Sulfoxaflor et néonicotinoïdes : l'Anses répond à la polémique, Hulot et Travert demandent de rouvrir le dossier
Le | Agrofournisseurs
L’autorisation de deux produits phytosanitaires à base de sulfoxaflor, molécule insecticide, défraye la chronique. Elle connait un rebondissement suite à l’annonce commune des ministres de l’Agriculture et de la Transition écologique, le 20 octobre. Interpellés par des associations environnementales, dont l’Union nationale de l'apiculture française (Unaf), Nicolas Hulot et Stéphane Travert ont demandé à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) de se pencher à nouveau sur ce dossier.
Le 27 septembre 2017, l’Anses a en effet délivré des autorisations de mise sur le marché (AMM) à deux produits de Dow AgroSciences, Closer et Transform, à base de sulfoxaflor. Une décision qui a fait vivement réagir l’Unaf. Elle considère cette molécule, autorisée par la Commission européenne en 2015, comme un néonicotinoïde, « hautement toxique pour les abeilles », car elle a notamment, indique l’Unaf, le même mode d’action systémique. « L’Anses vient de recevoir des données complémentaires relatives aux risques du sulfoxaflor », affirment les deux ministres, qui attendent de l’Anses qu’elle les analyse dans les trois mois, afin de déterminer si les autorisations de mises sur le marché de deux produits sont à remettre en cause.
Contactée par Référence environnement, l’Anses affirme que la molécule n’est pas un néonicoinoïde. Et répond point par point à la polémique :
- Le sulfoxaflor appartient à une famille chimique différente des néonicotinoïdes. Si le mode d’action est en effet systémique, la persistance d’action est très nettement inférieure aux néonicotinoïdes. Dans le sol, elle est de 1 à 4 jours, quand elle s’élève à 120 à 520 jours pour les néonicotinoïdes. La molécule est aussi moins toxique pour les organismes aquatiques.
- Concernant le risque pour les abeilles, dans le cadre de l’approbation de la substance active au niveau européen, les éléments évalués par l’Efsa* (risque aigu et chronique sur l’abeille et la colonie) ne mettent pas en évidence de risque inacceptable lorsque l’exposition des pollinisateurs à la substance est limitée par des mesures d’utilisation du produit appropriées, indique l’Anses. Le sulfoxaflor est effectivement, lors d’un contact direct et à certaines doses, hautement toxique pour les abeilles. C’est pourquoi, il n’est autorisé que pour des usages et dans des conditions d’emploi, qui garantissent que les abeilles ne seront pas exposées à cette toxicité.
- Ainsi, dans les AMM des deux préparations, la France a pris des mesures plus restrictives que celles proposées lors de l’approbation de la substance active, à savoir, indique l’Anses :
- Interdiction d’application pendant la période d’attractivité de la plante pour les pollinisateurs : les produits ne peuvent être utilisés pendant les cinq jours avant la floraison, pendant la floraison et cinq jours après ou pendant la période de production d’exsudat, ni en présence d’adventices fleuries.
- L’usage sur les grandes cultures attractives pour les pollinisateurs, notamment celles présentant de très grandes surfaces (tournesol, colza,…) n’est pas autorisé.
- Par ailleurs, la substance active étant nouvelle, l’Agence met en place, dans le cadre de la phytopharmacogilance, une surveillance des signalements d’affaiblissements ou de pertes de colonies d’abeilles qui pourraient être rapportés en lien avec l’usage des produits à base de sulfoxaflor.
Le Closer (120 g/l de sulfoxalflor - SC) est homologué sur les fruits et légumes. Le Transform (500 g/kg de sulfoxaflor- WG) s’utilise sur les céréales à paille et le lin.
* Autorité européenne de sécurité des aliments
Stéphanie Ayrault et Eloi Pailloux