Tensions croissantes sur les cours des matières premières
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Les risques climatiques et géopolitiques font actuellement fortement remonter les cours des matières premières agricoles. Si les céréaliers s'en réjouissent, les fabricants d'aliments du bétail tirent la sonnette d'alarme. Analyse et commentaires.
Depuis quelques jours, les cours des céréales et oléoprotéagineux s'envolent et pourraient retrouver les niveaux historiques de 2012. Selon Sébastien Poncelet, consultant analyste chez Agritel, le principal facteur responsable de ces hausses est le « large retour sur les achats des fonds d'investissements ». Ces derniers seraient en effet motivés par les risques géopolitiques et climatiques qui pèsent actuellement sur les marchés agricoles. « Pour l'instant, les marchés montent sur la peur qu'il se passe quelque chose et non sur des faits. D'ici un mois, des faits avérés pourraient entraîner une situation plus durable de cette hausse des cours », analyse-t-il.
Côté politique, c'est avant tout l'Ukraine qui entraîne l'incertitude sur les marchés. L'instabilité chez ce deuxième exportateur mondial de grains fait craindre une pénurie de blé et de maïs. Si rien ne change actuellement dans les ports d'Ukraine et de Crimée, avec des bateaux toujours chargés de grains à destination des pays importateurs, les acheteurs internationaux seraient déjà réticents à aller chercher de nouveaux contrats en Ukraine. Des risques économiques sont également palpables dans ce pays qui pourrait manquer d'intrants pour mener à bien ses récoltes 2014.
Côté climat, si les conséquences sur les blés des vagues de froid nord-américaines se sont pas encore connues, c'est surtout la sécheresse que craignent plusieurs régions du monde productrices de céréales ou de soja. De l'Allemagne jusqu'en Russie et au Moyen-Orient, de vastes zones de consommation de blé manquent actuellement d'eau. En Australie, c'est le retour possible du phénomène cyclique El Niňo qui inquiète à un ou deux mois des semis de blé, avec là aussi un fort risque de réchauffement et de sécheresse. En Amérique du Sud, la production de soja pourrait aussi pâtir d'une météo défavorable.
Prix de revient des productions animales en jeu
« C'est l'ensemble des matières premières à destination de l'alimentation animale qui est directement impacté, sans réelle perspective de retournement dans les mois à venir, alerte alors Coop de France nutrition animale. Ces évolutions auront inévitablement des impacts sur les prix des aliments et par là même sur le prix de revient des productions animales ». Le secteur français de l'élevage craint donc une nouvelle perte de compétitivité face à cette flambée des cours. « Ces éléments de marché doivent impérativement être pris en compte lors des négociations commerciales sur les produits animaux », insiste donc Coop de France. « Alors qu'on espérait une régularisation et une accalmie en 2014, on ne s'en sort pas », réagit également Jean Dahirel, responsable des achats chez Le Gouessant (22).