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Denis Tardit, Président de Syngenta France : « Syngenta reste Syngenta »

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Les dernières étapes financières du rachat de Syngenta par le groupe chinois ChemChina, qui détient déjà Adama, aboutissent ces jours-ci. Quelles conséquences sur la stratégie de l'agrochimiste suisse ? Quels impacts pour les distributeurs français ? Le point, avec Denis Tardit, Président de Syngenta France.


Reference-appro.com : Ce 26 juin, le Conseil d'administration de Syngenta est remanié pour intégrer quatre administrateurs de ChemChina. La stratégie de Syngenta, tant sur les produits de protection des plantes que sur les semences, va-t-elle évoluer ?

Denis Tardit  : Syngenta reste Syngenta. Quatre administrateurs indépendants demeurent au Conseil et le désaccord de deux administrateurs suffit pour bloquer toute décision. Mais l'objectif reste le développement de la société et nos stratégies sont clairement définies. Elles ont été rappelées aux 184 dirigeants réunis en séminaire il y a deux semaines : consolider notre position de leader mondial en produits de protection des plantes et, en semences, devenir un numéro 3 incontestable et s'approcher le plus possible de la deuxième place du podium. Nous comptons développer, en fonction des besoins, nos technologies en Chine, pays pour lequel nous avons créé, dans notre organisation mondiale, une cinquième région. En semences, notre développement se fera par croissance organique et, comme l'a annoncé notre directeur général Erik Fyrwald, par d'éventuelles acquisitions.


R.A. : Vous venez pourtant de céder votre activité betteraves. Cela fait partie de votre stratégie ?

D.T. : La cession de cette activité betteraves, modeste au niveau mondial mais coûteuse en R&D, nous permet d'investir davantage sur les autres cultures. En France, nous souhaitons consolider notre position forte en tournesol et légumes, accroître celle en maïs et colza et, surtout, celle en céréales hybrides avec la progression des orges hybrides Hyvido. Des investissements importants sont consacrés à l'hybridation du blé car nous sommes convaincus que cette technologie déplafonnera les rendements. Ce sera une innovation de rupture. Notre nouveau site de Chartres, inauguré le 21 juin 2017 (voir actualité dans cette lettre), est d'ailleurs dédié aux variétés hybrides de céréales et de colza. Nous comptons lancer nos premières variétés de blé hybride autour de 2020.


R.A. : Des innovations sont-elles attendues côté phytos ?

D.T. : Notre portefeuille de nouvelles matières actives sur les 5-10 ans à venir est extrêmement prometteur. Et ce, tant en grandes cultures qu'en cultures spécialisées. Nous sommes confiants quant à notre pouvoir d'innovation et donc dans notre capacité à rester numéro 1 mondial et à se rapprocher de Bayer en France au niveau chiffre d'affaires. Dans l'Hexagone, nous poursuivons le lancement de notre fongicide SDHI Elatus Plus à base de Solaténol. Pour sa première année, la spécialité a déjà atteint plus de 20 % du marché. Nous comptons également développer nos stimulateurs de défenses naturelles Redeli et Bastid/Blason, dont les lancements sont prometteurs. Enfin, nous venons d'obtenir l'homologation de notre herbicide maïs Calaris (voir actualité dans cette lettre).

Nous sommes par ailleurs convaincus que l'accord signé fin 2016 avec la société néerlandaise DSM nous offrira un portefeuille important et innovant de spécialités de biocontrôle pour différentes cultures. Mais, même si les homologations peuvent être plus rapides, le pas de temps de R&D est long, il ne faut pas l'oublier ! Ces produits de biocontrôle nécessitent par ailleurs davantage d'investissement en termes d'accompagnement et leur développement est plus long : par exemple, sur des cultures spécialisées à forte valeur ajoutée, les agriculteurs les testent d'abord sur de petites surfaces.


R.A. : Le rachat par ChemChina n'a donc aucun impact sur la distribution agricole ?

D.T.  : Je sais, pour l'avoir vécu de nombreuses fois, que les fusions ont tendance à centrer l'entreprise sur l'interne. Mais Syngenta restera centrée sur ses clients et n'a plus qu'à mettre sa stratégie en oeuvre. Servir nos clients du mieux possible est une priorité. Nous avons de quoi montrer que nous sommes un partenaire de choix, ce qui ne manquera pas d'être fait lors d'un événement que nous souhaiterions organiser fin 2017 ou début 2018.