Elevage et Green deal, des objectifs à préciser
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Bien qu’encore au cœur de discussions, la Pac sera un outil majeur de l’atteinte des objectifs du Green Deal. Souvent pointé du doigt, l’élevage est particulièrement concerné. Si des pistes existent, le secteur n’est encadré par aucun objectif chiffré précis.
Les objectifs visés par le Green deal pour le secteur agricole permettront-ils à l’agriculture française et européenne de rester compétitive ? « L’ambition fixée pour la prochaine Pac de concilier la baisse des produits phytosanitaires et atteindre la neutralité carbone, tout en restant compétitif, est trop grande », pose Pierre Dupraz, directeur de recherche à l’Inrae, lors d’un webinaire, organisé dans le cadre du Space, le 16 septembre, sur le thème « Pac, pacte vert et élevage ». Depuis une dizaine d’années, les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture européenne stagnent. Aucun objectif pour ce secteur n’est d’ailleurs fixé dans les politiques publiques, alors que le climat est un des neuf objectifs de la future Pac. La Commission européenne souhaite pourtant que 40 % des aides soient orientées vers des actions bénéfiques au climat.
« Le règlement 842 de 2018 cite l’agriculture dans les secteurs devant contribuer à la réduction de 30 % des émissions en 2030 par rapport à 2005, rappelle Pierre Dupraz. En France, l’objectif est de 37 %, mais une nouvelle fois, aucun objectif n’est assigné à l’agriculture. » Une situation qui interroge, notamment en ce qui concerne le méthane, dont le pouvoir réchauffant est vingt-huit fois supérieur à celui du CO2. Pourtant, des émissions décroissantes de ce gaz auraient, au contraire, un effet refroidissant.
L’enjeu du stockage du carbone
Alors que l’élevage est régulièrement mis en cause pour son impact sur l’environnement, Pierre Dupraz liste plusieurs leviers d’actions : une moindre consommation de produits carnés et transformés ou donner les moyens d’accroître le potentiel de stockage de carbone dans le sol, qui pourrait permettre de compenser 41 % des émissions de GES agricoles, « et plus de 30 % à un coût inférieur à 100 euros / tCO2eq », précise-t-il. Afin d’éviter de réduire la production européenne pour des raisons environnementales, et s’approvisionner dans des pays aux normes moins exigeantes, il insiste sur la nécessite de mettre en cohérence les politiques alimentaires et commerciales.
La piste de l’élevage à l’herbe
Autre levier évoqué, celui du développement des prairies, qui couvrent actuellement 35 % de la SAU française et européenne. Depuis les années 1960 les prairies permanentes ont vu leur surface reculer de cinq millions d’hectares dans l’UE. Ces dernières ne manquent pourtant pas d’avantages. « Les rations de fourrage se suffisent à elle-même, et les prairies rendent de nombreux services environnementaux, comme le freinage de l’érosion des sols ou des fuites de nitrates et une plus grande capacité de stockage de carbone », explique Luc Delaby, ingénieur de recherches spécialiste du pâturage à l’Inrae. Pour stimuler leur développement et le recours des agriculteurs à ces dispositifs, ce dernier plaide pour augmenter à dix ans d’âge (contre cinq actuellement) la définition d’une prairie permanente, et d’accroître le montant des aides par hectares.