Chlordécone, le lien avec le cancer de la prostate mis en évidence
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Les résultats d’un programme de recherche, nommé Karuprostate (1), publiés le 21 juin, mettent en évidence un lien entre le chlordécone, insecticide utilisé pendant vingt ans contre le charançon du bananier aux Antilles et le risque d’apparition d’un cancer de la prostate. Le risque, de 77 % supérieur à la normale dans la population antillaise, est statistiquement significatif lorsque les concentrations sanguines sont supérieures à 1 ?g/l. Il est même multiplié par cinq lorsque deux facteurs aggravants se cumulent : antécédents familiaux de cancer de la prostate et résidence dans un pays industrialisé, en l’occurrence en France métropolitaine. C.D.
Repères :
- Le chlordécone est considéré comme un perturbateur endocrinien et classé cancérogène possible pour l’homme par l’Organisation mondiale de la santé.
- L’étude a été menée de 2004 à 2007 sur une population de 709 personnes nouvellement atteintes d’un cancer de la prostate, comparée à 723 personnes indemnes, toutes originaires des Caraïbes (Guadeloupe, Martinique, Haïti, Dominique). L’exposition au chlordécone a été définie par analyse de la molécule dans le sang.
- Le chlordécone dispose d’une persistance qui peut avoisiner plusieurs centaines d’années dans les sols volcaniques récents, contre quelques dizaines d’années dans les sols plus évolués. Il concerne les sols mais aussi les cours d’eau et de ce fait rend impropre à la consommation des poissons et crustacés.
- La surface agricole utile potentiellement contaminée (surtout d’anciennes bananeraies) est estimée à 6 500 ha en Guadeloupe (18 % de la SAU) et 14 300 ha en Martinique (44 %) selon le rapport « Impact sanitaire de l’utilisation du chlordécone aux Antilles françaises », réalisé en octobre 2009 et mis en ligne le 17 juin 2010 sur www.invs.sante.fr.
- Onze cultures, essentiellement des légumes racines, ne peuvent être cultivées que si les agriculteurs disposent de sols indemnes. Des aides à l’implantation d’autres cultures voire à la friche, sont accordées.
- La contamination demeure cependant un vrai problème via les circuits courts, ou jardins familiaux, qui ne peuvent pas être aussi bien suivis. Un programme n’a été mis en œuvre qu’en 2008 en Guadeloupe et en 2009 en Martinique.
(1)Le programme de recherche Karuprostate a été mené par des chercheurs de l’Inserm (Université Rennes 1 - CHU de Pointe-à-Pitre) et de l’Université de Liège (Belgique), visant à « identifier et à caractériser les facteurs de risques environnementaux, génétiques et hormonaux de survenue du cancer de la prostate aux Antilles ».