Mutagénèse, OGM, non OGM… l’UFS souhaite une adaptation de la réglementation actuelle
Le | Agrofournisseurs
Face à l’imbroglio juridique autour de la directive 2001-18 et avec elle, la classification en OGM ou non OGM des différentes techniques de mutagénèse, l’UFS souhaite faire avancer le dossier en proposant une approche claire et simplifiée de la réglementation. L’enjeu est de taille : que les semenciers puissent se projeter dans leurs futurs programmes de recherche pour répondre aux attentes multiples des filières agricoles et alimentaires.
« La réglementation, vieille de vingt ans, n’est plus adaptée au contexte actuel, expliquait Rachel Blumel, directrice de l’Union française des semenciers (UFS), en préambule d’une « Master class » organisée sur les méthodes d’amélioration des plantes, le 7 avril. Nous devons sortir de ce statu quo juridique qui crée des incertitudes et ne permet pas à nos entreprises de se projeter. »
Encore des interrogations sur la directive 2001-18
Au cœur du problème, la directive 2001-18, dont les origines remontent à 1990, et la classification en OGM ou non OGM des différentes techniques de sélection et notamment de la mutagénèse. Selon qu’elle soit dirigée, aléatoire, in vitro ou in vivo, basée sur des procédés utilisés avant ou après 2001, la directive 2001-18 s’applique ou non, et les variétés créées sont considérées comme OGM ou non. Avec, pour complexifier le dossier et les échanges commerciaux, des interprétations différentes selon les États membres.
Une variété OGM nécessite un surcoût de 35 à 50 M€
« Une situation qui génère une réelle distorsion d’accès au marché pour les variétés selon la méthode d’obtention utilisée, rappelle Laurent Guerreiro, directeur général de RAGT Semences. Pour une variété de maïs par exemple, reconnue par la directive comme OGM, le surcoût lié à son approbation à l’échelle européenne est estimé entre 35 et 50 M€. Une somme qui englobe la nécessité d’effectuer des évaluations de risques spécifiques (environnemental, sanitaire), d’obtenir des autorisations pour l’expérimentation au champ, pour la mise sur le marché avec obligation de traçabilité… »
De multiples conséquences
Pour Laurent Guerreiro, « ces coûts deviendraient rédhibitoires pour les PME avec le risque de voir les grandes entreprises se recentrer sur un nombre limité d’espèces et de caractéristiques variétales alors que les attentes sociétales ne cessent, elles, de se multiplier : variétés moins gourmandes en intrants, résistantes à la sécheresse, aux maladies, aux insectes… Le risque aussi de voir les variétés performantes se reporter vers des zones agricoles à la législation adaptée. Quid également des travaux de coopérations et des échanges de matériel génétique entre zones du monde ayant des approches réglementaires différentes ? »
L’approche simplifiée de l’UFS
L’idée de clarifier juridiquement le dossier vise aussi « à faire cesser l’amalgame permanent entre la sélection végétale et les OGM », précise Rachel Blumel. Voilà pourquoi l’UFS propose de construire une approche simplifiée. Si à la question « subsiste-t-il des gènes étrangers dans les plantes obtenues », la réponse est oui, alors la variété obtenue entre dans le périmètre de la réglementation OGM. Quelle que soit la technique de sélection, si la réponse est non, alors la variété ne doit pas être considérée comme un OGM. « L’enjeu est aussi de faire converger l’interprétation juridique vers l’état des connaissances scientifiques et de développer une approche harmonisée des réglementations à l’échelle mondiale tout en conservant le savoir-faire au sein de nos territoires », complète Rachel Blumel.
Des précisions attendues fin avril
Prochaines étapes : fin avril avec la tant attendue étude de la Commission européenne qu’elle doit remettre au Parlement européen. « Nous ne savons pas du tout quel en sera le contenu, confie-t-elle. Mais nous en attendons beaucoup pour adapter la réglementation actuelle. » En France, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) doit publier un rapport courant mai suite à l’audition, le 18 mars, de différentes personnalités, dont des membres de l’UFS, sur les nouvelles techniques de sélection végétale en 2021. Les mois à venir devraient donc apporter de la matière pour que ce dossier s’éclaircisse enfin.