Tour de plaine : aider les agriculteurs à réinvestir dans la collecte 2017
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La moisson 2016 est et restera mauvaise, voire très mauvaise, pour les régions au nord d'une ligne Nantes-Lyon. Pour les agriculteurs, pas le temps de s'apitoyer. La prochaine récolte doit se préparer dès à présent. Entre avances de trésorerie, pré-acomptes, report d'échéances pour les achats d'intrants, crédits spéciaux, relais auprès des banques, mesures spéciales jeunes, diversification des cultures… les distributeurs déploient un panel de mesures pour soutenir les trésoreries afin que les exploitants puissent réinvestir rapidement dans les prochains semis. Les directeurs de Noriap (80), de Cérépy (89) et de la Cavac (85) nous dévoilent les solutions mises en place au sein de leur coopérative.
Martin Migonney, directeur général de Noriap (80) - « Un crédit bancaire à court terme gratuit, de 450 €/ha pour les achats d'intrants »
« Face à des rendements en recul de 36 % en un an, le conseil d'administration a validé une série de mesures pour venir en aide à nos adhérents, rapidement. Il est capital que les agriculteurs investissent dès à présent dans la récolte 2017. Nous allons tout faire pour les y aider. Ainsi, l'échéance pour le paiement des achats de semences de céréales d'automne et de colza est repoussée à la moisson 2017. Cet effort financier, très significatif pour l'entreprise - 10 à 12 M€ que la coopérative va emprunter - est incontournable. Certains agriculteurs pourraient être tentés d'utiliser leur propre semence. Cela est possible mais les petits PS de cette année compliquent le tri et le nettoyage. Il faut être bien équipé. Si les agriculteurs n'ont pas l'habitude, le risque est grand de se retrouver avec une semence de mauvaise qualité. Autre mesure annoncée : un crédit bancaire à court terme gratuit, de 450 €/ha, pour financer les achats d'intrants. L'enveloppe dédiée est estimée entre 30 et 40 M€. La coopérative se porte caution et dans les situations délicates, nous échangeons avec les banques, le centre de gestion et l'agriculteur. Dans notre région, les banques jouent le jeu : elles n'y vont pas à reculons. Au sein de la coopérative, nous avons lancé un plan d'économie serré mais cela ne remet pas en cause les projets à moyen terme. Nous sommes sur des événements conjoncturels. Nous devons nous adapter tout comme les industriels d'ailleurs. Amidonniers, meuniers, fabricants d'aliments du bétail… multiplient les tests pour voir s'il est possible de travailler des céréales aux qualités moindres. Chacun cherche des solutions ».
Jacques Bourgeais, directeur de la Cavac (85) - « Crise de l'élevage et mauvaise collecte : double peine »
« Dans notre zone de collecte, le recul du volume collecté pour les cultures d'été est de 17 %. Moins important que dans les régions plus au Nord certes, mais un mauvais résultat en céréales qui s'ajoute à une conjoncture très difficile en élevage depuis plusieurs mois. La situation des trésoreries dans les exploitations, à dominante polyculture-élevage, se complique d'autant qu'en maïs, la récolte s'annonce catastrophique, notamment pour les parcelles non irriguées (près d'un hectare sur deux dans la région). A l'automne 2015, nous avions déjà versé une enveloppe d'aides financières à hauteur de 1 M€ pour soutenir les éleveurs. En juillet 2016, le conseil d'administration a décidé d'allouer un nouveau train d'aides, là encore d'1 M€. Notre stratégie est de faciliter l'accès aux prêts bancaires en prenant en charge les intérêts et en faisant le relais, si besoin, auprès des banques. Bien sûr, nous cherchons à étaler les dettes, dans la mesure du possible. La situation en élevage, plus structurelle, nous inquiète. Nous avons hâte de voir le prix du lait et de la viande remonter ».
Germain Bour, directeur général de la coopérative Cérépy (89)- « Nous avons fait une demi-récolte ».
« En volume, sur l'ensemble des productions, nous avons réalisé une demi-récolte par rapport à l'an passé, c'est catastrophique », déplore Germain Bour, directeur général de la coopérative Cérépy (89). La moyenne des rendements de blé atteint 37 q/ha. Les conséquences économiques sont à prévoir pour les adhérents mais aussi la coopérative. Les investissements de cette dernière sont différés d'un an, les emplois gelés et les frais de fonctionnement réduits. Malgré tout, la coopérative se projette déjà dans la récolte 2017. Des mesures en direction des adhérents seront validées en conseil d'administration aux alentours du 10 septembre. Parmi les pistes envisagées, la coopérative compte miser sur la diversification des cultures. Depuis plusieurs années déjà, nous encourageons à diversifier les assolements avec du pois chiche, du tournesol ou de l'avoine nue, des plantes vertueuses sur le plan environnemental mais aussi économique : ces plantes étant moins gourmandes en intrants. Cette année, certains hectares de blé enregistrent une perte de 500 €, alors que ceux de pois chiches dégagent une plus-value de 500 €, assure le DG de Cérépy. Des discussions sont en cours avec les banques pour mettre en place des accords tripartite avec l'adhérent, la coopérative et les banques afin de faciliter les achats d'intrants de l'agriculteur pour la campagne à venir".