Tendance insecticides maïs, la filière bio cherche la bonne place pour le spinosad
Le | Agrofournisseurs
Homologué sur une large palette de cultures, le spinosad, insecticide d’origine naturel, a été récemment pointé du doigt pour son impact sur les pollinisateurs dans l’émission Cash Investigation. Indépendamment des polémiques, la recherche d’alternatives est enclenchée sur le terrain. Focus sur les pratiques en vigueur dans la filières maïs bio.
Quand l’émission Cash Investigation s’intéresse à l’agriculture, le secteur se demande à quelle sauce il va être mangé. Le 5 juin , les solutions naturelles utilisées en bio étaient au programme. Le spinosad, qui jouit de la réputation peu flatteuse de « tueur d’abeilles », a été particulièrement pointé du doigt.
Volumes mineurs mais enjeux importants en maïs bio
Ce numéro de Cash investigation n’a globalement pas pulvérisé l’audimat, et donc guerre défrayé la chronique. Sur le terrain, on en reste pas moins attentif à ce qui touche à cette substance active. Y compris sur l’une des « petites » filières pour laquelle il est autorisé : le maïs bio. « L’essentiel de notre appro en spinosad est dédié au maïs doux bio, soit en tout 70 hectares », confirme Gilles Sembre, responsable filières biologiques chez Vivadour. Une surface stable dans le temps. Pas de quoi faire des stocks : Vivadour commande les produits sur demande des adhérents. Entre « peu de spinosad » et « pas de spinosad », il y a toutefois de la marge. « Cette production est contractualisée avec Bonduelle, qui est attentif à de possibles alternatives, mais à cette heure, le cahier des charges incite à réaliser un passage », précise Gilles Sembre.
« Nous sommes fiers de dire que nous sommes dans l’anticipation. Les signaux autour du spinosad nous ont incité à ouvrir le dossier il y a quatre ans. Nous ne voulons pas être pris au dépourvu si la substance devait être interdite. Depuis deux ans, nous en sommes au stade d’expérimentations pour trouver des alternatives satisfaisantes. Nous avons été retenus dans le cadre d’un appel à projets Ecophyto, sur le premier trimestre 2023. »
Philippe Camburet,
président de la Fnab
Les alternatives au spinosad gagnent du terrain
Chez Val de Gascogne, les surfaces en maïs bio oscillent entre 200 et 300 hectares. Sur ce total, une cinquantaine serait protégée grâce au spinosad. Un marché modeste qui n’empêche pas la coopérative à s’intéresser aux enjeux liés à la substance active. « Les alternatives gagnent du terrain, en conventionnel comme en bio », comment Jean-Philippe Weber, responsable des filière bio.
Pour la protection de la graine lors du semis face au ver gris ou au taupin, « l’efficacité de Success GR, à base de spinosad, est correcte si la pression est faible à moyenne », note Jean-Philippe Weber. Val de Gascogne est attentive aux expérimentations consistant à implanter de l’orge en inter-rang pour créer une diversion vis à vis des taupins sont en cours. Le semis tardif et les perturbations créées par le désherbage mécanique ont également une action contrariant le ravageur. Le spinosad entre également dans la formulation de Success 4, visant la protection contre les pyrales et chenilles phytophage. « C’est le dernier recours, et il est loin d’être systématique, détaille Jean-Philippe Weber. En conventionnel comme en bio, les trichogrammes sont privilégiés, ainsi que le choix de variétés précoces. »
Dans les silos aussi, des alternatives
Autre usage possible pour le spinosad : la lutte contre les ravageurs dans les silos. Chez Agro D’Oc, le responsable R&D Sylvain Hypolite explique si les tests de la substance active dans la ligne de semis « ne s’est pas révélé complètement convaincant », elle demeure un recours pour le stockage… sans être systématique. « Le froid, le vide, la terre de diatomée permettent de gérer la problématique du stockage en bio », précise-t-il. Jean-Philippe Weber enfonce le clou : « Pour le stockage des grains à destination de la consommation humaine, les cahiers des charges proscrivent cette molécule. Même pour le débouché alimentation animale, nous ne l’utilisons pas. »
Corteva privilégie une communication transversale
Interrogé par Référence agro, Corteva ne dispose pas de chiffre concernant l’utilisation de spinosad par culture, et n’a pas souhaité communiquer sur une tendance des ventes totales, à la hausse ou à la baisse. Même si elle reconnaît des enjeux plus prégnants en fruits et légumes pour sa substance active, l’entreprise porte une communication globale. Séverine Jeanneau, responsable filières et développement durable, rappelle « qu’avec l’évolution climatique, la diversité et la présence des ravageurs augmentent ». Selon elle, chaque produit disponible sur le marché a donc son utilité, accentuée par la nécessité de gérer les résistances, et la compatibilité du spinosad avec l’AB est offre un outil précieux pour les agriculteurs convertis. « Nous sommes conscients des idées reçues concernant la substance vis-à-vis des pollinisateurs, ajoute Séverine Jeanneau. Pour aller plus loin que de simples informations réglementaires, le spinosad est intégré dans notre démarche
, qui vise une utilisation optimale de nos solutions, afin d’aider les agriculteurs travaillant sous cahier des charges. »