Université d'été FNE : analyser la lenteur de la transition écologique
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« Pourquoi la transition écologique se fait-elle attendre ? » C’est la question posée par Denez L’Hostis pour lancer les deux jours d’universités d’été de FNE, organisés les 8 et 9 juillet dans l’Essonne. Plusieurs intervenants ont essayé de répondre à la question. Laurence Monnoyer-Smith, commissaire générale au développement durable au ministère de l’Écologie, croit distinguer une « véritable pathologie du dialogue environnemental » entre ONG et État, « conjointement responsables » d’un véritable blocage. À ses yeux, la montée en puissance citoyenne sur ces thématiques doit permettre de sortir de ce blocage par le haut. Elle annonce par ailleurs la construction prochaine d’une « charte de participation », censée faciliter l’investissement des citoyens auprès des pouvoirs publics dans les débats, à l’échelle locale.
Gare à l’approche binaire et à la stigmatisation
Philippe Baret, agronome belge spécialiste de l’agro-écologie, fustige également l’approche binaire face à l’environnement. « Le combat simpliste Monsanto contre la nature, mis en scène par certaines ONG, fait le jeu de Monsanto ! Il faut appréhender la complexité et la diversité des cas de figures et éviter la stigmatisation, et plutôt consacrer de l’énergie à la formation et la construction de connaissances. » Même son de cloche pour Dider Livio, qui accompagne des entreprises dans la transition écologique pour le cabinet Deloitte Développement durable. Face à une assistance en partie sceptique, il juge nécessaire de partir du principe que « tous les acteurs sont de bonne foi, y compris les grandes firmes. » La collaboration constructive est à ce prix.
Une latence qui dépasse le manque de bonne volonté
D’autres intervenants se retrouvent d’ailleurs autour de cette idée : la lenteur de la transition écologique ne s’explique pas uniquement par le manque de bonne volonté. Didier Livio donne l’exemple des capsules Nespresso usagées. Alors que tous les acteurs (Nestlé, consommateurs, centres de tri…) se disaient tout à fait d’accord pour mettre en place et contribuer à une filière de recyclage, des contraintes techniques, financières et de confort ont compliqué le projet. « Il a fallu 5 ans pour que les premières capsules soient recyclées, alors même que toutes les parties prenantes étaient motivées ! »
Un « Pearl Harbour écologique » pour générer le changement
Le sentiment d’une prise de conscience trop lente et diffuse incite le rédacteur en chef d’Alternatives économiques, Guillaume Duval, à regarder en arrière. « L’histoire a montré que des systèmes manifestement verrouillés pouvaient se débloquer en très peu de temps suite à un déclic puissant. » Un équivalent écologique de Pearl Harbor pourrait selon lui provoquer un changement radical, de la même manière que l’attaque japonaise avait poussé la population des États-unis, jusque là réticente à la guerre, à se mobiliser quasi-instantanément et drastiquement. Une manière de rappeler, sans aller jusqu’à souhaiter une catastrophe écologique de grande ampleur, que la société ne réagit jamais aussi efficacement que quand elle est au pied du mur.