La biodiversité, un enjeu économique pour les entreprises
Le | Environnement-agroecologie
« Entreprises et biodiversité : gérer les impacts sur la chaîne de valeur. » C’est le nom du rapport présenté par l’association Entreprises pour l’environnement (EpE), le 1er décembre à Paris. Fruit de trois ans d’échanges entre la quarantaine d’entreprises membres, il souligne l’enjeu économique que représente la préservation de la biodiversité.
« La protection de la biodiversité est une façon de protéger la réputation d’une entreprise , explique Olivier Jan, directeur Responsabilité sociale et environnementale (RSE) du cabinet d’audit Deloitte. De plus, cela peut permettre à certaines structures préserver son approvisionnement. »
Des outils pour évaluer l’impact monétaire
En effet, Géraldine Vallejo, directrice du programme développement durable du groupe Kering, possédant la maison Gucci ou encore la société Yves Saint Laurent, souligne que « l’habillement de luxe requiert le choix de matières premières de qualité. Celles-ci sont très souvent naturelles, et l’impact environnemental de leur production compte dans l’image de marque du groupe. » Pour se conformer aux attentes des consommateurs et assurer ainsi la cote de Kering, Géraldine Vallejo a participé à la mise en place du compte de résultat environnemental EP&L, Environmental Profit & Loss Account. L’outil évalue le capital naturel et traduit en valeur monétaire les impacts du groupe sur l’environnement.
Chez Michelin, le calcul est simple. « Aujourd’hui, les 825 millions de véhicules nécessitent dix millions de tonnes de caoutchouc naturel pour la fabrication des pneus, soient cinq millions d’hectares de forêt d’hévéa, explique Hervé Deguine, de la direction des affaires publiques chez Michelin. Or, avec le doublement du parc automobile mondial d’ici à 2050, il faudrait vingt millions de tonnes de caoutchouc naturel et dix millions d’hectares de forêt d’hévéa…. Ce qui est impossible car cet arbre ne pousse que lorsque les conditions pédo-climatiques adaptées sont réunies. » Pour sécuriser son approvisionnement, le groupe a mis en place une charte de caoutchouc naturel responsable à destination de ses fournisseurs. L’objectif : promouvoir les bonnes pratiques agricoles pour accroître les rendements à l’hectare sans impacter la biodiversité environnante.
« Ne pas prendre en compte la biodiversité, c’est courir un risque financier »
« La protection de la biodiversité est devenue une opportunité économique pour les entreprises », déclare Annabelle Prin-Cojan, responsable de la communication chez EpE. Les outils finançant l’adaptation aux changements climatiques existent, comme CDC Biodiversité avec son programme Nature 2050. Ils donnent la possibilité aux acteurs des entreprises de s’investir.
À l’inverse, selon Annabelle Prin-Cojan « ne pas prendre en compte la biodiversité, c’est courir un risque financier. » L’étude de EpE cite l’exemple de l’International finance corporation (IFC), membre du groupe de la Banque mondiale, qui inclut la conservation de la biodiversité dans sa politique. Les entreprises qui souhaitent obtenir le financement de leurs projets doivent au préalable évaluer leurs interactions et celles de leurs fournisseurs avec la biodiversité, et mettre en évidence des actions d’atténuation d’impact sur les services écosystémiques.