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« La France peut jouer un rôle de pilote », Vincent Gros, président monde de BASF Agricultural Solutions

Le | Agrofournisseurs

Référence environnement : L’Europe est particulièrement contraignante en matière de réglementation, notamment sur les produits phytosanitaires, et la France prend souvent les devants. Comment voyez-vous l’avenir de l’agriculture dans cette région du monde ?

Vincent Gros : L’Europe se prive d’outils technologiques et l’écart se creuse, surtout avec le continent américain. Certaines de nos innovations seront lancées ailleurs qu’en Europe. L’agriculture doit faire face à de nombreux défis, notamment celui de nourrir neuf milliards d’individus. Il faut donc produire. Si je veux être cynique, je dirais que si nous ne produisons pas en France, nous produirons ailleurs. Mais je refuse de voir l’agriculture française perdre sa compétitivité mondiale. Nous sommes engagés pour que la France conserve une agriculture performante.

R. E. : Justement, comment la France peut-elle conserver une agriculture performante ?

V. G. : Je n’ai pas la solution. Mais l’innovation fera partie de la solution, c’est incontestable. Le virage de l’agroécologie est un virage nécessaire. Mais en France, comme en Europe, les dirigeants doivent dégager une vision claire de ce qu’ils souhaitent faire pour leur agriculture. Car nous avons besoin de visibilité pour sécuriser nos investissements. Pour développer une molécule comme notre substance fongicide Revysol, qui se montre efficace et présente un profil toxique et écotoxique favorable, nous avons besoin de dix ans de recherche et de 250 millions d’euros.

R. E. : Quelles innovations est à même d’apporter BASF ?

V. G. : L’innovation est la raison d’être de BASF ; nous avons le pipeline le plus fourni. Ces innovations portent tant sur les produits phytosanitaires que sur les semences, avec les blés hybrides notamment, et sur l’agriculture digitale. Avec la reprise des activités de Bayer, en semences et en outils numériques, nous ne sommes plus une société de protection des plantes, mais une société en capacité d’offrir des solutions combinées pour plus d’efficacité et de durabilité. Nous développons par ailleurs de nombreux partenariats dans de multiples domaines, comme par exemple la pulvérisation intelligente : demain, les traitements herbicides ne seront appliqués que sur les adventices.

Les attentes sur les solutions alternatives sont beaucoup plus fortes en Europe de l’Ouest qu’ailleurs. Dans ce domaine, la France peut jouer un rôle de pilote. Pour BASF, la France n’est pas considérée comme un pays à part mais comme une anticipation de ce qui pourrait se passer dans d’autres régions du monde. Nous devons cependant rester pragmatiques et combiner l’ensemble des solutions dont nous disposons, sans en exclure.

R. E. : Quels moyens mettre en œuvre pour venir à bout de cette méfiance vis-à-vis de la science ?

V. G. : Cette méfiance est préoccupante. Nous devons recréer les conditions d’un débat constructif et équilibré entre les différentes parties prenantes. L’industrie doit faire preuve d’encore plus de transparence et présenter ses innovations de manière audible, compréhensible par le plus grand nombre. Nous devons également développer des démarches de progrès qui vont au-delà du cadre réglementaire. Les outils numériques vont nous y aider.