La semence ne connaît pas la crise
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« A contre-pied de l'ambiance générale, notre secteur est en croissance et en recherche de talents » a en substance déclaré Daniel Segondś, président du Gnis (Groupement national interprofessionnel des semences), lors d'une conférence de presse le 11 décembre. Les indicateurs sont au vert en termes de chiffre d'affaires, avec une progression de 15 % à l'exportation et une amélioration de la balance commerciale nette semences de 39 % lors de la campagne 2012-2013. L'innovation, alimentée par des budgets pesant 13 % du chiffre d'affaires, est à l'origine d'une progression régulière des rendements. Et c'est bien cette faculté d'innovation que l'interprofession des semences entend préserver en prêchant le juste milieu en termes de cadre réglementaire, national, européen comme international.
Les rendez-vous ne manquent pas. En France, tout d'abord. L'accord interprofessionnel résultant de la loi sur les certificats d'obtention végétale de 2011 a été étendu du blé aux autres céréales à paille. L'application de la CVO (contribution volontaire obligatoire) légitime les semences de ferme tout en permettant le financement de la recherche. Deux nouveaux accords devraient aboutir en 2014 : l'un sur les protéagineux, dès ce printemps, le second, sur les plants de pommes de terre, sous réserve d'un accord global incluant la qualité sanitaire des plants. Le Gnis va demander que le principe de la CVO soit applicable, au-delà des 21 espèces déjà listées, à des fourragères (ray-grass italien et hybrides, trèfles incarnat et violet), au soja et à des cultures intermédiaires (moutarde et avoine rude).
Non brevetabilité des gènes natifs, un dossier plutôt bien engagé
Le système d'obtention en France est fondé sur un accès libre aux variétés déjà inscrites. Un système qui s'accommode de celui des brevets en vigueur dans le domaine du transfert des gènes sous réserve que celui-ci reste circonscrit aux vraies innovations. La question est particulièrement claire dans le dossier des gènes dits natifs, gènes qui sont simplement mis en évidence à mesure que le génome des plantes est décrypté. « Breveter les gènes à mesure de leur décryptage conduirait à ne plus avoir accès librement au patrimoine génétique », a développé François Burgaud, directeur des relations extérieures du Gnis. Les professionnels misent sur la convergence des prises de position qui commencent à se manifester sur ce sujet. Un projet de résolution au Sénat déposé cette semaine, les rapports du haut conseil des biotechnologies, du Commissariat général de la stratégie (cf notre lettre du 11/10/2013) vont dans ce sens.
Pour une réglementation bien dosée
Au plan européen, la dernière ligne droite est engagée pour aboutir à une refonte simplificatrice des réglementations. Si les professionnels sont rassurés par la prise en compte dans ses grandes lignes du mode de fonctionnement français en termes de catalogue et d'inscription des variétés, ils restent inquiets « sur les ambigüités de certaines formulations », a rappelé Catherine Dagorn, directrice du Gnis. Dérogations pour matériel « hétérogène » ou de « niche », pour des « micro-entreprises » ou les amateurs, renvoi à des textes ultérieurs, « le risque existe de fragiliser notre système réglementaire », a souligné Catherine Dagorn.
Autre rendez-vous majeur en 2014, celui sur le protocole de Nagoya, texte international pour réglementer la biodiversité. Les échanges sont sur le point de se clore entre le parlement et la commission européenne. « Notre message est clair, a conclu Daniel Segond, quels que soient les besoins en termes de caractérisation ou de partage, il est indispensable de conserver la capacité d'innover à partir des ressources génétiques. »
Photo : de gauche à droite, François Burgaud, Catherine Dagorn et Daniel Segonds.