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Les priorités d’Eugénia Pommaret à la tête de l’UIPP

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Eugénia Pommaret a pris la direction de l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP) le 5 novembre. Dans un entretien accordé à Référence environnement, elle livre ses dossiers prioritaires : perturbateurs endocriniens, contrefaçons, évaluation des produits. Sans oublier la loi d’avenir agricole ou le plan Ecophyto. Un planning bien chargé. Référence environnement : Quels sont vos dossiers prioritaires ? Eugénia Pommaret : Un des dossiers majeurs pour 2014 est celui des perturbateurs endocriniens, dont les débats sur la définition se situent au niveau européen. La Commission va lancer une étude d’impact début 2014, puis entamera une large consultation, pas uniquement sur les pesticides. Si nous sommes d’accord sur le fait que toute substance considérée comme perturbateur endocrinien avéré doit être substituée, nous demandons que cette décision se fasse sur des fondements scientifiques avec des notions de seuils, et non pas sur des effets potentiels. Nous ne voulons pas que des substances soient écartées au nom du principe de précaution. Autre sujet sur lequel nous allons être vigilants : les contrefaçons. Si cela reste un dossier européen, notamment du fait que ces produits viennent de pays tiers, des dispositions sont prévues dans la loi d’avenir agricole et un volet s’y attèle dans le plan Ecophyto. Il y a environ trois mois, la mise en place en France d’un dispositif d’alerte a été validé, et Stéphane Le Foll devrait en faire un axe fort en 2014 par le renforcement des sanctions qui pourraient aller jusqu’au pénal. Les contrefaçons représentent 5 à 7 % du chiffre d’affaires européen, soit 350 à 500 millions d’euros. Au-delà de l’aspect économique, elles représentent un danger pour l’environnement et la santé du consommateur puisque ces produits n’ont pas suivi les procédures européennes d’évaluation. Nous sensibilisons les agriculteurs sur ce sujet, avec la distribution agricole. Par ailleurs, l’Efsa, l’autorité européenne de sécurité des aliments, a validé il y a un mois des lignes directrices sur l’évaluation des produits vis-à-vis des risques sur les pollinisateurs. Si ce rapport venait à être adopté, une large part de substances actives ne passerait plus la rampe de l’évaluation. Une réunion est prévue en décembre et nous estimons que le document actuel n’est pas acceptable en l’état eu égard notamment à l’absence de méthodes officielles pour certains tests préconisés. Ceci n’enlève en rien l’importance que nous attachons à la protection des pollinisateurs. Enfin sur le plan français, nous sommes très attentifs à l’évolution de la fiscalité sur les phytopharmaceutiques dans le cadre de la loi de finances. Si les propositions concrètes sont attendues pour 2014, il y a des bruits de couloirs sur une augmentation de la taxe sur les produits. Une disposition qui réduirait notre compétitivité avec les autres pays européens. R.E. : Au niveau français, plusieurs sujets concernent les produits phytosanitaires : loi d’avenir, conférence environnementale, plan Ecophyto. Quelles sont vos positions sur ces sujets ? E.P. : D’abord sur le projet de loi d’avenir agricole, nous sommes concernés par la phytopharmacovigilance avec une obligation de gestion post-AMM (NDLR : autorisation de mise sur le marché) des produits. Sur le principe, nous sommes tout à fait d’accord car cela se fait actuellement de manière diffuse. Il y a un besoin d’harmonisation. Toutefois, nous souhaitons que le champ de ce suivi soit clairement précisé. Autre sujet de la loi : le transfert des AMM à l’Anses. Nous rejoignons l’avis de la majorité des parties prenantes (associations écologistes, profession agricole, représentants des salariés…) qui sont opposées à ce qu’une seule instance fasse l’évaluation des produits et la gestion du risque. Par ailleurs, la conférence environnementale a inscrit le fait que le nombre d’aires d’alimentation de captage prioritaire passe de 500 à 1000. Nous serons vigilants car nous souhaitons que sur ces zones, l’agriculture, et pas seulement celle biologique, puisse avoir sa place. Quant au plan Ecophyto, il porte ses fruits, notamment en matière de formation, prévention, santé. Cela est positif. Un bémol, toutefois : contrairement à ce que pensent certains, les changements de pratiques ne se décrètent pas, il faut du temps. Plutôt que parler de rupture et de produits alternatifs, parlons de complémentarité de modes d’action. Enfin, la France anticipe souvent les évolutions réglementaires mais communique mal notamment au niveau européen. Nous souhaitons que le plan Ecophyto soit davantage en phase avec la directive européenne «  sustainable use » de 2009 car les instances bruxelloises vont nous juger sur celle-ci et non sur le plan Ecophyto. R.E. : Jean-Charles Bocquet, votre prédécesseur, à été nommé à la tête de l’ECPA. Est-ce que cela va aider l’UIPP dans ses combats ? E.P. : C’est une excellente chose qu’un français soit à la tête de l’ECPA, European crop protection association, et très positif pour l’industrie phytosanitaire française. Et surtout, l’ECPA va pouvoir bénéficier du dynamisme et des convictions de Jean-Charles Bocquet. Le travail de l’UIPP s’inscrit dans la continuité de ce qui a été engagé par l’équipe pilotée par Jean-Charles Bocquet. Nous sommes plus que jamais dans la logique de défense des produits phytosanitaires et la promotion d’une agriculture compétitive.