« Le secteur du numérique progresse sur son empreinte carbone », Didier Robert, Smag
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Alors que la digitalisation de l’agriculture s’accélère, des sénateurs publient un rapport alarmant sur les émissions de gaz à effet de serre et sur la consommation énergétique du secteur du numérique. Didier Robert, directeur de Smag, livre à Référence agro, son analyse pour le secteur agricole et la stratégie de l’entreprise pour réduire son empreinte environnementale.
Le secteur du numérique est à l’origine de 3,7 % des émissions de gaz à effet de serre et de 4,2 % de la consommation mondiale d’énergie primaire dans le monde en 2019. Ramené à la France, il représentait 2 % du total des émissions, selon un rapport présenté le 24 juin par une mission d’information du Sénat. « Ce chiffre pourrait croître de 60 % d’ici à 2040 si rien n’est fait pour en réduire l’impact », alertent les sénateurs dans leur rapport. Alors que la digitalisation de l’agriculture avance, comment les acteurs du secteur prennent en compte l’impact environnemental du numérique ? Trois questions à Didier Robert, directeur de SMAG.
Référence agro : Quelle est votre réaction à la publication des chiffres des sénateurs ?
Didier Robert : Ce n’est pas une nouveauté. Comme toute activité humaine, le digital est consommateur d’énergie. Une des conclusions principales du rapport est que ce sont les terminaux, soient les ordinateurs ou les téléphones, qui génèrent le plus d’émissions de gaz à effet de serre. Un geste simple est d’éviter d’en changer fréquemment !
Au-delà du chiffre, c’est surtout sa progression potentielle qui doit nous inquiéter. La profession va dans le bon sens : peu de secteurs en dehors de l’IT (NDLR, Information technology) font autant attention à leur empreinte carbone. Des entreprises, comme Microsoft ou Apple, mènent des stratégies très offensives de compensation de leurs émissions. Mais nous pouvons améliorer le bilan, il est encore temps de le faire.
R.A. : Qu’est-ce que cela représente au niveau d’une exploitation agricole ?
D.R. : C’est minime car ces outils ne sont pas encore utilisés intensivement au quotidien. Toutefois nous allons le mesurer plus spécifiquement grâce à nos plateformes configurées pour monitorer l’empreinte carbone et qui produisent des chiffres précis. Une étude sur la consommation dans les exploitations sera finalisée à la fin de l’année.
Toutefois, nous pouvons déjà donner des ordres de grandeur. Un agriculteur utilisant un de nos logiciels de modulation de fertilisation consommera moins d’un kilogramme de CO2 par an, soit l’équivalent carbone de huit kilomètres en voiture. En parallèle, la modulation peut permettre d’économiser 0,4 tonne équivalent CO2 par hectare, soit pour une exploitation de 100 hectares, un gain de 40 t/eqCO2 pour une dépense énergétique digitale de 500 grammes. Le bilan est donc très positif !
R.A. : Que faites-vous au sein de Smag pour réduire votre empreinte carbone ?
D.R. : Nous avons lancé une stratégie « Green IT » en 2017 pour améliorer notre bilan interne et externe. Nous envoyons de moins en moins de mails grâce à l’utilisation des plateformes collaboratives. Nous avons ralenti le rythme de changement de nos terminaux. Nous demandons également à nos collaborateurs d’éteindre leurs ordinateurs en partant le soir. Tous ces gestes réduisent de manière importante les consommations d’énergie, tout en nous permettant de réaliser des gains économiques.
Au niveau externe, nous travaillons le design de nos applications. Par exemple, nous utilisons des applications dites natives, développées spécifiquement pour des systèmes d’exploitation utilisés par les smartphones et tablettes, qui consomment moins d’énergie et permettent un meilleur paramétrage et d’optimiser les échanges de données. Nous faisons également en sorte que nos interfaces n’imposent pas de changer de téléphones portables fréquemment.
Sans oublier que nous développons des logiciels destinés à améliorer le bilan environnemental des exploitations agricoles : réduction des pesticides, des engrais, des émissions de gaz à effet de serre, stockage du carbone dans les sols, etc. Durant le confinement, nous avons lancé une application pour surveiller les cultures à distance, par image satellitaire : les conseillers ont pu rester chez eux en surveillant les parcelles des agriculteurs, ce qui a évité des déplacements.
Certes, le digital consomme de l’énergie. Mais, avec les applications que nous développons, nous avons un bilan positif sur l’environnement.