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Le modèle coopératif : une alternative au capitalisme d’aujourd’hui ?

Le | Cooperatives-negoces

En cette période de crise économique mondiale, de capitalisme financier non maîtrisé, le système coopératif a plus que jamais des vertus à faire valoir : tel est le constat de Georges Lewi et Pascal Perri (1), auteurs du livre « Les défis du capitalisme coopératif - Ce que les paysans nous apprennent de l’économie », paru le 25 septembre. Ainsi, selon ces experts en marketing et en économie, le modèle coopératif offre une véritable alternative au capitalisme d’aujourd’hui et devrait davantage inspirer « les solutions mises en œuvre par les instances représentatives dans leurs différents programmes de développement ». G.G.

« Car les quatre fondamentaux du modèle coopératif sont exactement à l’opposé des raisons pour lesquelles nous sommes actuellement en crise économique, précise Georges Lewi. Il est en effet fondé sur un exercice démocratique du pouvoir (un homme, une voix), sur le double engagement de souscrire au capital social et de livrer sa production, sur des fonds propres définis, et sur l’enracinement obligatoire sur un territoire géographiquement défini. »

Contrairement au « capitalisme sauvage », le modèle coopératif ne connaît pas les risques liés à l’absence de fonds propres, les délocalisations d’entreprises, la cupidité d’investisseurs. Dans un contexte mondialisé et hyperconcurrentiel, les coopératives se caractérisent au contraire par une identité locale forte, un attachement à leur territoire d’action, une vocation naturelle à contribuer au développement durable, et une entraide incontestable. « La coopération réconcilie l’économie et le social, elle entend placer l’homme au cœur de l’économie », notent les auteurs. Enfin, pour ces experts, les matières premières agricoles ne sont pas des actifs comme les autres. Raison pour laquelle « l’hyperlibéralisme agricole et la financiarisation des marchés alimentaires sont un échec pour une grande partie de l’humanité et un danger pour l’autre. »

Coopérer jusqu’au produit fini

Pour Philippe Mangin, qui a préfacé l’ouvrage, « les agriculteurs n’ont aucune chance de s’en sortir s’ils ne s’organisent pas économiquement ». Le président de Coop de France souhaite donc voir le développement de la coopération, notamment dans la transformation des productions, afin de conquérir de la valeur ajoutée par la maîtrise des filières agroalimentaires. Enfin, il envisage d’ouvrir une réflexion sur les chaînes de commercialisation des produits : « le projet de loi de modernisation de l’agriculture est l’occasion d’étudier, avec les distributeurs et les associations de consommateurs, la possibilité de raccourcir les circuits pour réduire les frais et remettre les territoires et la proximité producteur-consommateur dans la logique de l’alimentation ».

Pour rappel, le monde coopératif agricole français pèse aujourd’hui 80 milliards d’euros, emploie 150 000 salariés (3/4 des agriculteurs) et arrive au 2e rang mondial avec des marques connues comme Candia, Béghin Say, Douce France, Prince de Bretagne, Savéol, Loïc Raison, Nicolas Feuillatte… En 2008, 50 % de la production agricole mondiale étaient commercialisés par des coopératives, et en France, 40 % de l’agroalimentaire reposaient sur les coopératives.

''(1) Georges Lewi est spécialiste des marques, directeur du BEC (Centre d’expertise de la marque) et enseignant au Celsa et à HEC.

Pascal Perri est économiste, professeur d’économie à l’Ecole de commerce Advancia-Negocia, spécialiste des questions de concurrence, et dirige PNC, un cabinet de conseil en stratégie.''