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Ecophyto Recherche : une démarche intégrée et une refonte de la gouvernance

Le | Agrofournisseurs

Alors que la V2 du plan Ecophyto devrait sortir après les élections régionales, le colloque Recherche Ecophyto, qui s’est tenu à Paris les 13 et 14 octobre 2015, a rassemblé scientifiques, conseillers, professionnels agricoles et institutions… Analyse et focus. Pour Nathalie Therre, adjointe à la sous-direction de la qualité et de la protection des végétaux au ministère de l’Agriculture, si les résultats sur le terrain en termes de réduction des utilisations sont bien en deçà des objectifs fixés, le réseau des fermes Dephy est une réussite. Plusieurs projets de recherche sont aussi porteurs de perspectives encourageantes. A l’instar d’Ecoviti sur la création de partenariats autour de l’éco-victiculture, Plage recensant les outils de diagnostiques des exploitations, ou encore Mic-Mac Design sur la modélisation de systèmes de culture à bas intrants. Une recherche segmentée Un constat toutefois : « la recherche sur la protection intégrée reste très segmentée, tant entre les disciplines qu’entre les Etats européens », déplore Antoine Messean, directeur de l’unité impacts écologiques des innovations en production végétale de l’Inra de Grignon. C’est pourquoi Dominique Potier, député de Meurthe-et-Moselle, a appelé à une « défragmentation de la recherche et à l’adoption d’une démarche globale. » Revenant sur les points essentiels de son rapport « Pesticides et agro-écologie, les champs du possible », présenté en janvier 2015, il insiste sur le besoin de mettre en place des projets de recherche sur dix ans, associant partenaires privés, publics et interdisciplinaires. Ce changement passe par une refonte de la gouvernance de l’axe recherche Ecophyto. Cyril Kao, sous-directeur de la DGER (Direction générale de l’enseignement et de la recherche), s’est dit « dans les starting-blocks » pour engager cette réforme. La recherche européenne : force de proposition sur la réglementation Dominique Potier attend de la part des structures de recherche qu’elles contribuent à l’harmonisation de la réglementation européenne, ainsi qu’à une définition commune à plusieurs niveaux de la protection intégrée. Cette définition est nécessaire pour créer ensuite des systèmes intermédiaires entre l’agriculture biologique et le conventionnel, et leur donner une valeur réglementaire. Objectif : requalifier les niveaux d’aide et voir émerger par la suite des marchés différenciés des produits agro-alimentaires.

  • Biocontrôle : passer de la protection des cultures à la combinaison de solutions
Le biocontrôle doit s’inscrire dans une approche globale de la protection. Ce point a été soulevé par les participants de la table ronde « quelle place pour le biocontrôle dans un stratégie de protection intégrée. » La montée en puissance de ces produits implique de les proposer à un prix acceptable et qu’ils soient efficaces. « Ces solutions ne doivent pas ajouter des contraintes pour l’agriculteur, la logistique et la formations sont à encore travailler et le portefeuille, actuellement insuffisant, doit se développer », a résumé Marie-Claire Grosjean-Cournoyer de Bayer. Le déficit de solutions est aussi souligné par Gérard Thomas de Syngenta : « Pour couvrir le marché avec une offre conséquente, plusieurs milliers de solutions sont à étudier avec un investissement sur le long terme. Cet engagement pour une société implique d’avoir une vision claire de l’agriculture de demain pour l’Europe, avec un cadre réglementaire pour ces produits. » Pour Frédéric Favrot de Koppert  : « Nous sommes aux prémices du biocontrôle, même s’il existe des solutions qui fonctionnent depuis de nombreuses années, comme celles pour lutter contre le carpocapse ou le recours aux macro-organismes dans les cultures sous abris. » En plein champ, et notamment en grandes cultures, la mise en application du biocontrôle est plus complexe. La solution serait de passer de la protection à la gestion de combinaisons par exemple de plusieurs organismes et produits chimiques. L’expertise technique reste complexe à diffuser auprès des agriculteurs. « Dans les trois ans, nous aurons des produits plus simples, indique Frédéric Favrot, mais cela passera de toute façon par la formation. » Certains segments semblent plus difficiles à conquérir. « Sur les maladies du blé, comme la septoriose, les fongicides constituent le levier le plus efficace, l’intérêt est du côté de l'agriculture de précision  », a souligné David Gouache d’Arvalis. A.D.
  • La pulvérisation intelligente
Bien répartir le produit sur l’ensemble de la feuille mais aussi ajuster la dose en fonction du stade végétatif constituent des leviers importants pour optimiser l’utilisation des produits phytosanitaires. Dans ce cadre, le projet EcoSprayviti, piloté par l’Institut de la vigne (IFV), a montré une perte de produit quatre fois plus grande en début de cycle végétatif par rapport à la fin. La nécessité de revoir les doses d’homologation, comme c’est le cas en Allemagne, est une des voies de progression. Un matériel de pulvérisation performant, avec un classement dans le même esprit que l’électroménager est aussi à l’étude. La base de données est en construction, et la moitié des notations serait effectuée. Autre piste : créer des machines intelligentes qui vont au-delà des coupures de tronçon. Selon le développement de la culture, l’infestation, elles adapteront la pulvérisation. A.D.
  • Diagnostic des exploitations : une plateforme d’outils
Face au foisonnement de méthodes de diagnostic de durabilité des exploitations, difficile de savoir quoi choisir pour évaluer ses pratiques. Les chercheurs du projet Plage, porté par Agri-Transfert ressources et territoires, ont recensé ces outils, validé leur rigueur scientifique et les ont classés en cinq catégories selon leur finalité. La plateforme www.plage-evaluation.fr regroupe des fiches descriptives de chaque méthode, des témoignag

es et dossiers d’expertise. L’utilisateur définit ses attentes et se voit proposer une gamme d’outils de diagnostic adaptés. La plateforme Plage se veut aussi être un support de formation pour initier les étudiants à l’évaluation de la durabilité. Alexandre Morin, chercheur à Agro-Transfert Ressources et Territoires, envisage d’intégrer d’ici à cinq ans les productions pérennes comme la vigne ou l’élevage dans cette gamme d’indicateurs.