Les coopératives de nutrition animale, un équilibre entre réduction carbone et performance économique
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Lors de la convention annuelle de La Coopération agricole nutrition animale, les principaux acteurs du secteur ont abordé les défis à relever pour les coopératives pour réduire les émissions de carbone tout en maintenant la compétitivité des productions animales.
« Le carbone, c’est très simple. Il suffit de connaître où sont les postes d’émissions et de voir comment on peut les éliminer. Mais cela devient complexe si on veut garder une compétitivité : il faut trouver le point d’équilibre. Il faut être capable de montrer que l’économie est jouable. Notre génération ne pourra pas échapper à cette question-là, donc nous devons absolument nous en saisir », indique Marc Braidy, chargé des questions carbone chez LCA et vice-président de Cérèsia, lors de la convention annuelle de La Coopération Agricole Nutrition Animale (LCA-NA), organisée au siège de Chambres d’Agriculture France à Paris. Cet événement a réuni les principaux acteurs du secteur autour du thème « Transitions et souveraineté : pour un pack gagnant avec la nutrition animale ».
Réduire de 20 % l’empreinte carbone de l’alimentation des filières d’élevage d’ici 2030
David Saelens, président de LCA-NA et président de Noriap, a réaffirmé les ambitions de la filière : renforcer la souveraineté des productions animales en augmentant leur compétitivité, accompagner la décarbonation de l’élevage français, et réduire de 20 % l’empreinte carbone de l’alimentation des filières d’élevage d’ici 2030. En tant qu’interface entre les productions animales et végétales, la nutrition animale peut jouer un rôle de catalyseur et encourager des synergies transversales.
« La compétitivité est le fil conducteur que nos adhérents exigent, reconnaît François Bloc, responsable du service production animale de Natup. Nous devons aussi proposer des formulations plus durables. Cela implique un accompagnement accru de nos éleveurs en matière de nutrition et de fourrages, dans un métier qui évolue vers plus de conseils et de services. Notre rôle est d’amener les équipes techniques à devenir de véritables coachs pour les éleveurs. »
Des synergies difficiles à généraliser
Ces synergies s’avèrent parfois fructueuses. « En poussant la technique, on s’aperçoit que nous pouvons avoir un très bon bilan carbone, et que ça va de pair », note Christophe Miault, administrateur de Terrena et éleveur laitier. « Sur mon exploitation, je cherche une nourriture qui émette le moins de carbone possible tout en maximisant la production de lait. Par exemple, l’autonomie protéique est un choix gagnant pour la compétitivité. Si nous souhaitons amplifier nos efforts sur cette autonomie, nous devons inciter notre coopérative à travailler sur des plantes capables de stocker du carbone dans le sol tout en produisant du fourrage, avec des systèmes racinaires très performants. Nous avons une dizaine de leviers efficaces, mais il faut encourager leur mise en place économique. Les élevages doivent être accompagnés par un nutritionniste et un agronome pour répondre aux interrogations des éleveurs. »
Cependant, Marc Braidy tempère : « Ce qui marche en alimentation animale ne fonctionne pas forcément en grandes cultures, ni pour toutes les cultures. Tout ne se ressemble pas. Nous n’avons peut-être pas encore les moyens de cultiver des légumineuses de manière performante sur nos territoires, mais nous avançons. J’invite vraiment la profession agricole à s’investir davantage. La filière doit appréhender ce sujet avec sérieux ; on voit ce qui est arrivé avec les phytosanitaires. Sur le carbone, il ne faut pas faire d’erreurs, il faut le travailler. »
Dans la transformation laitière, Christophe Miault précise qu’il faudra environ 200 millions d’euros d’investissement d’ici 2032 pour décarboner le secteur. « Nous avons de nombreuses possibilités, notamment la vente de crédits carbone. Cependant, avec la norme SBTi, il est nécessaire que les crédits carbone soient vendus au sein de la filière. »
Construire une vision de l’agriculture avant de s’attaquer à la réglementation
« Il faut construire une vision claire pour l’agriculture. Ensuite, nous pourrons travailler collectivement sur les diverses réglementations qui émergeront, indique Mickaël Marceron, vice-président de La Coopération Agricole, également élu à la vice-présidence de la Cogeca. Souvent, les réglementations environnementales et sociales sont abordées sans qu’il n’y ait de vision agricole globale. »