Coop de France : « Le manque d’organisation des producteurs reste une faiblesse française »
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Inquiétudes quant à la situation économique et financière, problèmes de compétitivité des filières agricoles, de volatilité des prix, d’organisation des producteurs, réforme de la Pac, régime fiscal… En ce début d’année et avant le congrès de Coop de France qui se tiendra les 28 et 29 novembre, Philippe Mangin et Yves Le Morvan, respectivement président et directeur général de Coop de France, ont tenu à faire le point sur ces différents thèmes lors d’une conférence de presse organisée le 26 septembre à Paris.
« La situation économique et financière de la zone euro nous laisse inquiets, précise d’emblée Philippe Mangin. Les projets d’investissements au sein des coopératives sont nombreux mais certains pourraient prendre du retard en raison d’une certaine frilosité des banquiers, de plus en plus exigeants quant à la couverture des risques ». En ce début de campagne, l’inquiétude du président de Coop de France porte également sur la forte disparité des résultats de production, « qui devient une caractéristique de l’agriculture française ». Car si au niveau sécheresse, le pire a été évité à l’échelle nationale, « des situations catastrophiques sont observées dans des microzones pour la deuxième année consécutive ». Pour Philippe Mangin, toutes les filières sont frappées par les mêmes caractéristiques : des problèmes de compétitivité, de volatilité et d’organisation des producteurs. Gaëlle Gaudin
Photo : Yves Le Morvan et Philippe Mangin, directeur général et président de Coop de France.
Réduction des charges, innovations et captation de valeur ajoutée sont les éléments de réponse avancés pour contrer le problème de compétitivité. Mais en cette période de crise nationale, la réduction des charges « ne sera pas réglée si facilement », et côté innovations, « le regard de la société devient inquiétant ». Philippe Mangin compte donc surtout sur la création de valeur ajoutée, obtenue par une meilleure segmentation de la commercialisation et par les nombreux projets de regroupements régionaux qui permettent d’augmenter la taille des structures.
« L’avenir de la filière bovine ne passe pas que par l’export »
Pour le président de Coop de France, le manque d’organisation des producteurs reste une faiblesse française. Pour exemple : la filière bovine, « très atomisée et inorganisée ». Une filière dont l’avenir, en outre, ne doit pas passer que par l’export. « Nous sommes en train d’assécher nos outils industriels et d’importer de la viande allemande ! » Et de préciser que Coop de France manque d’enthousiasme à rejoindre le GIE export et souhaite vite s’expliquer sur le sujet avec le ministère de l’Agriculture. « Nous approuvons toute promotion de la filière bovine et la création d’une instance de veille avec des bureaux à l’international, à l’image de France Export Céréales. Mais nous n’avons pas besoin d’un GIE : nous savons exporter ! ».
Parmi les autres sujets abordés, la réforme de la Pac. Une réforme dont le projet déposé est considéré comme « une bonne base », nécessitant quelques améliorations, notamment en ce qui concerne la régulation des marchés. Quant au verdissement de cette Pac, Coop de France ne se montre pas opposée, « à condition qu’il s’inscrive dans une démarche de progrès, pour que notre agriculture s’appuie sur l’agronomie, les nouvelles technologies… »
Un congrès pour répondre aux reproches
Le congrès de Coop de France se tiendra les 28 et 29 novembre prochains. « Un congrès au cours duquel nous évoquerons tous les reproches faits aux coopératives. Nous ferons également le bilan de nos atouts et de notre responsabilité face aux nouveaux enjeux. » Un plan d’action y sera d’ailleurs dévoilé. Tout comme sera rendu public le nom de l’association créée entre Coop de France et InVivo. Une association dont les thèmes de travail seront arrêtés « dans quelques semaines ».
Enfin, Coop de France devrait publier d’ici à début novembre un livre blanc destiné aux candidats aux élections présidentielles de 2012.
Autres thèmes abordés par Philippe Mangin :
- La volatilité : « Elle confirme une financiarisation des marchés qui devient excessive et insupportable. Nous soutenons les recommandations du 20, mais tout reste à construire. »
- La contractualisation : « Coop de France est demandeuse et ne montre aucune résistance, contrairement à ce que l’on pourrait entendre. » Concernant la contractualisation entre les filières végétales et animales, « l’accord, signé le 15 juin, est récent et représente une véritable révolution culturelle », a tenu à préciser Vincent Magdelaine, directeur de Coop de France Métiers du grain. Selon lui, les éleveurs ont du mal à contractualiser car beaucoup croient en une baisse du prix des matières premières. « La vulgarisation de cette contractualisation permettrait pourtant de faciliter les négociations avec la grande distribution », a regretté Philippe Mangin.
- Niches fiscales : « Dans le projet de loi de finances, le traitement fiscal des coopératives est perçu comme positif. Les parlementaires pourraient le voir autrement, mais les conclusions de l’étude sur les aspects fiscaux dans le secteur coopératif, que nous devrions avoir mi-octobre, apporteront de l’eau à notre moulin. »
- Budget de la Pac : « Ce budget s’avère moins pire que prévu, mais ne prend pas en compte l’élargissement de l’UE. »
- Stratégie nationale pour la biodiversité : Coop de France va signer cette charte, et un groupe de travail spécifique est mis en place pour préparer une Déclaration d’engagements volontaires des coopératives dès 2012.
- Projet Agrihub : « Ce projet, qui entre dans le cadre de l’évolution des groupes régionaux, ne veut pas s’inscrire contre InVivo. Le moment n’est pas à l’individualisme. Les coopératives doivent plus que jamais coopérer entre elles et renforcer le maillon national. »