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Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement

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Pour le moins inhabituelle, la campagne 2022/23 mérite d’être analysée d’un point de vue économique, agronomique et environnemental. Retour sur une volatilité des engrais azotés qui a largement profité à l’urée, au détriment de la rentabilité de l’exploitation agricole et de l’environnement.

Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement
Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement

L’évolution récente du prix des engrais azotés a généré une grande incertitude et des conséquences dommageables pour l’agriculture. Cette volatilité, rarement vue, a engendré un effet « bourse », pour saisir les opportunités, entraînant des problèmes d’approvisionnement et la survenue de déficits budgétaires chez certains fournisseurs. Pouvait-on le prévoir ? Difficile à dire. Car le moteur des variations de prix de l’azote n’est pas facilement identifiable.

La volatilité du marché au profit de l’urée

Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement - © D.R.
Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement - © D.R.

Evolution du prix de l’unité d’azote (en $/kg) sur le marché international en fonction de la source d’azote (source : Argus Media)

UAN = solution azotée

Urea gran = urée granulée

AN = ammonitrate

Ammonia = ammoniac

Ce graphique montre que la hausse du prix des engrais azotés a démarré bien avant le début de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022. Des fluctuations importantes des prix de l’azote, toute source confondue, se sont fait sentir sur la campagne 2022/2023. Plusieurs raisons ont motivé la volatilité des cours, et des incohérences sur le prix de l’unité de l’azote en fonction de la source par rapport aux cours historiques sont apparues. Notamment la baisse du prix de l’urée de fin 2021 à février 2022 qui ne s’est pas répercutée sur les autres engrais azotés du fait du déclenchement de la guerre en Ukraine. Un décrochage qui s’est amplifié dans le temps par les restrictions d’exportation des produits russes, très grand producteur d’engrais azotés et l’arrêt de la production européenne d’ammonitrate. Mais surtout par les livraisons d’urée possibles depuis des pays, comme les États-Unis, où le prix du gaz sur le marché intérieur étant bien moins élevé que le prix en Europe, a rendu les exportations très lucratives, tout en restant moins élevé que le prix de l’azote européen. Un décalage du prix de l’unité d’azote toujours à l’avantage de l’urée en janvier 2023.

Des conséquences pour les cultures

Dans ce contexte, l’attentisme des acheteurs a provoqué de graves répercussions sur les filières agricoles, les agriculteurs étant déjà confrontés à une situation de sécheresse : la livraison des produits azotés a baissé de près d’un quart (23 %) comparé aux trois dernières campagnes. Les besoins en azote de certaines régions agricoles n’ont pas été pourvues ou seulement en partie, comme le montre le tableau ci-dessous.

Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement - © D.R.
Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement - © D.R.

Source : Unifa

Le gain de rendement apporté par une bonne fertilisation azotée cumulé au prix de vente des récoltes très élevées - le blé se vendant à plus de 400 €/t en mai 2022 - montrent que malgré le prix historiquement haut des engrais (1055€/t pour l’ammonitrate en mars 2022), le profit était tout de même au rendez-vous.

Des mesures contraignantes à venir pour l’air et le sol

Dans le but d’éviter des impasses une deuxième année, tant sur l’azote que sur les autres éléments - ce qui aurait un effet catastrophique sur les rendements de 2023/24 - l’approvisionnement doit être sécurisé au moins en partie, tant que les produits sont disponibles. En élargissant un peu les enjeux, la prédominance de l’utilisation de l’urée en 2022, est dommageable pour l’environnement (comme le montre le schéma ci-dessous) et ne répond pas correctement aux besoins agronomiques des cultures : l’urée étant la source d’azote apportant le moins de taux de protéine pour la plante à apport équivalent.

Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement - © D.R.
Prix des engrais : la volatilité profite à l’urée, au détriment de l’agronomie et l’environnement - © D.R.

La surutilisation de l’urée sur 2023 représente donc un véritable danger pour la santé publique, 94 % des émissions d’ammoniac dans l’air, un précurseur des particules fines étant dues à l’agriculture, mais aussi d’un point de vue agronomique, puisque 20 % de l’urée payée au champ part dans l’atmosphère. Et la réglementation ne s’y trompe pas ! L’État s’est engagé à réduire la pollution azotée, notamment via le PREPA (Plan de Réduction des Émissions de Polluants Atmosphériques) pour l’air et les directives nitrates pour le sol. Si en 2021 et 2022, bien que les objectifs du PREPA n’aient pas été atteints, la filière agricole n’a subi aucune répercussion - à cause de la priorité du Covid puis pour maintenir une production nationale décente malgré un déficit d’engrais azoté sur le marché européen - des mesures contraignantes sont à attendre pour les prochaines campagnes.

Malgré un prix à la tonne supérieur aux engrais banalisés, les engrais technologiques qui apportent un gain d’efficience de l’utilisation des nutriments, comme le C-PRO par exemple permettent in fine de payer moins cher sa fertilisation et/ou d’améliorer son rendement. Si l’objectif reste de payer le moins cher possible son azote, utiliser de l’urée avec des additifs qui maximisent l’efficacité tout en étant respectueux des sols agricoles, comme le NutriSphere-N, constituent un autre levier associant des bénéfices économiques et environnementaux, bien que moins performant.