Fongicides blé, vers la fin du T1 ?
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L’an passé, avec une pression maladie faible, une utilisation croissante des variétés de blé tendre résistantes et des modèles de prévision, la proportion de T1 a baissé de 30 %. Pour les ingénieurs d’Arvalis-Institut du végétal, ce premier traitement ne devient plus un passage obligé. La gestion des résistances reste en revanche toujours un sujet d’actualité.
“Le T1 n’est plus obligatoire, sauf si le modèle de prévision le recommande ou si la rouille jaune apparaît de manière précoce”, a souligné Jean-Yves Maufras, ingénieur chez Arvalis-Institut du végétal, lors d’une e-conférence de presse organisée le 3 novembre 2020.
En 2020, la proportion de T1 a diminué de 30 % par rapport à 2019, après avoir déjà connu une baisse de 16 % par rapport à 2018. Ainsi, seulement 1,9 million d’hectares de blé tendre a reçu un T1 en 2020, contre 3,2 millions en 2018. Les raisons ? Une utilisation croissante des modèles de prévision ainsi que des variétés résistantes, et une adaptation aux faibles pressions maladie.
En 2020, 44 % des surfaces ont été semées avec une variété résistante à la septoriose, contre 36 % en 2019, soit trois fois plus qu’il y a dix ans. Ces pourcentages se sont respectivement élevés à 62 % et 25 % pour les variétés résistantes à la rouille jaune et à la rouille brune, contre 63 % et 23 % en 2019.
L’utilisation du soufre s’est maintenue sur 250 000 ha de blé. Elle devrait augmenter l’an prochain, avec la disparition du chlorothalonil. Le folpel devrait également progresser. Selon Arvalis, l’efficacité de 600 g/ha de folpel équivaut à celle de 2 500 g/ha de soufre.
Arvalis révèle par ailleurs que la stratégie consistant à retarder les dates de semis s’est révélée hasardeuse en 2020, avec des pertes de productivité plus importantes que les bénéfices espérés sur la protection. Les conditions climatiques ont parfois obligé les agriculteurs à davantage retarder les semis.
Faible pression maladies en 2020
Au printemps 2020, le temps sec a conduit à une faible pression des maladies fongiques sur céréales et 36 % des hectares de blé n’a été traité qu’une seule fois, contre 25 % en 2019. Seul 19 % des hectares a reçu trois traitements, contre 30 % en 2019. “La nuisibilité moyenne des maladies dans les essais blé tendre s’est montée à 7,8 q/ha, contre 16,4 q/ha en moyenne depuis presque vingt ans, a précisé Jean-Yves Maufras. Elle correspond à la plus basse depuis 2002.” Le nombre de traitements s’est élevé à 1,9 sur blé tendre en 2020, contre 2,2 en moyenne ces dernières années et 2,5 en 2016. Ce qui montre encore une fois que les agriculteurs s’adaptent aux conditions climatiques et de pression maladies de l’année.
Résistances : poursuivre la prise en compte
“Nous sommes entendus sur nos recommandations relatives à la gestion des résistances aux fongicides, a relevé Claude Maumené, ingénieur chez Arvalis-Institut du végétal. La note commune dédiée joue son rôle.” Ces recommandations devront encore être suivies en 2021. Car les résistances continuent d’évoluer.
Les souches de septoriose résistantes aux triazoles (TriHR) ont progressé de 43 % à 58 %, celles résistantes aux SDHI (CarR) de 13 % à 18 %. Les souches multidrug résistantes (MDR) se sont révélées stables (28 % contre 26 %). Au total, 86 % des souches sont donc fortement résistantes aux triazoles. Sur orges, on note une évolution inquiétante de la résistance aux QoI (67 % contre 32 % l’an passé). La résistance aux SDHI est stable, mais déjà bien installée (61 %). Diversifier les modes d’action et les substances actives au sein d’un même mode d’action reste donc de mise pour 2021. Arvalis recommande de ne pas utiliser le même triazole plus d’une fois par saison, de limiter les SDHI et les QoI à un seul passage, et de systématiquement associer les SDHI à d’autres modes d’action. Questar associé à Elatus Plus se révèle être au niveau des meilleures références pour lutter contre la septoriose et la rouille brune. “L’intérêt de Questar est son nouveau mode d’action, a précisé Claude Maumené. Il permet de lutter contre la septoriose sans utiliser de triazole.”
Des produits prometteurs
Arvalis a testé dans ses essais deux produits prometteurs. Une spécialité de Syngenta, composée de 62,5 g/l de pydiflumetofen et de 75 g/l de prothioconazole, qui devrait être sur le marché en 2022. “Même à demi-dose, ce projet se révèle être le plus performant sur septoriose”, a précisé Jean-Yves Maufras. Le pydiflumetofen, développé sous le nom de marque Adepidyn, est une matière active à large spectre appartenant à la classe chimique des carboxamides (SDHI), premier représentant du groupe chimique N-methoxy-(phenyl-ethyl)-pyrazole-carboxamides au sein des fongicides du groupe 7 du FRAC.
Devrait également être mis sur le marché, mais en 2023, Pavecto 60 (nom commun ISO métyltétraprole). “Il présente une très bonne activité sur septoriose, mais se montre insuffisant sur rouille brune”, a souligné le spécialiste. Ce nouveau fongicide, découvert par Sumitomo Chemical, est un fongicide QoI agissant sur le complexe III de la chaîne respiratoire mitochondriale, mais possédant une structure chimique différente des QoI existants. Ce qui lui confère la capacité de contrôler différentes souches de champignons qui ont développé une résistance aux QoI actuels. Il vient d’obtenir son classement dans un nouveau groupe FRAC codé “11A” intitulé “QoI-fungicides (Qui-none outside Inhibitors) ; Subgroup A”.