Tour de plaine - Les moissons progressent… sous la canicule
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Les premiers échos de la récolte 2019 sont encourageants. Personne n’ose encore trop croire à une belle moisson. La prudence est de mise et l’optimisme mesuré d’autant que le coup de chaud de ces derniers jours pourrait avoir un impact sur les parcelles de blé les plus tardives, actuellement en cours de remplissage. Référence-Appro a pris le pouls chez Vivadour, Cavac, Noriap, Valfrance, la Cal, la Dauphinoise et Dijon Céréales.
Alors que la récolte des orges d’hiver a débuté avec des premiers échos plutôt positifs, les fortes chaleurs de ces derniers jours posent question pour les parcelles encore sur pied. Pour Jean-Charles Deswarte, spécialiste de l’écophysiologie des céréales chez Arvalis, « les parcelles les plus tardives sont les plus à risque, d’autant plus si les réserves en eau sont faibles », explique-t-il sur le site de l’institut. Tout se joue autour du stade grain laiteux. Pour les blés ayant dépassé ce stade, le risque est moindre. Pour les grains en cours de remplissage, ce qui est le cas dans de nombreux secteurs au nord d’une diagonale Nantes-Lyon, les fortes chaleurs pourraient impacter la constitution du PMG, le poids de mille grains, et donc le rendement final.
« Dans les cas extrêmes, poursuit-il, quand les températures dépassent les 35 °C et que les réserves en eau sont faibles, les plantes ne peuvent plus contrôler leur respiration : résultat, un échauffement brutal des tissus qui peut conduire à un arrêt immédiat et définitif du fonctionnement de la plante. » Si ces conditions perduraient, les critères technologiques des blés (PS, temps de chute de Hagberg…) pourraient également être affectés. Mais heureusement la météo s’annonce plus clémente, et surtout moins caniculaire, pour les jours à venir.
Fabien Cazeaux, responsable de la collecte chez VIVADOUR (32)
« Pas de canicule dans notre région »
« La moisson a débuté dans les colzas et les blés de force. Un quart des parcelles d’orge sont désormais récoltées. Les premiers échos sont bons, tant en rendement qu’en qualité mis à part, quelques PS un peu bas. Dans notre zone, une couverture nuageuse a permis de ne pas trop souffrir de la chaleur. L’impact sur les céréales encore sur pied devrait donc être très limité ».
François Loyau, du services céréales de Noriap (80)
« Le potentiel est là mais rien n’est gagné »
« Les moissons n’ont pas encore débuté dans la région. Une chose est sûre : les composantes du rendement, nombre d’épis et nombre de grains, sont bonnes. La fécondation a eu lieu dans de bonnes conditions, contrairement à l’an passé. Reste l’étape du remplissage qui sera décisive sur le poids de la collecte. Les fortes chaleurs pourraient avoir un impact mais il est encore trop tôt pour le dire. Les premières pesées devraient également permettre de quantifier l’impact d’une gestion parfois compliquée du désherbage. Avec la suppression du Gaucho, la lutte contre les pucerons s’est avérée également plus difficile. Autant de facteurs qui rendent impossibles les prévisions de rendement même si, il faut bien l’avouer, le potentiel est là. »
Christophe Vinet, directeur céréales de la Cavac (85)
« Les orages m’inquiètent plus que les coups de chaud »
« Les récoltes débutent tout juste dans les orges et le colza. Les grains de blés sont matures, et bien remplis. Le potentiel attendu est plutôt bon. Le stade le plus sensible des blés vis-à-vis des coups de chaud est passé. Je ne suis pas inquiet pour les cultures prêtes à moissonner. Espérons que les orages annoncés ne seront pas trop violents ».
Hugues Desmet, responsable de la collecte chez Valfrance (60)
« PMG et rendement des blés pourraient être affectés »
« Les blés n’ont pas encore tous dépassé le stade critique pour le coup de chaud : le stade laiteux. L’impact pourrait être une baisse du PMG et à terme, un recul des rendements. Mais il est encore trop tôt pour tirer des conclusions d’autant que nous ne sommes pas implantés dans les départements où il a fait le plus chaud. Ces dernières semaines, il a plu régulièrement. Les plantes n’ont pas manqué d’eau. Le potentiel est là tant en nombre d’épis qu’en nombre de grains. Les moissons des cultures d’automne s’annoncent bien. Nous sommes un peu plus inquiets pour les cultures de printemps qui pourraient souffrir si la chaleur persistait ».
Philippe Hance, responsable collecte de la Cal (54)
« Le risque le plus élevé ? Pour les orges de printemps »
« La plaine était en bon état avant le coup de chaud. Mais le blé tendre blanchit vite et la date de récolte était prévue pour la mi-juillet seulement. Nous nous attendons à perdre des tonnes, même si nous avons connu un phénomène similaire en 2015 et que les rendements ont finalement été au rendez-vous. Le plus à craindre concerne les orges de printemps, pour lesquelles les surfaces ont progressé de 30 % sur cette campagne. Nous avions un super potentiel, mais les champs sont encore en pleine photosynthèse. Du côté du maïs fourrage, c’est du jamais vu. Le stade 10 feuilles est atteint, les plantes font 60 cm de haut et les feuilles frisent déjà. Les températures devraient baisser dès le début de semaine. »
Philippe Lefebvre, directeur des métiers du grains de Dauphinoise (38)« Un risque pour le rendement si la canicule continue »
« La plaine est belle pour l’instant. Toutefois, si la canicule se poursuit encore quelques jours, avec des températures de 36 ou 37 °C, il y aura des conséquences, même s’il est difficile d’attribuer une baisse de rendement à un seul événement climatique. Avant cet épisode de chaud, nous estimions un rendement au moins équivalent à l’an passé en blé tendre, soit une moyenne de 65 q/ha, avec des disparités allant de 40 à 100 q/ha sur notre territoire. En colza, le recul de la collecte devrait atteindre 20 %, s’expliquant par la baisse des surfaces et du rendement. Nous estimions ce dernier à 27 q/ha avant la canicule, contre 35 q/ha l’an passé. Là encore, nous nous attendons à une grande hétérogénéité, car les aléas ont été nombreux durant toute la campagne : problèmes d’implantation, gel tardif, pression insecte, coups de chaud, etc. Entre 10 à 15 % des orges sont récoltées. Les rendements prévisionnels sont de 60 q/ha, comme l’an dernier. »
Mickael Mimeau, responsable agronomique de Dijon Céréales
« Des baisses de rendements en orges de printemps, en plein remplissage »
« Le risque d’échaudage est limité en orge d’hiver car la maturité physiologique est globalement atteinte. En blé tendre, la situation est un peu plus compliquée : la maturité devrait être atteinte entre le 27 juin et le 5 juillet pour la plaine, aux alentours du premier pour la zone sud, mais vers le 10 ou 14 juillet pour la zone de plateau. Le coup de chaud est arrivé une à deux semaines trop tôt. Il y aura une incidence, mais difficile de l’évaluer, car nous avons rarement connu des températures si élevées à cette période de l’année. Avant ce coup de chaud, les rendements de blé estimés étaient de 66 q/ha, pour une moyenne quinquennale de 65 q/ha. Les conséquences devraient être plus marquées pour les orges de printemps, actuellement en pleine phase de remplissage. »