Rencontre avec Patrick Beauvois, Terre Atlantique (17) - « Une telle baisse des surfaces de production de semences : du jamais vu ! »
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A l'échelle nationale, les surfaces de production de semences sont attendues en forte baisse pour 2015 : de - 20 % pour le colza à - 30 % pour le tournesol et le maïs. Patrick Beauvois, responsable de l'activité semences de Terre Atlantique, nous propose une analyse de la situation et des conséquences pour sa coopérative.
De telles baisses en maïs, tournesol et colza étaient-elles prévisibles ?
Patrick Beauvois : Dès le mois de novembre, lors de notre assemblée générale, nous avions dévoilé à nos adhérents les premières tendances de cette baisse annoncée. A l'époque, nous évoquions un recul de 20 à 30 %. Aujourd'hui, les chiffres se confirment. Chez Terre Atlantique, les surfaces de multiplication vont passer de 1200 à 710 ha pour le tournesol (-40 %), de 470 à 350 ha pour le maïs (-26 %) et de 290 à 200 ha pour le colza (-30 %). En 2014, rendement et qualité étaient au rendez-vous : les stocks sont désormais reconstitués. En colza par exemple, les volumes produits en 2014 ont été le double d'une année « classique », avec des rendements compris entre 26 et 30 q/ha. Dans le même temps, la demande des pays de l'Est a, dans un contexte politique instable, été divisée par deux. Dans cette zone, le manque de visibilité limite les investissements des semenciers.
Le marché des semences est, par nature, cyclique. Quelle est la particularité de cette année ?
P. B. : Même si nous savons que le marché des semences n'est pas linéaire, subir, en même temps, un tel recul pour trois espèces est très rare. Au sein de notre coopérative, la diversité des espèces travaillées nous permet de mutualiser le risque (1) mais il est vrai que le contexte exceptionnel de cette campagne nous ramène à une réalité économique, un peu oubliée les « bonnes » années. Là, nous devons trouver les leviers pour gérer au mieux les coûts. Cela va passer par une baisse du plan d'investissement prévu pour 2015/2016 et la nécessité d'adapter le travail des salariés de la station. Ces derniers vont être formés pour aller faire du contrôle et des épurations au champ.
Les investissements dans votre outil de production restent pourtant incontournables ?
P. B. : Oui, car nous devons préserver la performance de notre site et sans cesse l'adapter pour répondre au mieux aux attentes de nos partenaires. Les semenciers exigent de travailler de plus en plus vite et d'être capables, certaines années, d'absorber un surplus de volume. A nous aussi, de réussir à préserver notre réseau d'agriculteurs-multiplicateurs. Depuis novembre, nous avons multiplié les échanges avec eux, car même si nous cherchons l'équité entre nos adhérents, nous avons dû faire des choix entre exploitants pour réduire les surfaces engagées : fidélité, expérience et qualité du travail sont entrées en ligne de compte. La communication entre les techniciens sur le terrain et les agriculteurs a été capitale. Au final, tout s'est bien passé.
(1) Terre Atlantique produit également 1200 ha de céréales à paille autogames et 1300 ha de blé hybride.