Médiateur de la coopération agricole, des litiges surtout stratégiques
Le | Cooperatives-negoces
Nommé médiateur de la coopération agricole il y a un an, Gilles Vanackere tire un premier bilan de ses fonctions, qui ont évolué avec la loi Egalim. Il a reçu une vingtaine de dossiers de litiges, qui portent majoritairement sur les stratégies des coopératives.
Le médiateur de la coopération agricole, auparavant désigné par le Haut comité de la coopération agricole, HCCA, est depuis la loi Egalim nommé par les pouvoirs publics. Gilles Vanackere, ingénieur des ponts et chaussées et fonctionnaire du ministère de l’Agriculture, a été nommé par décret par Emmanuel Macron le 15 décembre 2020. Le médiateur de la coopération agricole peut être saisi pour intervenir sur des litiges engageant des associés coopérateurs et leur coopérative, des coopératives entre elles, des coopératives et leur union ou des unions entre elles. « L’objectif est de trouver un consensus avant d’aller à la castagne ! » déclare Gilles Vanackere.
« Je suis l’expert du monde de l’amont, le droit coopératif est ma bible ! », sourit-t-il. Il n’a pas de compétence pour agir sur l’aval, les sujets contractuels, de prix, de volumes ou de délais. Ces litiges relèvent du médiateur des relations commerciales agricoles, un poste occupé par intérim par Robert Deville, depuis le 5 octobre. « La loi Egalim a renforcé la collaboration entre les deux médiateurs, indique Gilles Vanackere. Nous conjuguons les bonnes expertises. » Sur la vingtaine de dossiers traités cette année, six lui avaient été transmis par son homologue de l’aval.
Des stratégies peu compréhensibles des adhérents
Au cours de sa première année de fonction, « les dossiers émanaient en particulier de coopératives laitières et viticoles, et j’ai surtout été saisi par des associés coopérateurs. La nature des litiges est variée, mais concerne quasiment systématiquement des dissensions stratégiques », précise Gilles Vanackere.
« L’un des dossiers porte sur les conditions techniques permettant de postuler à un poste d’administrateur, d’autres litiges concernaient les règles de l’apport total, qui tolèrent une exception pour la vente à la ferme. Un dossier abordait un règlement intérieur de la coopérative qui était, selon l’associé coopérateur, non conforme aux règles de production du comité interprofessionnel. »
Mais dans la majorité des cas, les litiges portent sur une orientation stratégique de la coopérative dans laquelle des adhérents ne se retrouvent pas, et sur le souhait de ces associés coopérateurs de quitter la coopérative sans s’acquitter de pénalités statutaires. « Lorsque certains membres veulent se diversifier et d’autres consolider leur cœur de métier, des dissensions apparaissent », indique le médiateur. Ce problème de compréhension et d’adhésion à un projet collectif se retrouve également à l’échelle d’unions, au sein desquelles les coopératives ne se retrouvent plus.
Ne pas perdre de vue l’associé coopérateur
Pour Gilles Vanackere, il est primordial pour les dirigeants de coopérative de se souvenir que la clé de voûte d’un bon fonctionnement coopératif, c’est avant tout la valorisation des adhérents. « Les coopératives développent leur marché international, se filialisent, absorbent d’autres entités. Il est fondamental de ne pas perdre de vue l’associé coopérateur, qui est en début de chaîne. Des difficultés graves peuvent survenir lorsqu’il ne parvient plus à s’approprier la stratégie. »
Le médiateur, qui se voit « ni comme un juge, ni comme un arbitre », essaie d’aider les parties à formaliser et concrétiser des solutions qu’elles proposent elles-mêmes, autant que possible. Le recours au médiateur de la coopération agricole est gratuit, mais encore trop peu connu, reconnaît Gilles Vanackere. Pour se faire connaître, il prévoit en 2022 d’aller à la rencontre des coopératives en région.