L’agence de l’eau Loire Bretagne renoue le dialogue avec les agriculteurs
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« Nous voulons faire évoluer positivement les liens entre l’agriculture et l’eau, montrer qu’il existe des solutions pour l’environnement qui ne mettent pas en cause l’équilibre de l’exploitation », a introduit Serge Lepeltier, président de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, lors du colloque « Eau & agriculture : adaptation des pratiques, évolution des systèmes d’exploitation » le 25 juin à Tours. Car pour Philippe Lirochon, membre du Comité de bassin Loire-Bretagne et élu au collège des chambres d’agriculture, la fracture et l’incompréhension envers le monde agricole étaient de plus en plus grandes au sein du Comité de bassin, nécessitant de renouer avec un dialogue constructif, et d’organiser une telle journée. Pollution de l’eau par les nitrates et les pesticides, gestion de la ressource : les organisateurs du colloque ont donc voulu mettre en avant des solutions et des exemples de réussite, montrant que la dynamique de changement est engagée en agriculture. « Tous les organismes de conseil ont adopté cette charte » Et de rappeler que les objectifs sur l’ensemble d’un bassin doivent passer par un engagement collectif. Cité en exemple, sur les produits phytosanitaires : la création en début d’année de la charte « conseiller en pensant à l’eau, ça coule de source », mise en place sur le bassin versant viticole du Layon et de l’Aubance, dans le Maine-et-Loire, animé par le syndicat mixte du bassin. « Tous les organismes de conseil ont signé la charte », précise Dominique Perdrieau, président du syndicat. Elle passe par l’interdiction de certains produits phytosanitaires, des restrictions d’usage, l’identification de zones à risques, etc. L’implication des organismes de conseil est primordiale, comme l’a rappelé Christophe Viger, responsable des équipes techniques du négoce SCPA. Adhérant à la charte, le négoce travaille notamment sur la gestion des effluents phytosanitaires, en aidant le client à choisir le bon système pour son exploitation. Un conseil également vu comme un levier dans la lutte contre la pollution par les nitrates. « Nous avons formé 50 conseillers, qui vont s’appuyer sur une cartographie hydrographique et des espaces stratégiques réalisée pour chaque exploitation », explique Jean-Luc Barbo, vice-président de la commission locale de l’eau pour le Sage baie de Saint Brieuc. Un territoire qui représente la moitié des échouages d’algues vertes et la moitié des agriculteurs concernés. Le préfet devrait valider la charte d’ici à la fin de l’année. Pesticides, nitrates et irrigation La Draaf Bretagne a par ailleurs renforcé la campagne d’analyses de reliquats azotés, y dédiant un budget de 750 000 euros. 7000 parcelles sont analysées chaque année, et les résultats diffusés aux agriculteurs. « 80 % d’entre eux acceptent qu’ils soient transmis à leurs conseillers et aux animateurs de bassin versant, preuve de leur prise de conscience », reconnait Bertrand Guizard, de la Draaf Bretagne. Enfin, autre problématique soulevée : l’irrigation. Si la création de réserves de substitution a été vue comme une solution qui apporte de réels résultats, à l’instar du travail sur le bassin des Autizes dans le Marais Poitevin, cela nécessite du temps et des moyens financiers. Au final, les questions soulevées par les participants à cette journée se rapprochent de celles liées à la transition agro-écologique. Si le retour à l’agronomie semble être la voie la plus pertinente, comment diffuser à un plus large public une expérience réussie pour un cas précis ? De même, l’allongement de la rotation des cultures, préconisé pour améliorer la qualité de l’eau, pose la question de la diversification des exploitations et de la mise en place de débouchés et de filières de valorisation. « Cela nécessite une volonté collective, sinon les agriculteurs n’auront aucun intérêt à le faire », a insisté Jean-Marc Meynard, chercheur à l’Inra et grand témoin des débats. L’évaluation économique des solutions reste un excellent levier pour faire adhérer les exploitants. « Chaque fois que l’économie peut aller dans le sens de l’environnement, il faut y aller », a conclu le grand témoin. Crédit des photos : Jean-Louis Aubert et Stéphanie Ayrault