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M2i annonce une homologation de phéromones pour grandes cultures en Zambie

Le | Protection des cultures

M2i Group a obtenu une homologation en Zambie, le 10 octobre 2024, pour diffuser une solution de phéromones pulvérisables applicable aux grandes cultures. Une première selon la société. Ce produit, le Frugiperda Prospray, est pulvérisable sur les cultures de maïs et sert à lutter contre la chenille légionnaire d’automne, insecte ravageur originaire d’Amérique du Nord qui s’est propagé jusqu’en Afrique. Johann Fournil, directeur des partenariats chez M2i Group, répond aux questions de Référence agro.

Johann Fournil, directeur des partenariats chez M2i Group. - © D.R.
Johann Fournil, directeur des partenariats chez M2i Group. - © D.R.

En quoi consiste l’usage des phéromones en biocontrôle ?

Ce sont des odeurs d’insectes que nous reproduisons en laboratoire de manière biomimétique. Nous synthétisons ces molécules, qui sont des odeurs. C’est une chimie relativement complexe et innovante, du même niveau de complexité que la filière pharmaceutique. Nos produits sont ensuite formulés pour que leur diffusion soit homogène et efficace le plus longtemps possible, sur plusieurs semaines ou plusieurs mois.

La confusion sexuelle est le principal mode de fonctionnement des phéromones en agriculture. Il s’agit de déposer la phéromone sexuelle de l’insecte qui normalement permet à la femelle d’attirer le mâle pour l’accouplement. Cette phéromone va désorienter les mâles qui seront dans l’incapacité de localiser des femelles pour s’accoupler. Nos produits sont des leurres. Nous leurrons les ravageurs pour les empêcher de s’accoupler, de proliférer et donc de causer des dégâts. Cette mécanique simple à comprendre est redoutable car elle empêche jusqu’à 90 % de la reproduction de l’insecte ravageur ciblé.

Vous indiqué que c’est un produit homologué pour la première fois pour les grandes cultures. Comment s’applique cette biosolution ?

Notre démarche de confusion sexuelle existe en vigne ou en verger où nous commercialisons une gamme gel avec le Groupe Bayer et une gamme spray avec Syngenta, mais elle était complexe à décliner, à des coûts et des niveaux de performance ainsi que de simplicité d’application à des grandes cultures. Nous avons travaillé pour fabriquer, dans nos laboratoires du sud de la France, la molécule au meilleur coût et pour formuler des solutions biodégradables et pulvérisables, afin que ce principe de confusion sexuelle, au fonctionnement efficace, puisse être mis en application sur des grandes cultures.

Nous avons développé des solutions pulvérisables pour les vignes et vergers et nous avons décidé de nous attaquer au marché des grandes cultures, le plus important en surface et où il n’y avait pas de concurrence dans le champ des phéromones, car aucun acteur n’avait de technologie satisfaisante pour les appliquer dans ce contexte.

Nous avons choisi comme première cible la chenille légionnaire d’automne, principal ravageur mondial du maïs. C’est un insecte originaire d’Amérique du Nord, qui s’est propagé en Amérique du Sud, puis en Asie et en Afrique. C’est un ravageur redoutable, capable d’entraîner des pertes considérables sur le maïs, mais également le soja, et les cultures maraîchères. Ce ravageur a par exemple entièrement anéanti, fin août des cultures vivrières de maïs des îles des Philippines. Elles ont été détruites, comme frappées par la foudre ou par une averse de grêle. Il ne restait plus rien.

Il n’existe pas de solution biologique satisfaisante pour s’en protéger, et les solutions chimiques sont défaillantes dans la mesure où elles sont peu nombreuses et surutilisées avec le développement rapide de résistance des insectes. Il était nécessaire de venir apporter des nouvelles solutions sur lesquelles il n’y a pas de développement de résistance, comme nos phéromones.

Notre produit est aujourd’hui homologué en Zambie et l’homologation est attendue pour l’Argentine, le Brésil et l’Afrique du Sud d’ici à la fin de l’année 2024.

Prévoyez-vous d’autres produits de biocontrôles applicables aux grandes cultures ?

Bien entendu, nous travaillons également sur le coton, et sur le riz en Asie, dont le Vietnam et l’Indonésie. Au-delà de nos travaux d’homologation en Asie, nous avons également un projet qui se monte avec le centre français du riz en Camargue, où se situe notre usine. Nous élaborons un programme de développement du biocontrôle pour la protection de la riziculture camarguaise.

En France, nous avons aussi une solution qui concerne les cultures betteravières : le Bene pro spray. Ce n’est pas du même ressort technologique, il s’agit d’une solution un peu différente. C’est une solution pulvérisable, mais ce n’est pas une phéromone de l’insecte ravageur, mais c’est une solution qui permet de doter les betteraviers français d’une alternative solide à l’absence des néonicotinoïdes.

Nous avons construit notre réflexion dans le cadre d’un programme de recherche mené avec l’Institut Technique de la Betterave (ITB). Le principe de notre produit est d’attirer massivement les prédateurs naturels des pucerons sur les parcelles de betteraves. Il s’agit d’un booster de biodiversité qui va permettre d’améliorer considérablement l’efficacité des traitements, que ce soit des traitements bios ou des traitements insecticides, ça va doubler en gros l’efficacité des solutions qui sont déjà utilisées.

Ce produit est déjà disponible sur le marché et produit de manière industrielle. En 2024, nous avons traité plusieurs centaines d’hectares dans le cadre de la première année de lancement du produit. En 2025, nous allons considérablement accroître les surfaces traitées avec ce produit et étendre sa commercialisation hors France dans d’autres pays européens (Belgique, Espagne, etc.).