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Coop de France se penche sur la question de l’acceptabilité sociale de l’élevage

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Alors que l’influenza aviaire et la crise du secteur laitier succèdent à la crise porcine, la fabrication d’aliments pour animaux a diminué de près d’un million de tonnes en 2016. Dans ce contexte difficile, Coop de France a proposé le 9 novembre deux tables rondes sur le lien entre les productions animales et les attentes, voire exigences des consommateurs. À commencer par la tendance anti-viande.

Une mutation, pas une crise

« Les systèmes alimentaires sont en changement permanent, indique Bruno Hérault, du Centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture. Manger de la viande était considéré comme extrêmement positif à une époque où l’on faisait beaucoup plus d’efforts physiques. D’où le nom de plat de résistance. Aujourd’hui les évidences sont contraires. »

Les causes de cette évolution sont multiples. « Dès les années 70 commencent les discours de nutrition, de médicalisation de l’alimentation, poursuit-il. En parallèle, émergent un souci du développement durable et une nouvelle représentation de l’animal. » Les changements sociétaux semblent également être au cœur de la modification des habitudes alimentaires.

Bruno Hérault souligne l’impact de la féminisation de la société. « Ce sont généralement les femmes qui jouent le rôle de prescripteur de santé dans une famille. Elles imposent ainsi leurs valeurs. Ce n’est pas une crise, c’est vraie une mutation. »

Un gradient Nord-Sud

 

Christine Roguet, de l’Institut du porc (Ifip), a travaillé à un recensement des controverses aux échelles de la France et de l’Europe. L’étude a été menée en Allemagne, au Danemark, aux Pays-Bas, en Espagne et en Italie. Qui aboutit à « un gradient de préoccupations sociales et environnementales du Nord au Sud. »

De fait, Ismaël Martinez, de la coopérative laitière espagnole Feiraco, explique que les consommateurs espagnols cherchent en premier lieu à acheter un produit économique qu’ils souhaitent savoureux et sain. La naturalité du produit et son impact environnemental restent des attentes secondaires. De son côté, Jan Kamphof, de la coopérative Agrifirm aux Pays-Bas, expose le résultat d’un travail mené en partenariat par les ONG et les distributeurs dans son pays : « Pour répondre aux attentes du consommateur, ils ont mis en place un label : les produits sont étiquetés avec une à trois étoiles en fonction du niveau d’exigence du cahier des charges s’appliquant lors de la production. »

Et en France ?

Au terme de son enquête en France, Christine Roguet a pu dégager quatre principaux motifs de controverse de l’élevage : l’environnement, le bien-être animal, le risque pour la santé animale et humaine et le système d’élevage, jugé trop intensif. « Le porc et la volaille sont les productions les plus critiquées, en lien avec les pratiques utilisées », indique-t-elle.

Elle a également pu réaliser une typologie des consommateurs. Au-delà des 2 % d’abolitionnistes, « qui souhaitent la disparition de l’élevage », son enquête révèle que 3 % des Français sont végétariens et que 10 % se préoccupent exclusivement du critère économique. Un tiers d’entre eux se situe dans la case « alternatifs » : ils souhaitent un autre type de production et cherchent les labels, le bio. Enfin, près de 50 % sont dits progressistes : « ils ne sont pas fondamentalement contre le modèle d’élevage actuel mais souhaiteraient un moindre impact sur l’environnement par certains changements de pratiques, indique-t-elle.

Julien Barré, conseiller productions animales au ministère de l’Agriculture, rappelle le rôle des coopératives comme « confluent de toutes les productions, et donc nœud hautement stratégique », face à ces évolutions des attentes sociétales. Et félicite Coop de France pour le lancement en juin de la plateforme Duralim, destinée à réduire l’impact environnemental de l’alimentation animale.