Salon Lin’ovation : le lin, « filière d’avenir » qui intéresse les distributeurs
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Les acteurs de la filière du lin fibre étaient réunis, les 15 et 16 juin dans l’Eure, pour le premier salon de plein champ consacré à cette culture. Sur les plans environnemental et des débouchés, tous les signaux semblent être au vert. Une dynamique dont les OS présents ont bien conscience. La mauvaise récolte annoncée, en raison de la sécheresse, illustre néanmoins les défis à relever pour la filière. Reportage dans les allées du salon.
« Nous sommes présents dans la région, ce salon est l’occasion de rencontrer nos clients qui ont une partie de leurs assolements en lin », explique Thierry Louvet, responsable Ouest chez Soufflet Agriculture. Tout comme lui, plusieurs acteurs de la distribution agricole, implantés dans le secteur, avaient fait le déplacement à Crosville-la-vieille les 15 et 16 juin 2022 dans l’Eure, où était organisé Lin’ovation, le premier salon technique de plein champ consacré au lin fibre. Sept hectares, 20 parcelles de démonstration et 100 exposants y attendaient les 3000 visiteurs attendus. « Jamais le lin n’aura eu autant le vent en poupe et n’aura été aussi désirable », se réjouit Bart Depourcq, le président de la Confédération européenne du lin et du chanvre, CELC, lors de l’inauguration de l’événement.
Des débouchés internationaux appelés à se diversifier
Indéniablement, la culture bénéficie d’une belle dynamique. En dix ans, les surfaces françaises ont doublé, dépassant les 150 000 hectares. Alors que la région fournit plus de 60 % de la production nationale et 50 % de la production européenne, l’organisation de ce salon au cœur de la Normandie n’est pas un hasard. « La filière est locale mais les débouchés sont internationaux », rappelle Pascal Prévost, président de la Coopérative de taillage de lin du plateau du Neubourg et administrateur du syndicat français des coopératives de lin (Festal).
Les débouchés se diversifient également, notamment du côté des applications industrielles. « L’objectif aujourd’hui est de donner du sens au travail des liniculteurs, en leur montrant toutes les applications possibles du lin, assure Sandrine Guibert, responsable marketing, stratégie et marché chez NatUp Fibres. Il y a bien entendu le textile, mais aussi les matériaux composites : renfort automobile par exemple, raquette de tennis, snowboard, mobilier. L’idée, sur notre stand, est de donner un aperçu de tout ce qui peut être fait. La demande augmente pour tous les usages. »
Une plante aux nombreux bénéfices environnementaux
Le textile reste néanmoins, indéniablement, le débouché principal du lin fibre. C’est d’ailleurs sur ce créneau que les acteurs de la filière mettent l’accent. « La filière fait face à un double enjeu : celui d’augmenter sa production et d’atteindre les 1 % de fibre textile dans le monde, contre 0,4 % aujourd’hui, mais aussi de mieux prendre en compte le changement climatique », poursuit Bart Depourcq. Dans ce contexte, la plante a en effet des arguments de poids. Elle nécessite peu d’intrants et d’eau, assure une bonne qualité des sols dans les rotations, et stocke près de 3,7 tonnes de CO2 par hectare.
« La production de lin a beaucoup d’atouts à faire valoir, indique Baptiste Soenen, chef du service agronomie-économie-environnement chez Arvalis-Institut du végétal. La plante est une culture bas intrants et nécessite donc peu d’engrais azotés, qui sont le premier poste d’émissions en grandes cultures. Elle présente également un intérêt pour le stockage de carbone via les intercultures, compte tenu de son cycle court. De plus en plus d’entreprises recherchent des crédits carbone de qualité, issus de l’agriculture française. »
Publication d’une ACV
Pour résumer ces bénéfices, la CELC s’est mobilisée pour réaliser une analyse de cycle de vie, ACV. Celle-ci suit la méthode PEF, pour Product environnemental footprint, mise en place fin 2021 par la Commission européenne. L’ACV a abouti à une note de 1,6 équivalent à une évaluation de « très bonne qualité », sur une échelle allant de 1 à 5. « Pour positionner le lin comme une fibre d’avenir et faire entendre notre voix à Bruxelles, nous devons arriver avec des données fiables », explique Marie-Emmanuelle Belzung, secrétaire générale de la CELC. La confédération souhaite ainsi impulser une évolution de la réglementation, qui favorise aujourd’hui davantage les cultures de plus grande échelle comme le coton, à l’impact environnemental bien plus élevé. La filière souhaite également progresser sur la promotion et la traçabilité de ses productions.
La météo inquiète les distributeurs
Le lin fibre doit néanmoins faire avec une météo de plus en plus capricieuse. « La récolte de lin va être assez médiocre cette année, il y a beaucoup de verse, regrette Thomas Crevel, technicien de plaine à la Coopérative de teillage Albert Brille. Cela avait déjà été le cas en 2020, nous allons donc avoir deux mauvaises récoltes sur trois années. » Les rendements moyens attendus tournent ainsi autour de 5,5 t/ha, contre 7 habituellement. « En raison du manque de pluie, le lin est resté bas, à 20 centimètres. Nous restons donc vigilants », confirme Antoine Breemeersch, responsable du silo à Neubourg pour le négoce Lepicard Agriculture.