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Space 2019 : ambiance apaisée sur les stands de la distribution

Le | Cooperatives-negoces

Pour cette 33e édition, le salon des productions animales qui se tenait à Rennes du 10 au 13 septembre, a accueilli des éleveurs plutôt souriants. Les cours sont bons, surtout pour les filières porcines, et le niveau de la collecte de céréales est au-dessus des attentes, redonnant du baume au cœur aux éleveurs ! Si l’agribashing continue de peser sur le moral des exploitants, les éleveurs sont moins touchés par les récentes polémiques médiatiques sur les pesticides. Avec les démarches de qualité engagées par les coopératives et les actions pédagogiques des filières agricoles sur les réseaux sociaux, les agriculteurs semblent reprendre du poil de la bête dans le combat médiatique qui les oppose aux mouvements anti-élevage. Un climat, donc, bénéfique au dialogue entre les distributeurs et leurs adhérents… et aux investissements ! L’enjeu semble aujourd’hui se tourner vers le numérique pour des exploitations 100 % connectées. Un moyen d’accroître la performance des entreprises, de tracer les pratiques agroécologiques et d’assurer le lien avec l’aval, jusqu’aux consommateurs. Témoignages de distributeurs.

Triskalia et D’Aucy s’affichaient déjà sous la bannière Eureden.

Se faire connaître ! Telle était l’ambition d’Eureden, la future structure qui unira, en janvier 2020, Triskalia et le groupe d’Aucy, avant l’étape de la fusion en janvier 2021. Elle faisait sa première apparition sous cette enseigne au Space. « Les adhérents sont très contents, assure Georges Galardon, président de Triskalia. Ils comprennent que nous devons optimiser les coûts de fonctionnement. » À la clé : une économie des deux structures sur la logistique ou encore sur les magasins de proximité. « Nous pourrons également spécialiser nos compétences et nos outils de production, explique-t-il. Un des premiers chantiers portera sur l’alimentation animale. Mais tout ne se fera pas du jour au lendemain. » La structure entend se développer à l’international, notamment sur les légumes. « L’ambiance cette année est excellente car les cours du porc s’améliorent, ajoute-t-il. Toutefois, les producteurs de lait sont encore en attente d’une amélioration de leur rémunération. Le secteur de la volaille aurait dû aussi bénéficier d’une revalorisation, mais ce n’est pas le cas et nous sommes déçus. Nous pensons que certains maillons de la filière font obstacle à une augmentation des prix. »

Progresser dans les démarches de qualité : à la Cavac…

Une différence entre les filières également ressentie à la Cavac. « Certes, les éleveurs de porc ont le moral au beau fixe, mais cette tendance ne se retrouve pas sur toutes les productions, explique Jacques Bourgeais, directeur de la Cavac. L’année dernière, les cours en canard étaient bons, ils sont retombés cette année. » Le directeur reconnaît également que la stigmatisation du monde agricole est parfois dure à supporter pour les agriculteurs. « Mais nous sommes très impliqués sur les filières qualité, sur l’agriculture biologique et nous communiquons dessus à travers la signature Positive agriculture et les réseaux sociaux », ajoute-t-il. La structure continue d’ailleurs à investir dans le bio : elle va doubler la production de l’usine de boulangerie Biofournil dans le Maine-et-Loire en 2020, avec un investissement de dix millions d’euros, et construira une usine de fabrication d’aliments bio à Fougeré (85) fin 2020.

… et à la Cooperl

Les productions de qualité sont aussi un axe majeur pour la Cooperl. Elle mettait en avant son projet de traçabilité numérique sur toute la durée de vie des porcs. « Une quarantaine d’élevages teste, depuis trois ans, le dispositif que nous allons étendre cette année », indique Patrice Drillet, le président. Autre sujet majeur : la biosécurité avec la progression de la peste porcine africaine, PPA. « Nos agriculteurs concernés seront tous formés, insiste-t-il. La maladie est très contagieuse. Ils doivent apprendre à gérer les entrées et sorties des personnes externes. Ce qui va aussi leur permettre d’être vigilants quant aux intrusions de militants anti-élevage ». La structure poursuit le développement des cultures sans pesticides, par le biais de sa démarche nommée Envi. 70 agriculteurs sont actuellement engagés, sur cinq à dix hectares de leur exploitation. « Mais nous allons doubler ce nombre cette année », précise Patrice Drillet. Quant à la séparation de la vente et du conseil sur les pesticides, la structure n’est pas inquiète. « Nous avons déjà sauté le pas avec les produits vétérinaires, où deux structures différentes vendent et conseillent, indique-t-il. Et puis la baisse des intrants est une réalité à la Cooperl ! »

Séparation conseil/vente interroge toujours

Une séparation de la vente et du conseil qui pourtant pose questions aux négociants de l’Ouest. « Les modalités, surtout les petits détails, ne sont pas encore connues, étaye Vincent Bernard, son directeur. Qu’est ce que l’on entend par intrant, par conseil stratégique, etc ? Tous les négociants ne feront pas le même choix, selon leur engagement actuel dans les services de conseil. » Comme à son habitude, la structure profitait du salon pour tenter de recruter des technico-commerciaux. Avec toujours autant de difficultés ! « C’est un métier complexe, avec beaucoup d’heures de travail et un gros volet sur la réglementation », reconnaît-il. Quoiqu’il en soit, les négociants sont ravis : la collecte a été bonne. « Certains OS ont réalisé de meilleurs scores qu’en 2016 ! », poursuit-il.

À la coopérative du Garun-Paysanne, les signaux sont également au vert. La structure a produit 370 000 tonnes d’aliments pour animaux cette campagne, en développement sur toutes les filières. À la tête de l’entreprise depuis un an, Sébastien Blot s’est attaché à travailler sur l’optimisation des procédés. Un plan d’investissement sur cinq ans, de cinq millions d’euros, a été lancé pour moderniser les outils. « La volonté est aussi de bâtir des partenariats avec l’aval de la filière, livre-t-il. Et de faire entrer de nouveaux administrateurs dans la gouvernance de la structure. »

Terrena, LE GOUESSANT : connecter les exploitations

Le stand de Terrena s’affichait sous les couleurs du numérique, toujours sous la bannière « La Nouvelle agriculture ». L’outil de pilotage connecté Consélio, développé sur bovins lait en 2018, s’étend à la viande. Un module « marge sur coût alimentaire » permet à chaque éleveur de se situer sur un niveau de performance et d’identifier ses leviers de progression. Un millier d’exploitations devraient utiliser Consélio bovins d’ici à la fin de cette année. « L’objectif est de connecter tous les Consélio pour former un outil de gestion globale de l’exploitation », précise-t-on chez Terrena. Consélio grandes cultures, lancé en 2014, est déjà utilisé par 4900 exploitations sur 700 000 hectares : son pendant en volailles concerne 1050 élevages.

Le numérique était aussi à l’honneur pour Le Gouessant, qui a investi dans des systèmes d’analyse de données. Avec plusieurs outils. Deux élevages testent l’alimentation de précision pour lutter contre le gaspillage, abaisser les coûts de l’alimentation, favoriser l’autonomie en protéines et diminuer les rejets azotés et phosphorés. Autre solution en expérimentation : le pilotage des performances technico-économiques des élevages, grâce à l’application Aunéor. Elle est opérationnelle sur les ruminants et volailles de chair et en cours de développement en porcs, poulettes et pondeuses. Enfin, la coopérative est entrée en février 2019 dans le capital de See-d, une start-up située à Vannes, spécialisée dans la valorisation des données. Deux programmes sont conduits dans le cadre de cette collaboration : une modélisation de la croissance des poulettes et pondeuses et une analyse des données historiques en alimentation en porcs.