel, bio et non bio… Pour Pierre-Michel Rosner, directeur du CIV, il faut laisser la part au débat tout en étayant les arguments avec des réponses scientifiques. Mieux informer le consommateur Les caractères sanitaires, toxicologiques et nutritionnels restent les plus appréhendés dans les analyses portant sur l’alimentation durable, avec en toile de fond l’impact sur la santé. La viande serait-elle responsable de l’obésité, de troubles cardio-vasculaires, de diabète ? Jean-Michel Lecerf, chef du service nutrition à l’institut Pasteur de Lille a rappelé en préambule à sa réponse que l’homme est omnivore, que la viande apporte, outre les protéines essentielles, du fer, du zinc, des acides gras et vitamines. «  La viande ne peut être tenue responsable de ces maladies car tout est question de quantité, de diversité et de mode de cuisson. » La recommandation : « 80 gr de viande rouge par jour et une ration quotidienne globale en protéine animale de 100 gr ». A noter toutefois une cuisson excessive type barbecue peut favoriser certains cancers. Pour Jean-Michel Lecerf, le consommateur n’est pas assez informé sur les bénéfices pour la santé et sur les filières. Invité a témoigné sur les demandes des consommateurs, John Gillot, boucher à Paris et travaillant avec des éleveurs de la filière Bleu blanc cœur a expliqué que la confiance est importante : « Nous avons des panneaux et des films explicatifs qui présentent notre démarche et celle des éleveurs. Les questions viennent surtout des nouveaux clients. » Impacts environnementaux à nuancer en fonction du type de régime alimentaire Quant à l’impact sur l’environnement, une étude menée par l’université d’Aix-Marseille, et présentée par Gabriel Masset, a comparé dans le cadre de l’Analyse du cycle vie (ACV) des produits alimentaires, les émissions de gaz à effets de serre des viandes selon différents types de régimes. Les émissions apparaissent plus faibles pour les rations de viande ramenées à la calorie plutôt qu’au poids et varient selon la nature des viandes. Un régime avec 50 g/jour de viande et sans charcuterie baisse de 12 % son émission de GES. Si la viande est remplacée par les légumes, les émissions de GES s’accroissent de 2,7 % puisqu’il faut compasser par de plus grandes quantités. Pour l’épidémiologiste, frugalité et équilibre du contenu de l’assiette restent le mode d’alimentation le plus durable. « Ces recherches sont aussi à compléter par d’autre indicateur comme l’impact sur l’eau et la biodiversité », prévient-il. Et justement en termes de biodiversité, le modèle d’élevage français permet de maintenir les prairies et bocages et favorise stockage du carbone dans le sol. Jérôme Mousset, chef du service agriculture et forêt de l’Ademe, est lui aussi favorable à une approche multicritères pour mieux appréhender l’impact environnemental de l’élevage. Autre levier au regard des ACV : limiter le gaspillage. 11 % des pertes sont enregistrées au niveau du commerce et de la distribution, 15 % concernent la restauration hors foyer et 67 % sont dues aux ménages. John Gillot ne cache pas qu’il faille redoubler de créativité pour mettre en avant les bas morceaux et abats. « Tout est question d’éducation, d’information, d’habitude culinaire », indique-t-il. En amont de la livraison de la carcasse, la filière est par contre bien organisée pour valoriser tous les coproduits.