Sylvain Ducroquet, président du Staff - « La période, favorable aux semences de ferme, doit nous inciter à investir dans nos outils »
Le | Agrofournisseurs
En cette fin d'été, la campagne de vente de semences certifiées est compliquée. Les semenciers avancent, en céréales, un recul de - 10 à -20 % par rapport à l'an passé. A l'inverse, les semences de ferme ont la cote. Cette tendance est-elle uniquement liée au contexte économique tendu ou doit-on y voir un mouvement de fond, plus durable ? Sylvain Ducroquet, président du Staff, le syndicat des trieurs à façon français, nous livre son point de vue.
« Depuis plusieurs décennies, l'utilisation de plus ou moins de semences de ferme est directement liée au cours des céréales (1). Quand les prix sont bas, les agriculteurs cherchent à faire des économies : le curseur se déplace alors vers les semences de ferme, en moyenne 30 % moins cher qu'une semence certifiée. La bonne qualité de la récolte 2017 incite également certains clients à utiliser leurs propres semences. Mais depuis 2005, le mouvement s'accentue. Les trieurs ont massivement investi dans des outils plus performants, plus sécures et plus rapides. Chaque année, nous captons de nouveaux clients, avec de gros tonnages. Les agriculteurs n'hésitent plus à se regrouper pour faire appel à nous. Les facteurs « temps » et « qualité » du chantier ne sont plus des freins.
Une période de transition, floue, déstabilisante
La demande augmente fortement en blé, en escourgeon, en engrais verts et plus largement, en semences bio. Pour chaque espèce, la part des mélanges est, elle aussi, en forte progression. Près de 30 % des volumes travaillés sont aujourd'hui des mélanges. Le modèle agricole est en pleine évolution avec à la clé, la recherche de solutions plus économes, moins gourmandes en carbone et en phyto. Cette période de transition est, pour beaucoup, floue car déstabilisante avec une remise en cause totale des acquis. L'association de plusieurs variétés, le décalage des dates de semis, le recours à des solutions de biocontrôle, à des algues… autant de techniques qui animent les forums de discussion. A l'heure où certains produits phyto sont sur la sellette, les agriculteurs apprennent à faire sans les industriels. Nos clients échangent, testent. Et nous, trieurs, accompagnons ces évolutions. Si un agriculteur souhaite enrober ses semences avec une solution à base de vinaigre pour remplacer un fongicide, nous sommes équipés pour répondre à sa demande. Ce cycle, plutôt porteur pour les graines de ferme, doit nous inciter à continuer à investir pour rester dans la course. Les semenciers, eux, doivent réagir".
(1) D'après les chiffres du Gnis, le taux d'utilisation de semences certifiées était de 48 % en 2016, contre 50 % en 2015.