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Assises du commerce équitable, des ventes en hausse mais beaucoup d’interrogations

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En 2018, le commerce équitable origine France a représenté 434 millions d’euros de vente, selon les chiffres publiés le 22 novembre lors des assises du Commerce équitable à Paris. Des ventes en hausse de 34 % par rapport à 2017 et qui ont triplé depuis 2016. Il faut dire que la notion de commerce équitable Nord-Nord a été inscrite dans la loi récemment, en 2015. Elle définit ce qu’est le commerce équitable, avec ses six engagements :

  • les producteurs doivent être organisés collectivement ;
  • l’acheteur s’engage pour une durée minimale de trois ans, avec un prix rémunérateur établi selon les coûts de production et issu d’une négociation équilibrée ;
  • un montant supplémentaire doit financer des fonds collectifs ;
  • la traçabilité sur la filière et la transparence pour le consommateur est obligatoire ;
  • un volet d’éducation du consommateur doit être intégré à la démarche.

« La France est le seul pays à avoir légiférer sur le commerce équitable », se félicite Julie Stohl, déléguée générale de Commerce équitable France, CEF.

Des ventes en hausse d’un tiers sur un an

Le commerce équitable est apposé sur 1400 références, dont 53 % en boulangerie et 17 % pour les fruits et légumes frais. La distribution est réalisée à 44 % dans les boulangeries, notamment par le biais des boulangeries artisanales Agri-Éthique, 41 % dans les boutiques bio, 14 % en GMS et 1 % en consommation hors foyer. 47 % des produits ont la double labellisation bio et équitable. 65 groupements de producteurs sont engagés : ils concernent plus de 8000 agriculteurs. « En 2019/20, nous accueillons douze nouveaux groupements », explique Julie Maisonhaute, déléguée générale adjointe de CEF.

Équitable, un terme peu connu et désormais protégé

Derrière ce tableau chiffré très positif, de nombreuses questions se posent aux acteurs de cette filière pour pérenniser son développement. « Nous nous sommes rendus compte que les consommateurs connaissent mal le terme « équitable » car les labels l’utilisaient peu», indique Julie Stoll, déléguée générale de CEF. Du coup, les labels membres de CEF (Fair for life, Bio Partenaire, Agri-Éthique France) ont évolué : le mot « équitable » apparaît désormais sur leur logo.

« Nous avons également réussi à protéger ce terme dans la loi Pacte de 2019, ajoute Julie Maisonhaute. En effet, de nombreuses démarches contournaient la réglementation en mentionnant uniquement le mot « équitable » sur leurs emballages à des fins marketing. » Depuis cette année, toute utilisation de l’adjectif doit se référer à la définition du « Commerce équitable » tel qu’il est inscrit dans la loi.

Un label unique en question

Les acteurs craignent également que la multiplicité des labels et des démarches ne perde le consommateur, voire décrédibilise le commerce équitable. « Tout le monde a le droit de se revendiquer du Commerce équitable s’il respecte la loi  », ajoute Julie Maisonhaute. Une situation parfois perçue comme injuste par les entreprises qui s’insèrent dans des labels, aux démarches administratives plus lourdes. C’est pourquoi certains plaident pour la création d’un label unique national. Pierrick de Ronne, président de Biocoop, n’y est pas opposé. « Il est évident que nous ne sommes pas lisibles pour le consommateur, indique-t-il. Le secteur de l’agriculture biologique a réussi ce défi. »

Davantage de contrôles

Reste que la démarche du Commerce équitable est plus jeune et que les acteurs ont parfois des sensibilités différentes. « Nous ne sentons pas qu’ils sont prêts pour une identification commune, reconnaît Julie Maisonhaute. Par ailleurs, il faudrait que la démarche soit à l’initiative des pouvoirs publics. Or, nous avons actuellement peu d’écoute. Et si nous partions dans cette voie, il faudrait également des moyens importants dans la communication pour faire connaître le label. »

Quoiqu’il en soit, et face à l’insistance de CEF, la Direction de la répression des fraudes, DGCCRF, a entamé cette année une série de contrôles des démarches se revendiquant du commerce équitable. Une occasion, peut-être, de donner un premier coup de balai et de sortir les acteurs trompant la crédulité du consommateur.