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Produits phytosanitaires, Bayer révolutionne sa recherche grâce à l’intelligence artificielle

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Bayer a totalement révisé, ces dernières années, son approche de recherche de nouvelles molécules phytosanitaires. La société travaille, notamment grâce au virtuel, sur des substances actives aux modes d’actions innovants de façon à améliorer encore l’efficacité, la sécurité et la durabilité des solutions proposées aux agriculteurs. Une première molécule herbicide de cette nouvelle génération est attendue pour 2028. Explications avec Rachel Rama, responsable au niveau international de la recherche de Bayer Crop Science pour les produits de protection des cultures et basée à Lyon.

Produits phytosanitaires, Bayer révolutionne sa recherche grâce à l’intelligence artificielle
Produits phytosanitaires, Bayer révolutionne sa recherche grâce à l’intelligence artificielle

« Les avancées en sciences des données, en intelligence artificielle, en connaissances fines en matière de biologie et de biochimie… nous ont permis de réviser totalement notre recherche et développement relative aux nouvelles molécules phytosanitaires », explique Rachel Rama, responsable au niveau international de la recherche de Bayer Crop Science pour les produits de protection des cultures, basée à Lyon.

Avec ces nouveaux moyens, Bayer a orienté ces dernières années sa recherche vers des molécules efficaces et durables, présentant des profils toxicologique et écotoxicologique encore plus favorables. « La recherche de nouveaux modes d’action est notre priorité », informe la responsable.

La mise en marché d’une substance active herbicide antigraminées de post-levée de cette nouvelle génération est attendue pour 2028. « Sur ce segment, il n’y a pas eu de nouveau mode d’action depuis trente ans », précise Rachel Rama. Les insecticides et fongicides ne sont pas en reste. Une autre molécule devrait être dévoilée en juin, pour une mise sur le marché espérée en 2033.

Le virtuel au service de la recherche

« La chimie fera toujours partie des solutions de protection des cultures, en combinaison avec les semences, le digital et les biosolutions, reprend la responsable. Mais nous devons la faire évoluer pour qu’elle permette d’accompagner les agriculteurs dans la transition agroécologique tout en répondant aux besoins alimentaires. »

Auparavant, Bayer criblait en moyenne 100 000 molécules par an pour en trouver une efficace. La découverte de substances actives efficaces et durables passe désormais par une recherche plus ciblée grâce au virtuel. Les essais toxicologiques et écotoxicologiques sont notamment modélisés.

« Aujourd’hui, nous commençons par définir le profil que nous souhaitons obtenir, puis nous regardons, de manière virtuelle, grâce à l’intelligence artificielle, si une molécule est compatible avec celui-ci, explique Rachel Rama. Beaucoup d’informations génomiques des organismes menaçant les cultures sont désormais disponibles et permettent la modélisation de la structure 3D des protéines associées qui seront ciblées par les molécules. Enfin, grâce à l’intelligence artificielle, nous avons accès à des milliards de molécules chimiques et pouvons gérer des profils multidimensionnels. Tous les horizons sont ouverts : l’intelligence artificielle nous dirige vers la molécule idéale, spécifique de l’organisme ciblé. Le temps où il fallait produire une protéine et l’avoir physiquement pour l’évaluer est révolu. »

L’innovation ouverte que prône Bayer depuis plusieurs années devient indispensable : la société a notamment recours à des librairies de molécules virtuelles issues d’entreprises externes.

De nouveaux modes d’action durables

Les profils définis cherchent à tout anticiper, l’efficacité, la durabilité, les résistances, la compatibilité avec certaines formulations…, grâce à une matrice complexe. Cette anticipation est indispensable pour ne pas perdre de temps puisque douze à quinze ans sont nécessaires pour mettre en marché une molécule.

Bayer travaille entre autres sur des voies métaboliques spécifiques des pathogènes afin d’éviter des effets sur des organismes non ciblés et obtenir ainsi des profils toxicologique et écotoxicologique favorables. Avec Oerth Bio, la société cherche des molécules qui dégradent et non plus inhibent les voies métaboliques chez les pathogènes. Ce principe d’action devrait, par hypothèse, se montrer efficace dans la durée et nécessiter de plus faibles doses de produits.

L’entreprise ambitionne par ailleurs de ne pas limiter la durabilité aux seules molécules, mais de l’étendre à tout le processus de production.

« Reste désormais à expliquer à tous que la chimie fait partie des solutions durables », conclut Rachel Rama. Bayer s’y emploie déjà, avec notamment l’ouverture de son centre de recherche et développement à des publics très divers, et compte poursuivre ses actions en la matière.