Référence agro

Démarche « Ferme France » : noter de 0 à 100 l'ensemble les produits alimentaires français

Le | Archives

Référence-environnement : Comment définissez-vous l’objectif de Ferme France ?

Maximilien Rouer : L’enjeu central, c’est la comparabilité des produits. Beaucoup de marques développent leur propre signature « durable », mais chacun le fait avec des critères différents. Certains mettent l’accent sur le bien-être animal, d’autres sur l’utilisation réduite de pesticides ou sur la préservation de la biodiversité. On compare des choux et des carottes. Même quand deux filières travaillent avec le même objectif, les cahiers des charges ne sont jamais les mêmes. Notre idée, c’est de créer une grille de lecture unique, agglomérant tous les critères de durabilité et toutes les productions.

R.E. : Comment allez-vous procéder ?

M.R. : L’expérience montre qu’un seul système s’est avéré vraiment lisible pour le consommateur : le barème énergétique des appareils électroménagers. Car c’est un indicateur simple, à une seule entrée. Nous allons nous inspirer et proposer une note unique, comprise entre 1 et 100. Cette note sera glissante : un produit noté 75 une année pourra progresser ou régresser dans le temps, selon l’évolution de la filière concernée. Nous allons mettre en place un algorithme. Ses coefficients ne seront pas le fruit de négociations entre les acteurs de l’agro-alimentaires, mais calculés à partir des aspirations des consommateurs. Les étiquettes des trois premiers de cordée, les filières lait, poulet et céréales, devraient être présentés au SIA 2019.

R.E. : Ce dispositif ne sera lisible que si l’ensemble des produits l’intègre…

M.R. : Ça n’aura effectivement d’efficacité que si tout le monde joue le jeu. L’exemple Irlandais est à suivre. En 2007, trois ou quatre acteurs ont lancé « Origin Green », l’équivalent de « Ferme France ». Dix ans plus tard, la démarche fédère l’ensemble du secteur de l’agro-alimentaire irlandais, sans exception. Ce qui lui donne une puissance internationale reconnue. En France, la démarche sera à la fois plus complexe, compte tenu de la diversité des productions, mais le socle est également plus solide, avec un savoir-faire très fort en termes de filières qualités. Et tant mieux, car nous ne pouvons pas attendre dix ans : pour sauver l’agriculture française, il faudra aller plus vite.

R.E. : Où en êtes-vous à ce jour ?

M.R. : Nous avons fait connaître Ferme France début février. Le Salon est l’occasion de lui donner de la visibilité et de rencontrer de potentiels adhérents. L’adhésion annuelle revient à 50 000 €. Les fondateurs ont pratiquement avancé leurs cinq premières années d’adhésion dès le départ, soit 233 000 €. Beaucoup de marques arrivent sur le stand avec prudence, craignant que nous ne soyons une nouvelle signature « durable » de plus, susceptible de noyer le consommateur. Nous leur expliquons que c’est l’inverse, que nous voulons simplifier les choses. J’ai par exemple rencontré Philippe Sommer, directeur d’AgriConfiance. Ferme France est un excellent moyen de relancer cette marque coopérative, en situant l’exigence de son cahier des charges sur une grille claire.

R.E. : Quels seront les implications de Ferme France pour les agriculteurs ?

M.R. : Certains producteurs cumulent les cahiers des charges, les chartes. En les situant dans un référentiel unique, nous les aiderons à mieux gérer ces différents engagements, à rationaliser leur organisation de travail et par là, à réduire leurs coûts de production. Mais Ferme France a surtout l’ambition d’intégrer tous les produits français. Y compris ceux qui ne découlent pas de filières bénéficiant de labels ou de signes de qualité. Tous les agriculteurs verront leur production notée. L’occasion de mettre en avant ceux qui travaillent bien, même s’ils n’appartiennent pas à une démarche organisée et balisée.