Space 2018 - Innover pour valoriser
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Le monde de l’élevage s’est retrouvé à Rennes du 11 au 14 septembre 2018 pour la 32e édition du Space. Conséquence de la crise économique subie par les filières depuis plusieurs années, les distributeurs peaufinent des stratégies de valorisation des démarches vertueuses, de différenciation des produits et innovent dans les solutions pour assurer la performance économique des exploitations.
Les entreprises, confrontées à la difficulté de recruter dans les métiers agricoles, ont également profité du salon pour accueillir les éventuels futurs salariés avec des espaces dédiés à l’emploi sur leurs stands. Des stands où les discussions allaient bon train sur la séparation de la vente et du conseil des produits phytosanitaires, à l’heure où les débats sur le projet de loi issu des États généraux de l’alimentation ont repris à l’Assemblée nationale. Reportage.
Le Gouessant mettait en avant la valorisation des pratiques de qualité et plus vertueuses pour l’environnement par une différenciation sur les produits. Le réseau « Fermes des 4 soleils » englobe 127 exploitations. Les produits sont valorisés sous la marque Terre de Breizh, qui existe depuis trois ans et demi. Elle s’enrichira en octobre avec le rôti de porc, puis avec les produits laitiers en 2019. Pour développer la démarche, Le Gouessant lance un programme de modernisation de ses outils de production.
Agrial mise sur la différenciation des produits. Le 12 septembre, la coopérative lançait au Space la marque « Les 300 et bio » sur les produits laitiers qui ont fait leur apparition dans les rayons le 3 septembre. Deux jours plus tard, toujours à Rennes, la coopérative dévoilait sa gamme de lait UHT labellisée sans OGM et Bleu blanc cœur. « Ces politiques de différenciations permettent de récompenser les démarches vertueuses en apportant une plus-value à nos producteurs de lait », explique Sarah Deysine, responsable communication. L’ambition est la même sur la filière cidricole. Face à la baisse de la consommation en France, Agrial a racheté en septembre 2018 le cidrier anglais Aston Manor. « En France, le marché s’établit à 800 000 hl contre 8 Mhl de l’autre côté de la Manche », insiste Sarah Deysine. Conseillers, chauffeurs laitiers… la structure profitait également du salon pour tenter de trouver de nouvelles recrues.
Terrena reste le premier partenaire de la performance des exploitations ! C’est en tout cas ce que la coopérative a souhaité montrer sur son stand. Elle innove dans les outils d’accompagnement des adhérents. Le Plan de progrès partagés (3P) vise l’atteinte commune d’objectifs d’améliorations techniques partagés entre l’agriculteur et son conseiller. 630 producteurs de ruminants ont testé la démarche, avec à la clé un gain moyen annuel de performance de 2900 euros par exploitation. Autre nouveauté : la solution Emergence, une démarche de dépeuplement et repeuplement en production porcine avec vide sanitaire et diagnostic bâtiment. Cette méthode améliore les coûts de production en permettant un gain de 263 € par truie sur un an soit 53 000 € par an pour un élevage de 200 truies, assure Terrena .
Le positionnement du stand de Triskalia juste à côté de celui de d’Aucy, qui regroupe la Cecab-Coop de Broons, n’était pas le fruit du hasard. Les deux structures ont annoncé leur union en décembre 2017. La décision a été votée le 6 juillet. Les deux entités attendent désormais la validation de l’autorité de la concurrence d’ici à la fin de l’année. Le Space était alors l’occasion de répondre aux questions des adhérents. « Nous répondons aux nombreuses interrogations sur le siège de la nouvelle structure et sur notre capacité à conserver la proximité avec les adhérents », explique reconnait Denis Ernotte, responsable communication du groupe D’Aucy.
Pour cette nouvelle édition du Space, Négoce Ouest avait axé sa présence sur le recrutement, qui s’avère toujours aussi compliqué pour les entreprises. 29 postes étaient proposés. « On essaie de prendre le temps de communiquer sur nos métiers et notre image, notamment auprès des écoles », explique Sébastien Neveu, directeur de Négoce Ouest. Le réseau lance une campagne de communication. Des vidéos sur le métier de responsable silos, celui de technico-commercial, sont visualisables sur le site de la FC2A. Une troisième est en préparation sur le métier de logisticien.
Pour la Cooperl, les pratiques plus écologiques doivent être économiquement valorisées. « Nous voulons avant tout maitriser les couts de production de nos adhérents, martèle Patrick Drillet, vice-président de la Cooperl. Nous aidons les agriculteurs à innover avec un coût raisonnable. » Depuis trois ans, la Cooperl propose une séparation de la phase liquide et solide des lisiers dans les bâtiments d’élevage porcin. Les déchets vont approvisionner une unité de méthanisation qui sera opérationnelle en janvier 2019. Elle alimentera 3600 foyers. Du côté des filières végétales, la coopérative lance cette année une segmentation « nos champs sans pesticides ». Les agriculteurs s’engagent sur cinq hectares minimum. 4000 hectares sont pour l’heure concernés. « Nous réfléchissons à la manière de valoriser ces pratiques dans nos filières d’alimentation animale, poursuit Patrick Drillet. Cela reste indispensable. » La coopérative avait également dédié, sur son stand, un espace recrutement.
Impossible de faire l’impasse sur le conseil
Alors que les agriculteurs sillonnaient les allées du Space, les députés débattaient du projet de loi issu des États généraux de l’alimentation. Un point alimentait plus particulièrement les discussions chez les dirigeants : la séparation de la vente et du conseil des produits phytosanitaires. « Nous sommes dans le brouillard, nous ne savons pas ce qui va ressortir », reconnait Sarah Deysine, responsable communication d’Agrial. Difficile en effet de prédire l’issue des débats. Mais, pour la Cavac, s’il faut choisir, l’option est claire : ce sera le conseil ! « Nous avons développé des filières de qualité, avec des marques, où nous garantissons la transparence : impossible de ne pas réaliser le conseil, insiste Jean-Marie Gabillaud, vice-président de la Cavac. Même si la coopérative a pourtant investi dans la logistique et le transport des produits phytosanitaires. »
Sans vouloir s’avancer trop fortement sur le sujet, Terrena indique qu’elle suivra cette même stratégie si un choix s’imposait. « Entre la vente et le conseil, nous garderons le conseil, insiste également Bernard de la Morinière, vice-président de Triskalia. Notre enjeu est bien d’accompagner les exploitants vers des mutations plus complexes et d’assurer la traçabilité de notre production. »