Bayer : « Nous travaillons au développement de solutions combinatoires »
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Avec le rachat de Monsanto, effectif depuis juin 2018, la division agricole de Bayer dispose aujourd’hui de solutions complètes : aux côtés des produits phytosanitaires conventionnels et de biocontrôle, prennent place, à part égale, les semences. Le digital vient également renforcer l’offre de la multinationale. De quoi construire et proposer à l’agriculteur de multiples solutions combinatoires. Bayer CropScience France se réorganise en conséquence. Le point avec Catherine Lamboley, directrice des opérations.
Référence-appro : L’intégration de Monsanto a démarré mi-août 2018. Comment s’opère-t-elle ?
Catherine Lamboley : L’objectif est de finaliser l’intégration pour fin 2020. Sur le terrain, les deux entités sont encore différentes. L’équipe dédiée à la protection des plantes est pour sa part en réorganisation, notamment en raison de l’impact de l’interdiction des néonicotinoïdes, qui a fait chuter de 25 % le chiffre d’affaires de notre offre phytosanitaire. Les 5 directions d’agences régionales vont être supprimées et nous avons créé une direction des territoires et une direction des grands comptes. Le marketing, autrefois orienté par gamme produit, le sera désormais par cible, avec une approche par solution pour appréhender les écosystèmes. Nous disposerons, dès mai, de plusieurs pôles, respectivement dédiés à la distribution, aux agriculteurs, aux filières et à la prescription.
R.-A. : Quel est l’objectif de cette approche multicanale ?
C. L. : Nous souhaitons penser France et territoires, et réfléchissons aux nouvelles solutions combinatoires que nous pouvons proposer grâce aux actifs provenant de Monsanto. Notre priorité est de rester à l’écoute du marché, d’apporter de la cohérence et des solutions d’avenir, en assurant une expertise constante. Nous sommes désormais en mesure d’innover dans tous les domaines. Notre mission est de faire combiner efficacité et responsabilité, en prenant en compte les attentes sociétales et environnementales, pour une approche désormais qualitative de l’alimentation. Nous sommes à l’écoute des start-up, qui proposent souvent des réponses ciblées, et travaillons avec de multiples partenaires : les équipementiers pour améliorer par exemple les semis, l’irrigation, ou encore pour la compatibilité relative à notre plateforme Climate Fieldview ; les instituts techniques et l’Inra, pour mieux lutter contre les insectes en colza… Les pratiques et systèmes culturaux vont évoluer, avec une diversification des assolements, un allongement des rotations, etc. Nous devons proposer, avec l’ensemble des acteurs, des solutions à chaque problématique, pour chaque culture.
R.-A. : Quelles sont les innovations prochainement attendues issues de votre propre recherche ?
C. L. : Nous sommes en attente d’AMM de deux nouvelles solutions, pour le désherbage d’automne des céréales et pour celui du maïs. D’autres projets concernent le biocontrôle, avec un biofongicide pour l’arboriculture et la vigne. En semences, nous préparons le lancement de deux maïs hybrides en demi-précoce et d’une variété de colza tolérante à la jaunisse. Nous doublons nos investissements en recherche variétale sur le colza, pour compenser entre autres les pertes de solutions phytosanitaires. Nous devons toujours comprendre en amont les attentes du terrain, les attentes sociétales et réglementaires, en phytos notamment. Et ce, pour travailler les voies adéquates et apporter les innovations au bon moment.
R.-A. : Quelles sont vos ambitions sur le marché français de l’agrochimie ?
C. L. : Aujourd’hui, nous avons 20 % de parts de marché en phytos et sommes le premier acteur en variétés de maïs grain et colza. Notre ambition est de progresser en biocontrôle, en herbicides maïs. En semences, nous envisageons de passer de 5 à 10 % de parts de marché en maïs fourrage d’ici 2 ou 3 ans.
R.-A : Monsanto vient récemment de perdre, aux États-Unis, un deuxième procès impliquant de nouveau un jardinier atteint d’un cancer jugé être causé par l’utilisation de Roundup. Bayer a notifié que plus de 11 200 actions en justice sont en cours aux États-Unis, dont une demi-douzaine seront traitées en 2019. Le glyphosate a-t-il toujours un avenir ?
C. L. : Nous sommes déçus du verdict rendu par le jury populaire de Californie dans le procès Hardeman et ferons appel de cette décision. Car nous continuons à croire que nos produits sont sûrs lorsqu’ils sont utilisés selon les instructions d’emploi. Raison pour laquelle nous montrerons, au niveau européen, pourquoi le glyphosate doit être réapprouvé en 2021. Le CIRC s’est fondé sur la notion de danger, les autorités réglementaires évaluent selon le risque, en prenant en compte l’exposition. Le glyphosate reste par exemple indispensable pour l’agriculture de conservation. Ce qui ne nous empêche pas de travailler les alternatives.
Propos recueillis par Gaëlle Gaudin
Bayer CropScience France en chiffres :
- Chiffre d’affaires 2018 : 447 M€ (incluant l’activité de Monsanto de juin à décembre), ¾ phytosanitaires et ¼ semences
- Premiers segments de marché en phytos : herbicides céréales, fongicides céréales, fongicides vigne et herbicides maïs
- Semences : présence sur le maïs, colza et semences potagères.