En Nouvelle-Aquitaine, le projet Néoterra fait grincer les dents des OS
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Produire du blé pour l’exporter ou pour le consommer, en local ? Cette question était au cœur de la table ronde organisée le 19 septembre par Passion Céréales dans les locaux de la Sica Atlantique à la Rochelle. Dans la salle, des OS, des représentants des chambres d’agriculture de la région Nouvelle-Aquitaine, du conseil régional, de la Draaf, de la chambre de commerce et de l’industrie. À la tribune, Jean-Pierre Raynaud, vice-président de la Région, chargé de l’agriculture ; Matthieu Brun, du club Démeter et spécialiste des sujets d’exportations ; Jean-Louis Zwick de Maïsadour et le meunier Jean-Paul Bellot. Un échange entre les politiques et les acteurs de la filière céréales qui s’est quelque peu animé à la fin du débat, au moment des questions.
Objectif régional : sortir des pesticides d’ici à 2030
Si les intervenants ont mis en avant la place indéniable de la Nouvelle Aquitaine dans la production et l’export de céréales, ils ont également insisté sur la nécessité de préserver une complémentarité entre cette activité export et la consommation locale. Sur ce point, consensus unanime. En revanche, Jean-Pierre Raynaud n’a pas su complètement rassurer les acteurs de la filière céréalière présents dans la salle sur l’avenir de l’agriculture à l’échelle régionale.
En mettant l’accent sur le projet Néoterra - la feuille de route régionale dédiée à la transition énergétique et écologique adoptée le 9 juillet 2019 par les élus locaux - le vice-président de la Région chargé des dossiers agricoles a surtout suscité de vives inquiétudes. Car parmi les 11 objectifs du projet, plusieurs concernent directement le monde agricole via des ambitions chiffrées à l’horizon 2030. Quelques exemples ? Sortir des pesticides de synthèse, arrêter d’utiliser des substances CMR (Cancérigènes, Mutagènes, Reprotoxiques) dès 2025, aboutir à la certification en bio « Haute valeur ajoutée » de 80 % des exploitations ou encore, réduire de 30 % des prélèvements d’eau pour l’agriculture en période d’étiage.
« Ne nous privez pas d’outils de production ! »
Si les objectifs sont clairs, les moyens pour y parvenir le sont en revanche un peu moins. « On ne part pas de rien, insistait Jean-Pierre Raynaud. Mais l’idée est d’accélérer la mutation, d’être mieux armés que nos voisins ». Comment ? « En nous enlevant certains outils de production, irrigation et intrants en tête ? », l’ont interpellé plusieurs représentants de coopératives. Entre autres questions : comment avec moins, peut-on produire autant et rester compétitif à l’échelle du commerce international ? Pourquoi faire croire au grand public que l’on peut facilement se passer des produits phytos ? « Ne l’oublions pas, la Nouvelle Aquitaine, ce n’est pas que le Bordeaux et le Cognac ! C’est aussi 3 Mt de blé dont la moitié est exportée ! »
Le blé, absent des valises diplomatiques
Jean-Pierre Raynaud a reconnu que le blé faisait rarement partie des valises diplomatiques mais a invité la filière céréalière à se manifester : « Et pourquoi pas dès novembre prochain, lors d’un voyage organisé en Côte d’Ivoire ? », a -t-il proposé. D’autant que, comme l’a rappelé Matthieu Brun, « dans de nombreux pays, le pain est plus précieux que le pétrole. 15 pays seulement produisent le blé consommé par 3 milliards d’habitants. Les pays producteurs dont nous faisons partie doivent être conscients de leur rôle pour préserver la paix dans de nombreux pays. Exporter revêt un vrai rôle stratégique sur l’échiquier politique mondial. Mais exporter est un travail de longue haleine. Non, nous n’exportons pas que le rebus de la production française. Nos clients ont des attentes précises en quantité, mais également en qualité ! La France a de solides atouts, en termes de climat, de logistique, de technicité… Il est important de les préserver et de les entretenir », a-t-il conclu. À condition que les politiques laissent aux acteurs de la filière les moyens pour atteindre ces objectifs.