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Ecophyto, la double fracture

Le | Cooperatives-negoces

En reprenant le cap de moins 50 % de produits phytosanitaires à échéance 2025 (notre article du 2 février) et en mettant à l'ordre du jour des certificats d'économie des produits phytosanitaires à moins 20 % pour les distributeurs agricoles à cinq ans (notre alerte du 3 février), Stéphane Le Foll a pris de front les professionnels agricoles. Une double ligne de fracture se dessine, sur les objectifs chiffrés, d'une part et les distorsions de concurrence, d'autre part.

Orama « rejette toute logique de réduction aveugle de l'usage des produits phytosanitaires (…) tant que les solutions prônées pour y parvenir ne sont pas disponibles ». « La prise en compte du seul Nodu (nombre de doses unitaires), est une erreur, estime l'UIPP, l'utilisation des produits phytopharmaceutiques étant fortement liée aux conditions climatiques », et préconise de prendre en compte « la réduction des impacts environnementaux et sanitaires des produits comme l'indicateur de suivi prioritaire. »

Les associations écologistes réclament pour leur part plus de fiscalité et de réglementation, Générations Futures allant jusqu'à préconiser « de fixer des objectifs de réduction progressifs obligatoires, par région et par type de culture », pour « récompenser ceux qui prendront des risques et soumettre ceux qui ne jouent pas le jeu à des redevances importantes. »

L'UIPP dénonce à l'inverse « une pression fiscale disproportionnée » et souhaite limiter les contraintes qui seraient autant de distorsions de concurrence au sein de l'Europe et au-delà.

« Plutôt que des mesures coercitives, engageons des démarches positives entre acteurs », a plaidé Xavier Beulin, président de la FNSEA. Rappelant le risque de fragiliser les exploitations par des contraintes excessives, il a appelé à la mobilisation de moyens pour investir dans l'innovation. Ce thème est repris par l'ensemble des représentants du monde agricole, y compris par les semenciers. Ces derniers se félicitent que la création variétale soit clairement citée comme moyen de produire plus et mieux. Ils font d'ailleurs leur entrée officielle comme membre du Comité national d'orientation et de suivi d'Ecophyto.


Invivo salue « les avancées majeures » du plan


InVivo, davantage dans une logique d'acteur technico-économique, a pour sa part salué « les avancées majeures » du plan Ecophyto, tout en souhaitant aller plus loin dans son suivi. L'union nationale est largement investie dans les démarches d'agriculture durable et propose une palette d'outils pouvant entrer dans les actions susceptibles d'être « côtées » en nodu, afin de limiter les potentielles pénalités des CEPP. Biotop, pour le biocontrôle, le projet B-Motived pour les solutions complémentaires ou 3,5 millions d'ha suivis avec des OAD… L'union émet cependant deux réserves : la première porte sur la pertinence de l'indicateur quantitatif nodu, préférant «  privilégier les indicateurs mesurant la réduction des impacts et des risques, en phase avec la réglementation européenne. » La seconde réserve concerne précisément la nécessaire harmonisation entre les réglementations européennes et nationales afin d'éviter distorsions et fraudes.

Photo : L’objectif d’une réduction de 50 % des phytos, repris dans le plan Ecophyto 2, ne convainc vraiment pas les professionnels.