Rencontre avec Eugénia Pommaret, directrice générale de l’UIPP - « Le blocage des AMM par la DGAL est inquiétante »
Le | Agrofournisseurs
Eugénia Pommaret, directrice générale de l'UIPP, l'Union des industries de la protection des plantes, fait le point sur les différentes questions d'actualité relatives à la protection des plantes. Principale préoccupation de la profession, le blocage par la DGAL des autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits.
Après une année encore atypique au niveau conditions climatiques, comment les sociétés phytopharmaceutiques abordent cette nouvelle campagne ?
Eugénia Pommaret : La préoccupation principale demeure le blocage actuel de certaines AMM par la DGAL. Si les produits attendus ne peuvent être commercialisés par manque d'autorisation, certaines stratégies pourraient être compromises.
A combien estimez-vous le nombre d'AMM en attente ?
E.P. : Une cinquantaine de produits évalués par l'Anses, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, n'a pas encore reçu de décision de la part de la DGAL. Et autant d'AMM ont été débloquées grâce à une contestation de notre part et des recours indemnitaires de la part de sociétés phytopharmaceutiques. La réglementation impose à la DGAL un délai de deux mois pour prendre une décision une fois que le produit est évalué par l'Anses. Une non réponse de sa part équivaut à un rejet. Or nous estimons que sur les derniers mois, ce délai n'a pas été respecté pour une centaine de produits.
Comment expliquez-vous ce non respect de la réglementation par la DGAL et quelle action comptez-vous mener ?
E.P. : Il semblerait que la DGAL veuille anticiper la réglementation européenne et interdire les produits contenant des substances candidates à la substitution. La Commission est actuellement en train de finaliser une liste comprenant entre 70 et 80 de ces molécules. Nous regrettons cette approche de la DGAL car la liste n'est pas encore définie. Ces substances ne sont par ailleurs pas destinées à être interdites mais évaluées pour être éventuellement substituées sur certains usages. Nous allons donc mener une action conjointe avec l'ECPA, l'association européenne de protection des plantes, pour informer la Commission européenne et lui demander d'intervenir auprès du Gouvernement français. Car ce blocage des AMM impacte la France, mais également tous les pays membres de la zone sud compte tenu de l'évaluation zonale des produits.
Quelles sont les avancées réglementaires en matière d'équipement de protection individuelle (EPI) ?
E.P. : Nous manquons de lisibilité en la matière. Le travail mené entre l'UIPP, l'Anses et la DGAL a conduit à l'élaboration d'un cadre indiquant quel EPI est nécessaire dans telle ou telle situation. Mais cette approche pragmatique semble ne pas être suivie par le ministère en charge de l'Agriculture. Certains produits se voient donc, lors de l'obtention de leur AMM, assujettis à certains EPI qui ne nous semblent pas appropriés.
Les industriels du biocontrôle visent 15 % de parts de marché pour 2018, qu'en pensez-vous ?
E.P. : Cet objectif annoncé par IBMA France nous semble assez optimiste. Le développement du biocontrôle est incontestable. Les adhérents de l'UIPP, qui détiennent la moitié de l'offre des spécialités de biocontrôle, restent acteurs sur ces innovations mais certains usages, comme les herbicides, ne sont pas couverts à ce jour. L'utilisation de ces produits, qui sont plutôt complémentaires qu'alternatifs et utilisés dans les programmes de traitement, nécessite un accompagnement approprié pour que l'efficacité soit optimale.