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Pesticides et cancers : les résultats d’Agrican se font attendre

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L’étude Agrican (AGRiculture et CANcer), lancée en 2005 auprès d’une cohorte de 180 000 agriculteurs et salariés agricoles, en activité ou à la retraite, a pris du retard : les résultats concernant la survenue de cancers, l’incidence, ainsi que l’analyse ciblée relative à la relation entre les cancers et l’exposition aux pesticides ne sont pas attendus avant un an. « Afin d’obtenir un taux de retour satisfaisant des questionnaires, à savoir 34 %, nous avions déjà dû retourner une deuxième fois le questionnaire, ce qui n’était pas prévu au départ », a précisé Pierre Lebailly, épidémiologiste coordinateur de l’étude, lors du symposium «  Cancer et travail en agriculture » organisé à Tours le 16 septembre par l’Inma, l’Institut national de médecine agricole. « Et les délais d’analyse sont aujourd’hui retardés en raison de la disponibilité des données provenant des registres de cancers, qui nous permettent de comparer nos chiffres avec ceux de l’ensemble de la population. Nous venons tout juste d’obtenir les données de 2008 », a regretté l’épidémiologiste. Ainsi, rien de nouveau depuis le printemps 2011, où la présentation des premiers résultats 2006-2009 d’Agrican annonçait que la mortalité due aux cancers était moindre chez les agriculteurs en raison notamment d’un tabagisme moins élevé. De nouvelles maladies devraient être reconnues comme professionnelles Tant du côté de la MSA (Mutualité sociale agricole) que de celui de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail), les recommandations font appel à la prévention. « Agrican ne traite pas uniquement des pesticides et ne représente par ailleurs pas la seule étude au niveau mondial. Nous n’attendons pas ses résultats, ni l’obtention de certitudes sur les risques encourus par la profession agricole, pour avancer dans le domaine de la prévention et celui de la prise en charge », a tenu à souligner le professeur Patrick Choutet, président de l’Inma et médecin national de la MSA. Ainsi, la mise en place de nouveaux tableaux de maladies professionnelles est actuellement travaillée. « Un tableau reconnaissant comme maladie professionnelle la maladie de Parkinson résultant d’une exposition aux pesticides devrait bientôt être publié. Et nous nous penchons sur un tableau relatif aux hémopathies liées aux pesticides. » Des tableaux qui devraient donc bientôt s’ajouter aux cinq existants concernant les pesticides. L’Anses, quant à elle, s’est autosaisie en date du 20 juillet 2011 «  afin d’identifier, évaluer et caractériser les expositions à risque des travailleurs agricoles aux pesticides en vue de proposer des actions de réduction ciblées et proportionnées par des moyens de prévention ». Une réglementation plus protectrice Le professeur Gérard Lasfargues, directeur général adjoint scientifique de l’Anses, compte sur les évolutions réglementaires, et notamment sur le principe de substitution des produits chimiques prévu par le nouveau règlement (CE) n° 1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, pour réduire les risques de cancer au travail en milieu agricole. « Ce règlement prévoit en effet un examen régulier par les Etats membres des produits contenant des substances présentant un risque élevé pour la santé humaine ou l’environnement en vue de les remplacer par des produits contenant des substances actives moins dangereuses ou par des méthodes non chimiques de prévention ou de lutte, explique-t-il. La procédure globale de mise sur le marché des pesticides devient ainsi plus contraignante puisque l’autorisation ou le refus seront basés sur la prise en compte d’une balance bénéfice/risque, en analogie avec le règlement Reach. » Autre innovation apportée par ce règlement et fortement appréciée, l’obligation de tenue de registres par les utilisateurs professionnels. «  Ce renforcement de la traçabilité est très utile pour la prévention et la réparation des maladies professionnelles liées à l’exposition aux pesticides, ainsi que pour les études épidémiologiques explorant les relations entre ces expositions et des pathologies comme les cancers ou les troubles de reproduction. »