Acolyance et la Scael contraintes à livrer plus de 800 000 t de blé à Blétanol
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La cour d'appel de Reims a condamné mardi 2 juin Acolyance et la Scael à honorer leurs contrats envers Blétanol pour la période de 2008 à 2017. D'ici à juin 2017, les coopératives devront livrer respectivement près de 450 000 t et 370 000 t de blé. Cédric Burg, directeur général de la Scael (à gauche) et Pascal Bayeul, directeur général d'Acolyance répondent à nos questions.
A compter du rendu officiel de l'arrêt prévu pour cette semaine, Acolyance et la Scael auront deux mois pour saisir la cour de cassation dans l'affaire qui les oppose à Blétanol. « Nous n'irons en cassation que si cela fait sens, mais c'est une démarche d'expertise juridique complexe et nous devons prendre le temps de la réflexion » explique Cédric Burg, directeur général de la Scael. Pascal Bayeul, directeur général d'Acolyance, partage cette analyse. Une chose est sûre : le blé devra être livré d'ici au 30 juin 2017, date de fin de l'engagement des deux coopératives auprès de Blétanol.
Acolyance se doit de livrer près de 450 000 tonnes à l'usine Cristanol de Pomacle-Bazancourt (51) : 278 000 tonnes pour les campagnes de 2008 à 2013, 52 000 tonnes pour 2014 et 55 000 tonnes prévues par an pour les campagnes 2015 et 2016. Cela représente près de 20 % du volume annuel de la coopérative. Le groupe affirme être en mesure de fournir par lui-même ces quantités. Mais cela a un coût : en vendant à Blétanol du blé en moyenne 45 € en dessous du prix du marché, Pascal Bayeul estime déjà à 10 M€ le « manque à gagner » sur les campagnes antérieures, auquel s'ajoutera celui des campagnes à venir. « Avec 112 M€ de fonds propres et environ 100 M€ de réserve, le groupe est en mesure d'absorber cette « perte » et payera les agriculteurs au prix du marché », assure le directeur général. Si la situation de la Scael n'est pas strictement identique, elle aura quand même près de 373 000 t à livrer d'ici à 2017 : 223 000 t pour les campagnes passées, 50 000 t pour cette campagne et 100 000 t pour les suivantes. « Les provisions et les réserves financières du groupe sont largement suffisantes pour que ni les adhérents, ni les équipes ne soient impactés », insiste Cédric Burg.
Un modèle économique et une gouvernance contestés
Si les deux coopératives assurent pouvoir gérer l'aspect financier, le fond du problème demeure : le modèle de production porté par Blétanol et la gouvernance du projet. « A l'heure actuelle, un produit noble comme le blé ne peut plus servir à la seule production de bioétanol », explique Pascal Bayeul. Nouvelles ressources, fabrication de co-produits, autant de pistes que la Scael et Acolyance sont prêtes à étudier dans la mesure où elles sont pertinentes économiquement pour les producteurs et les coopératives. Les discussions avec Blétanol vont se poursuivre. Cédric Burg insiste sur le besoin « de transparence de la part de la gouvernance », afin que les coopératives aient toutes les clés en main pour juger de la viabilité d'un projet .
Phillippe Mangin en appelle à la concertation plutôt qu'à la justice
Interrogé par notre rédaction en marge d'une conférence de presse le 4 juin, Phillippe Mangin, président de Coop de France, a répondu : « Je ne peux pas m'émouvoir que la justice condamne une entreprise coopérative à respecter un contrat. En tant que responsable de Coop de France, j'accorde du sens à l'engagement donné. » Au regard de l'importance des tonnages, il a appelé à la concertation entre les parties prenantes pour fluidifier la suite des opérations. « Si une telle situation se reproduit, je pense qu'un rôle de modérateur est désormais possible à travers le Haut conseil de la coopération », a-t-il conclu.
Les temps forts
2006 : Acolyance (à l'époque Cohesis) et la Scael rejoignent Blétanol
2007 : Un an avant la mise en fonctionnement de la ligne de production, Acolyance met en garde Blétanol sur la viabilité du projet. Ne se sentant pas entendu, le groupe décide de ne pas honorer ses livraisons.
2009 : Acolyance rejoint par la Scael engagent une procédure contre Blétanol
2011 : Le Tribunal de Grande Instance de Reims émet un avis favorable sur la sortie des coopératives de Blétanol, ce dernier fait appel.
2 juin 2015 : La cour d'appel statue en faveur de Blétanol et condamne Acolyance et la Scael à honorer leurs contrats.