Rencontre avec Stéphane Radet, directeur du Snia. « PAT : un refus français pourrait défavoriser certaines de nos filières d’élevage »
Le | Agrofournisseurs
La Commission européenne a annoncé le 14 février la réintroduction des protéines animales transformées (PAT) à partir du 1er juin prochain dans les élevages de poissons. Alors que la levée de boucliers a été immédiate en France en pleine affaire de la fraude à la viande de cheval, Stéphane Radet, directeur du Syndicat national de l'industrie de la nutrition animale, évoque les risques économiques encourus si la France fait cavalier seul face à cette décision communautaire. Propos recueillis par Laurent Caillaud
Reference-appro.com : Comment les industriels de l'alimentation animale réagissent-ils à l'accueil fait par la France de la décision de réintroduire les PAT ?
Stéphane Radet : Il ne revient pas aux fabricants d'aliments de se prononcer sur l'autorisation de cette matière première. C'est une décision réglementaire qui revient aux Pouvoirs publics et qui aura des conséquences. En effet, après la phase d'autorisation, vient celle de l'utilisation effective et donc la question de la volonté des filières de recourir ou non à cette matière première. Il est évident que certains segments de marché ne les utiliseront jamais mais est-ce une raison pour les exclure de toutes les productions ? On doit se poser la question. N'oublions pas que ce dossier a une dimension communautaire. Le marché des productions animales est ouvert car il évolue dans le marché unique européen et ce débat sur les PAT arrive à un moment où les filières animales françaises sont en recherche de compétitivité par rapport à d'autres zones de production en Europe.
Quelles conséquences pourrait avoir un refus de la France sur ce dossier ?
S. R. : La décision européenne ne concerne pour l'heure que certaines PAT et seulement dans l'alimentation des poissons. La feuille de route de la Commission est toutefois connue depuis longtemps et le débat sur l'ouverture des PAT aux marchés porcs et volailles est bien programmé. Si seule la France n'a pas recours à leur utilisation, cela va créer une distorsion de concurrence qui pourrait défavoriser certaines de nos filières d'élevage au profit de produits d‘importation. L'utilisation de ces PAT a un double impact pour ces filières : la valorisation de coproduits de viandes et la mise à disposition d'une nouvelle source de protéines dans l'alimentation animale.
La France est-elle le seul pays à réagir négativement au retour des PAT ?
S. R. : Si la décision Européenne a été prise, c'est que la majorité des États y était favorable. Dans les pays du Nord de l'Europe, cette décision n'a pas engendré les mêmes réactions que celles enregistrées en France. Ces pays ont d'ailleurs été moteurs dans ce dossier en en faisant un argument environnemental. Car ces PAT peuvent se substituer aux farines de poissons issues des pêcheries et ainsi se substituer au prélèvement de ressources naturelles.