Agrostratégie

Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente

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La météorologie complique les récoltes de maïs. Ces dernières progressent mais accusent un retard dû aux pluies importantes et aux semis tardifs. Les premiers résultats font état de rendements corrects voire bons, avec des maïs plus humides. Pour les collecteurs, le maïs reste une culture centrale, résiliente et économiquement intéressante pour les agriculteurs.

Crédit : Jean Weber - Inrae - © D.R.
Crédit : Jean Weber - Inrae - © D.R.

« En maïs fourrages, les premiers retours sont loin d’un scénario catastrophe », Pierre-Vincent Protin, responsable agronomique d’Agrial

Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.
Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.

« Nous avons procédé à la récolte de la moitié des maïs fourrages. En raison d’un cumul pluviométrique exceptionnel, marqué notamment par le passage de la dernière tempête Kirk, conjugué à des températures modérées en septembre et à des semis tardifs, parfois après le 1er juin, nous constatons un retard de huit à dix jours, ce qui ne constitue pas une situation alarmante. Cependant, pour les semis effectués après le 1er juin, ces retards peuvent atteindre quinze jours, voire davantage, avec des maïs récoltés, en tendance, plus humides. Les travaux de récolte progressent favorablement durant la semaine du 14 octobre, grâce à des conditions climatiques clémentes. Toutefois, des inquiétudes persistent dans certains départements, tels que la Loire-Atlantique, la Vendée, la Sarthe, la Touraine, et la Vienne, où certains champs de maïs demeurent inondés. Côté chiffres, nous ne disposons pas encore de données précises. Les premiers retours indiquent néanmoins des rendements allant de moyens à bons, loin des scénarios catastrophiques que nous redoutions initialement.

Concernant le maïs grain, la récolte vient tout juste de commencer, avec seulement 5 % des surfaces récoltées. Nous rentrons du maïs présentant un taux d’humidité avoisinant les 35 %.

Même au cours d’années difficiles, le maïs parvient à tirer son épingle du jeu et se révèle être une culture résiliente face aux aléas climatiques. Hormis quelques situations préoccupantes, les éleveurs devraient être en mesure de constituer leurs stocks. La situation de cette année nous rappelle l’importance de semer avant le 15 mai, dans la mesure du possible évidemment, sinon l’agriculteur s’expose à des risques accrus. Il est également essentiel de ne pas opérer de changements drastiques dans la précocité des variétés, car le climat reste imprévisible. Il faut garder la cohérence entre l’indice de la variété et les cumuls de températures atteints dans la région concernée. »

« 100 à 105 qx/ha de rendement moyen en maïs grain », Grégory Moulis, directeur productions végétales chez Maïsadour

Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.
Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.

« La période de semis a été perturbée par des épisodes de fortes précipitations, étalant les opérations de semis d’avril à juin. Par la suite, si les pluies régulières ont profité au développement du maïs, le déficit en chaleur a cependant retardé sa maturité. Nous récoltons actuellement des maïs affichant un taux d’humidité moyen de 29 %, alors que celui-ci est habituellement compris entre 24 et 26 %. À ce jour, 25 % des surfaces ont été récoltées, contre les deux tiers en temps normal.

En ce qui concerne les rendements, les maïs non irrigués se distinguent positivement, tandis que ceux irrigués montrent des performances légèrement plus modestes que la moyenne quinquennale. Les rendements moyens sur notre territoire cette année s’établissent autour de 100 à 105 qx/ha, contre 95 qx/ha en moyenne les autres années. Jusqu’à présent, nous n’avons pas constaté de problèmes de qualité, mais il convient de rester vigilant sur cet aspect.

Depuis trois ans, nous avons instauré une politique tarifaire unique pour un plateau d’humidité compris entre 22 et 32 %, dans le but d’encourager les producteurs à récolter le maïs au plus tôt et de ne pas attendre qu’il sèche sur pied. Ainsi, les taux élevés d’humidité n’ont pas d’incidence directe sur leurs coûts. La différence de charge est absorbée à notre niveau, avec un surcoût de 3 à 4 euros pour un maïs récolté à 29 % d’humidité contre 24 %. De plus, la durée de séchage a été doublée en raison des humidités de réception, ce qui risque de créer un engorgement et d’avoir des répercussions sur le processus de collecte.

La suite de la campagne dépendra des conditions météorologiques. Bien qu’étant une plante robuste, nous redoutons de fortes précipitations et des tempêtes qui pourraient affecter négativement les rendements du maïs. Nous anticipons une collecte qui pourrait se prolonger jusqu’à la mi-décembre.

Malgré tout, il est à noter que la rentabilité de la culture du maïs reste satisfaisante, et que cette culture conserve pleinement sa place dans les rotations culturales. »

« Nous avons récolté 3 % des maïs », André Streitcher, directeur céréales chez Armbruster

« Nous avons récolté 3 % des maïs, c’est très faible, nous avons démarré le 14 octobre. Habituellement, nous démarrons plutôt à la fin du mois de septembre. Nous sommes très en retard par rapport à d’habitude. Et cela ne va pas s’arranger avec la météorologie annoncée ces prochains jours. »

« La collecte est compliquée, seulement 20 % des maïs sont rentrés  », Franck Camet-Lassalle de la direction des marchés chez Euralis

Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.
Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.

« La collecte d’automne, c’est à peu près 550 000 tonnes en prévision cette année. Sur ces 550 000 tonnes, le maïs représente 500 000 tonnes.

Ce qu’il y a de remarquable cette année, c’est qu’on retrouve les surfaces de maïs. Elles étaient en baisse depuis 20 ans et là, du fait d’aspects conjoncturels, nous avons davantage de surfaces. De la sole de la campagne 2024 a été libérée par l’impossibilité qu’ont eue nos agriculteurs à semer des céréales à paille. En superficie, nous sommes à peu près sur 60 000 hectares de maïs, sachant qu’il y en a une partie qui part en ensilage pour les élevages.

Nous avons eu des implantations de semis assez compliquées, perturbées principalement par la pluie. Les semis, qui se déroulent habituellement en avril, se sont étalés cette année (en fonction des régions) en mai, en juin, voire un peu sur le mois de juillet.

Nous avons eu des conditions de culture relativement satisfaisantes. Il a fait chaud et sec en juillet, mais il y avait suffisamment de réserve hydrique dans les sols grâce aux pluies du mois de juin. Sur le mois d’août, il a fait relativement chaud, mais avec des pluies régulières. Nous nous sommes retrouvés avec des ratios de maïs supérieurs à 75 %, c’est-à-dire des rendements très bons.

Mais le climat s’est un peu dégradé depuis le mois de septembre. Du 1ᵉʳ septembre au 15 octobre, il a plu 270 mm. Surtout, il a plu un jour sur deux : 17 jours sur 30 en septembre, sept jours sur 15 lors de la première moitié d’octobre. Quand nous prévoyions de très bons rendements, nous le faisions par rapport à l’état des cultures et aux conditions tendancielles, à savoir des mois de septembre et octobre chauds et secs, qui font que nos cultures arrivent à maturité. Là, ce n’est pas du tout le cas.

Aujourd’hui, nous sommes dans la difficulté pour organiser la récolte de nos adhérents et seuls 20 % des maïs sont rentrés. L’année dernière, à cette période, nous étions à 90 %.

En début de semaine (lundi 14, mardi 15 et mercredi 16 octobre), nous avons fait trois journées à 15 000 tonnes rentrées quotidiennement. Mais de nouveau, ce sont 100 mm de pluie qui sont attendus entre aujourd’hui et demain (jeudi 17 et vendredi 18 octobre) et qui me rendent pessimiste et inquiet par rapport au reste à collecter. La semaine prochaine (du lundi 21 au dimanche 27 octobre), nous devrions normalement monter sur des journées à 20 000 tonnes par jour, rendant la collecte pénible.

Cette année, nous allons retrouver des risques sur des mycotoxines, les fumonisines et les déoxynivalénols.

Nous avions observé, en 2013, des phénomènes de lessivage de l’amidon des grains, dégradant les PS et les rendements. C’est un peu ce qui est en train de se passer en ce moment.

Nous étions sur des estimations hautes de PS à 330-350 et là, nous serions plutôt sur des petits 330. Sur les hauts potentiels, sur des agriculteurs qui avaient fait l’année dernière 160-165 quintaux, aujourd’hui ils sont à 140 quintaux/ha. Cela reste excellent mais décevant par rapport au potentiel qui avait été noté sur le mois d’août. Cette année, nous étions partis sur un rendement satisfaisant puisqu’on parlait de 105 qx/ha. Nous sommes peut-être en train de baisser et d’altérer ce potentiel. »

« La moisson n’est pas vraiment démarrée dans l’Est, puisqu’il pleut quasiment tous les jours » Pierre-Antoine Ferru à la CAL

Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.
Récolte de maïs, une campagne retardée mais résiliente - © D.R.

« La récolte de maïs grains à la CAL se situe généralement autour de 10 000 tonnes sec dans des années plutôt sèches. Dans des années humides, nous pouvons collecter le double, voire le triple. Aujourd’hui, la moisson n’est pas vraiment démarrée dans l’Est, puisqu’il pleut quasiment tous les jours. Il y a 15 jours, l’intelligence artificielle et Agreste nous annonçaient des rendements classiques, voire en deçà. Aujourd’hui, nous avons des premiers échos qui situent les rendements entre 70 et 110 qx/ha, avec une moyenne autour de 85. Cela confirme la tendance nationale où nous serions sur des rendements élevés. Vu les conditions météorologiques de cette année, le taux d’humidité du maïs collecté sera important. »