Rentrée de l’agroécologie, les leviers des consommateurs pour influer les modes de production agricole
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Quels sont les leviers disponibles, pour le consommateur souhaitant favoriser l’essor de l’agroécologie ? Le cabinet Deloitte a posé cette question lors de sa « Rentrée de l’agroécologie », le 26 septembre à Paris, en présence de 180 participants issus d’industries agro-alimentaire, d’ONG, d’enseignes de distribution et de restauration, ou encore d’organisations agricoles. « C’est une tendance claire, affirme Gabriel Tavoularis, directeur d’études et de recherche au Credoc (1). Le consommateur cherche à donner du sens à ses actes du quotidien, et ses trois repas par jour n’échappent pas à la règle. »
Financement participatif, une dynamique souvent locale
Comment donner du sens à son alimentation ? L’acte d’achat est évidemment central. Christophe Urbain, co-créateur de l’outil d’aide au consommateur myLabel, précise que « deux tiers des utilisateurs choisissent au moins un critère environnemental » dans son utilisation de l’appli. Mais le pouvoir d’influence d’un consommateur dépasse le périmètre de ses courses. Florian Breton, créateur de la plateforme de financement participatif MiiMosa, pour les projets agricoles durables, en témoigne : « Nous traitons 80 à 120 projets chaque mois. En moyenne, ce type de financement fonctionne dans 60 ou 65 % des cas. Chez nous, ce chiffre s’élève à 85 % ! » Le citoyen s’investit en fonction des thématiques portées par le projet, mais aussi avec une forte attache locale, selon lui.
Les entreprises de l’agroalimentaire veulent accompagner le mouvement
Nicolas Chabanne, fondateur de C’est qui le patron ! ?, apporte un témoignage complémentaire. La marque CQLP fonctionne sur le principe de la concertation : des consommateurs expriment leurs attentes sur les produits et fixent le prix qu’ils sont prêts à payer. « C’est une démarche de bon sens qui ne concerne pas que les votants, affirme-t-il. Pour le lait, 8650 personnes se sont exprimées, mais 11 millions de consommateurs sont touchés ! »
Comment les acteurs des filières perçoivent-ils cette approche montante, issue des consommateurs ? Challengés, ils s’efforcent d’accompagner la tendance. Nestlé s’est ainsi rapproché de C’est qui le Patron ! ?, en vue d’une collaboration autour de deux projets : une purée déshydratée et des céréales pour le petit-déjeuner. « Pour nous, c’est une évolution naturelle dans notre démarche pour investir le consommateur dans notre métier, lance Jean-Manuel Bluet, directeur développement durable du groupe. Il est trop tôt pour annoncer quoi que ce soit, si ce n’est que la mayonnaise a bien pris. »
Consultations web et visites d’usines
Dans un autre registre, la consultation web proposée par la coopérative d’Aucy, invitant les internautes à choisir le prix qu’ils souhaitent payer pour accompagner des agriculteurs en conversion bio, compte 20 000 participations. « C’est une porte d’entrée pour des pratiques agroécologiques plus larges, affirme Nicolas Facon, qui supervise la démarche pour le groupe. En novembre, nous proposerons aux internautes de choisir d’autres leviers de progrès à favoriser, pour construire dès 2020 une charte de production qui ira plus loin que la Haute valeur environnementale, HVE. »
Autre approche chez Fleury Michon. Fortement questionnée sur la composition de son surimi en 2014, la marque a organisé des portes ouvertes dans ses usines. Près de 15 000 personnes se sont inscrites. Un succès également commercial, puisque les ventes, en baisse, sont alors remontées. La marque a reproduit l’opération pour ses usines de charcuteries. « Nous pouvons aider le consommateur à modifier ce qui lui est proposé, mais il est aussi possible de le rassurer sur ce qu’il y a déjà dans son assiette ! », conclut David Garbous, directeur marketing.
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(1) Credoc : Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie.