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Décryptage - Le décret sur les macro-organismes expliqué par l’expert référent à la DGAL

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Reference-environnement.com a rencontré Xavier Langlet, expert référent en charge des produits de biocontrôle à la sous direction de la qualité et de la protection des végétaux (SDQPV) à la direction générale de l’alimentation, DGAL. Référence environnement : Quels sont les points majeurs du décret ? Xavier Langlet : Ils concernent la définition même des termes de l’intitulé : les conditions d’autorisation d’entrée sur le territoire et d’introduction dans l’environnement de macro-organismes non indigènes utiles aux végétaux. Les macro-organismes indigènes, que l’on trouve naturellement sur le territoire et qui peuvent être utilisés en lutte biologique, ne sont pas concernés par le dispositif. Le décret définit la notion de territoire et différencie, par exemple, la Corse de la Métropole ou encore la Martinique de la Guadeloupe. Chaque zone correspond à un territoire différent de par ses spécificités écologiques. Les macro-organismes sont en fait définis, par défaut, par ce qui ne relève pas des micro-organismes dont la définition est précisée dans le règlement européen n° 1107/2009 du 21 octobre 2009, correspondant aux champignons, virus et bactéries. On distingue actuellement trois catégories principales de macro-organismes : les nématodes entomophages, les acariens prédateurs, et les insectes prédateurs et parasitoïdes. Mais nous pourrions avoir également des mammifères, des oiseaux ainsi que des végétaux compétiteurs d’autres végétaux invasifs. Cette dernière catégorie constitue un axe de recherche intéressant. Les pollinisateurs sont également concernés par cette règlementation. Par exemple, en production de tomates grappes, les producteurs ont remplacé l’abeille par le bourdon ce qui a permis des gains de production d’environ 30 %. On pourrait imaginer qu’un pollinisateur exotique soit encore plus efficace et intéresse les producteurs. Il lui faudra alors une autorisation pour son utilisation, et donc, son introduction dans l’environnement (notion qui recouvre également les tunnels et les serres). Référence environnement : Reste-t-il des points à éclaircir ? Xavier Langlet  : Oui et ce sera l’objet du ou des arrêtés d’application à paraître avant le 1er juillet 2012. Il faudra que l’on tranche sur le besoin ou non d’une autorisation pour une même espèce mais de souche et/ou d’origine géographique différente. Un exemple ? Alors que la coccinelle asiatique, originaire de Chine, et acclimatée dans les années 1990, n’a pas posé de problème d’invasivité, ce ne fut pas le cas lors de la réintroduction de sa cousine d’Amérique du Nord en Europe. Cette dernière s’est rapidement croisée avec la souche précédemment installée dans l’environnement et a révélé des caractéristiques invasives. Ensuite, une liste positive des macro-organismes non indigènes déjà commercialisés, et qui ne nécessiteront pas d’évaluation, sera publiée. Elle sera complétée au fur et à mesure par les nouvelles autorisations accordées. L’objet de l’arrêté d’application est également de caler les modalités d’analyse des dossiers par l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire en charge de l’évaluation des demandes d’introduction. Les sociétés déposeront en effet leurs dossiers à l’Anses pour évaluation qui informera par avis les ministères de l’Agriculture et de l’Ecologie en charge de la décision qui prendra la forme d’un arrêté interministériel. Référence environnement : Emmanuelle Soubeyran, chef de projet Ecophyto à la DGAL, a indiqué que vous aviez adopté un dispositif d’autorisation qui ne soit pas trop contraignant pour les entreprises. Qu’en est-il ? Xavier Langlet : C’est vrai, nous avons tout mis en œuvre pour minimiser les contraintes pour les fournisseurs d’auxiliaires. Reste que l’entrée en vigueur de ce décret entraîne plus de contraintes puisque, auparavant, il n’y avait pas de réglementation. Nous demandons, entre autre, la transmission d’un dossier contenant des informations portant sur la biologie des macro-organismes, de nous transférer des données relatives à leur impact sur la biodiversité alors que les sociétés n’étaient pas habituées à le faire. Une procédure de reconnaissance mutuelle est possible. En effet, lorsque la demande concerne un organisme qui a déjà fait l’objet d’une évaluation officielle dans un Etat dont les conditions agricoles, phytosanitaires et environnementales, notamment en termes de climat et de biodiversité, sont comparables au territoire pour lequel la demande est effectuée, les éléments de cette évaluation peuvent remplacer tout ou partie des informations nécessaires à l’analyse du risque. Les contraintes de la recherche ont également été prises en compte, en particulier lorsque la demande concerne l’entrée d’un organisme sur le territoire, dans le cadre de travaux réalisés à des fins scientifiques en milieu confiné, sans introduction dans l’environnement. Dans ce cas, le demandeur peut ne pas fournir l’analyse documentée du risque à la condition de garantir des mesures de confinement adaptées évitant toute fuite de cet organisme dans l’environnement. On a également réduit les délais d’instruction des dossiers. L’évaluation par l’Anses se fera en six mois maximum contre 18 mois pour les produits phytopharmaceutiques. Ceci nécessite la mise en place de méthodes d’évaluation parfaitement cadrées et pré-définies. Ensuite, les ministères de l’Ecologie et de l’Agriculture devront rendre leur décision en trois mois. Soit un traitement total du dossier ne dépassant pas neuf mois. Si la société n’a pas eu de réponse au bout de ce délai, cela veut dire qu’il n’y a pas d’autorisation.