Référence agro

Stock, report, logistique… le casse-tête de fin de campagne

Le | Cooperatives-negoces

Vendre à prix bas ou jouer le report ? Sécuriser ou spéculer encore un peu plus ? Attendre la date du débouclage ou vendre dès à présent pour éviter un potentiel embouteillage logistique avant la prochaine récolte ? Les stocks de blé, encore importants chez les OS et difficilement quantifiables chez les agriculteurs, compliquent la lisibilité de la stratégie à adopter. Une chose est sûre : il faut faire de la place, d'autant que la prochaine récolte s'annonce précoce. Sur le terrain, tout le monde n'est pas inquiet.


« En février, 5,5 Mt de blé étaient encore en stock, en dépôt à façon, chez les OS, contre 3,5 Mt en moyenne les autres années », constate Sébastien Poncelet, conseiller chez Agritel. D'ici deux mois, ces 2 Mt vont alimenter le marché : la date de débouclage étant, selon les distributeurs, fixée entre fin mars et mi-mai. Si les agriculteurs espèrent d'ici là, sans trop y croire, une remontée des prix, les OS s'organisent dès à présent pour évacuer ces tonnages. C'est le cas chez Unéal (62) où Maurice Caillaud, directeur de la collecte, annonce, au 10 mars, un retard de 10 à 15 % des ventes à l'export. « Début mars, nous avions quelques acheteurs mais les agriculteurs n‘étaient pas prêts à vendre. Là, les acheteurs se font plus rares. Chez nous, le débouclage se fait fin avril. Pour que tout soit prêt avant la moisson - vider, nettoyer et désinsectiser les silos - la logistique et la gestion du personnel s'annoncent tendues :  juin et début juillet étant normalement des périodes de congés pour notre personnel, avant le rush de la moisson ».


Stock à la ferme : grosse inconnue

Le retard des ventes accentue le casse-tête de l'exécution. Difficile d'avoir une réelle lisibilité du marché d'autant que la grosse inconnue reste le niveau de stock chez les agriculteurs. Seule certitude, ces volumes ont, selon FranceAgrimer, progressé de 29 % entre décembre 2014 et décembre 2015 : ces tonnages représentant 23 % de la collecte nationale. « Certains agriculteurs ont déjà annoncé leur volonté de faire du report… pour ne pas brader leur marchandise », précise Sébastien Poncelet. Derrière cette décision, deux stratégies possibles. « Soit le volume reporté est déjà vendu sur une prochaine échéance et l'agriculteur joue dès lors la carte de la sécurité. Soit il attend une éventuelle remontée des cours et là, il opte pour la spéculation avec une prise de risque maximale. Dans ce cas, mieux vaut avoir les reins solides, une trésorerie saine et… des silos de disponibles pour accueillir la future récolte ! »

A la Cavac (85), où 60 % des blés sont vendus avec un prix d'acompte, Christophe Vinet, le responsable céréales estime que dans sa région, « peu d'agriculteurs opteront pour une stratégie de report, surtout cette année où les trésoreries sont tendues. Peu d'exploitants ont encore les moyens de spéculer ».  


La solution viendra-t-elle du ciel ?

« Aujourd'hui, le scénario privilégié est, pour les semaines à venir, un maintien des cours du blé, à + ou - 5 € près, confie Sébastien Poncelet. Le blé français reste le moins cher du monde. Le seul moyen d'écouler nos stocks, c'est qu'il le reste ! Seul un problème climatique majeur, chez un opérateur majeur, pourrait inverser la tendance actuelle ». Plus que jamais les opérateurs décortiquent les modèles météo et scrutent l'arrivée possible d'un El Nino ou de sa petite sœur La Nina.