Ecophyto 2 : « On court le risque de produire moins et moins bien », Christian Pees, Euralis
Le | Archives
Président de la coopérative Euralis et de l’organisation européenne Copa-Cogeca, Christian Pees livre à Référence environnement son point de vue sur les premiers éléments du rapport de Dominique Potier sur la version 2 du plan Ecophyto. Une réaction teintée de déception. Référence environnement : Pour quelles raisons êtes vous déçu par les premières pistes évoquées pour Ecophyto 2 ? Christian Pees : Les coopératives ont travaillé pendant plus d’un an avec les pouvoirs publics pour sortir de l’objectif quantitatif de -50 % qui n’a pas de sens. Nous avons essayé de produire quelque chose de digeste, de raisonnable, notamment pour la mise en place des certificats d’économies de produits phytosanitaires. D’après les premiers échos, j’ai l’impression que ce travail n’a pas été pris en compte. Aujourd’hui, j’entends parler d’efforts à concentrer sur la distribution, ce qui peut être interprété comme une pénalisation de l’ensemble du secteur. Ce n’est pas justifié. On parle aussi d’un objectif de -25 % ou encore de -5 % par an… selon moi, ça ne donnera pas de résultat. R.E. : Quelles sont selon vous les limites de cette approche ? C.P. : Prenons l’exemple de la zone d’activité de la coopérative Euralis, dont je suis le président. Les aides de la nouvelle Pac devraient entrainer une diminution des surfaces de maïs et une augmentation des céréales. Ce type d’évolution ne se fait pas sans pesticides. Plus globalement, l’activité agricole dépend de facteurs incontrôlables comme le climat : certaines années seront naturellement vertueuses pour les quantités de traitements, d’autres non. Pourquoi, dans ce contexte, imposer un système contraignant ? Je préfèrerais qu’on nous fixe une obligation de résultats environnementaux. Nous sommes prêts à être pragmatiques, à faire des efforts, mais cette obligation de réduction des produits phytosanitaire n’est pas une démarche constructive, qui peut mobiliser. Avec ces mesures, on court le risque de produire moins et moins bien… Nous allons vers des impasses pour certaines cultures. R.E. : En tant que président de Copa-Cogeca, quel est votre regard européen sur nos voisins sur ces thématiques ? C.P. : Les Etats membres de l’Union européenne sont très diversifiés, les contextes ne sont pas nécessairement comparables. Il y a cependant des exemples intéressants. Le Danemark s’est voulu drastique sur les mesures visant à limiter les quantités d’azote employées en agriculture : aujourd’hui, leur blé a perdu en qualité et n’est plus panifiable. L’Allemagne se veut pragmatique, sans aller dans les extrêmes, en s’appuyant sur l’innovation, l’informatique, les OAD ou l’agriculture de précision… Des éléments auxquels la France doit faire plus de place.