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Agroécologie, un coût d’opportunité non négligeable en grandes cultures

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Le Centre d’études et de prospective s’est intéressé aux liens entre performances économique et environnementale en grandes cultures, dans une note publiée le 9 décembre. Les résultats en retrait, pour les exploitations les plus vertueuses, s’expliqueraient essentiellement par une production moindre, que la baisse des charges en intrants ne compenserait pas sur le plan économique.

Agroécologie, un coût d’opportunité non négligeable en grandes cultures
Agroécologie, un coût d’opportunité non négligeable en grandes cultures

Les exploitations en grandes cultures ayant les meilleures performances environnementales ont-elles d’aussi bonnes performances économiques que les autres ? C’est à cette question que s’est intéressé le Centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture, dans une note diffusée le 9 décembre. Si de nombreux travaux portent déjà sur le lien entre ces deux performances, « rares sont ceux prenant en compte la performance environnementale globale* et qui explorent ce lien en comparant les exploitations “'toutes choses égales par ailleurs'” », assurent les auteurs de la note. Cette dernière aborde ainsi également l’éventuel « coût d’opportunité » associé à l’adoption de pratiques plus vertueuses, et évalue si celui-ci est compensé par les politiques publiques ou une meilleure valorisation des productions.

Un chiffre d’affaires moyen en recul de 23 %

Agroécologie, un coût d’opportunité non négligeable en grandes cultures - © D.R.
Agroécologie, un coût d’opportunité non négligeable en grandes cultures - © D.R.

Premier constat : les exploitations les plus performantes sur le plan environnemental affichent un revenu inférieur. « Il ressort que les exploitations à forte ou très forte performance environnementale auraient un excédent brut d’exploitation (EBE) inférieur de 13 000 € (16 %) à celles en ayant une faible ou très faible », indique la note. Le chiffre d’affaires moyen des exploitations à forte et très forte performance environnementale (168 000 €) subirait, quant à lui, une baisse de 51 000 €, soit 23 % en moyenne. Le prix de vente devrait donc, à rendement inchangé, être augmenté de 30 % pour rattraper ce décalage, assurent les auteurs. « Des analyses complémentaires suggèrent que ces pertes de chiffre d’affaires seraient moins importantes pour les exploitations spécialisées en céréales, oléo-protéagineux et protéagineux (COP) que pour les exploitations spécialisées dans d’autres grandes cultures (ex. plantes sarclées), pour lesquelles la baisse de chiffre d’affaires serait de 33 % », souligne le document.

Les charges intrants moins importantes ne suffisent pas à contrebalancer

Pour les auteurs du document, cette baisse de revenu s’expliquerait en premier lieu par la production moins importante de ces exploitations. La note insiste également sur le fait que les charges en intrants inférieures ne permettent pas de compenser la perte de chiffre d’affaires. Néanmoins, « contrairement à ce qui est parfois avancé, le gain économique lié à la réduction d’usage de produits phytosanitaires et d’engrais ne serait pas annulé par une hausse des charges en énergie liée à une mécanisation plus importante ». Enfin, les auteurs indiquent que les exploitations reçoivent des niveaux de subventions équivalents, indépendamment de leur performance environnementale. « Les montants des MAEC ciblant les systèmes de grandes cultures sont de 100 à 130 €/ha, alors que la différence de valeur ajoutée observée est plus élevée (185 €/ha sans prendre en compte les coûts de formation, les coûts de la transition, etc.) », explique le Centre d’études et de prospectives, qui plaide pour des « subventions mieux calibrées et mieux ciblées », ou le développement de démarches et labels, publics et privés.

Une double performance pas impossible mais encore rare

« L’amélioration des performances environnementales n’irait pas de pair avec des bénéfices économiques, à tout le moins en grandes cultures. Adopter des pratiques favorables à l’environnement représenterait donc un coût d’opportunité non négligeable pour les exploitants de grandes cultures », suggèrent en conclusion les auteurs, qui insistent sur le fait que leurs travaux « ne montrent aucune impossibilité, pour une exploitation, d’être doublement performante », bien que les exemples restent minoritaires.

* La performance environnementale des exploitations a été évalué à partir de dix indicateurs : part des surfaces peu productives dans la SAU, part des prairies dans la SAU, part des plantes protéiques dans les terres arables, indice de diversité des cultures prenant en compte la surface mobilisée par les composantes de l’assolement, part des surfaces irriguées dans la SAU, taille moyenne des parcelles de terres arables, forme moyenne des parcelles de erres arables, charges en engrais par hectare de surface productive, charges en produits phytosanitaires par hectare de surface productive, charges en énergies directes rapportées à la valeur de la production de l’exercice.