« Mesurer les effets en plein champ de la co-exposition des abeilles aux pesticides lors de l'homologation d'un insecticide », Gilles Salvat, Anses
Le | Environnement-agroecologie
Le point de départ de l’étude en plein champ sur le comportement des abeilles butinant des colzas traités au thiamethoxam est une double recommandation de l’Anses suite aux premiers résultats publiés en 2012 (Henry et al.*) concernant les effets toxiques des insecticides néonicotinoïdes. Il s’agissait de vérifier ou d’infirmer en conditions d’exposition réelles, au champ, l’impact de la pratique d’enrobage des semences avec certains insecticides sur la Mortalité des abeilles pollinisatrices mais aussi de préciser ses effets sur les performances des colonies. Des données souvent absentes des évaluations précédentes. Quelle est la position de l’Anses suite à la publication de ces nouveaux résultats ? Entretien avec Gilles Salvat, directeur de la santé animale et du bien-être des animaux à l’Anses. L’agence est favorable au renforcement des tests lors de l’homologation avec l’utilisation de puces RFID sur les abeilles afin de mieux évaluer leur comportement. Explications. Référence environnement : Quelle exploitation l’Anses va-t-elle faire de ces résultats ? Gilles Salvat : Ces résultats constituent une confirmation en conditions de plein champ des effets observés dans la précédente publication de Mickaël Henry dans Science en 2012. Du point de vue méthodologique, ces expérimentations montrent que la technique d’appareillage des abeilles par des puces RFID peut être utilisée à grande échelle (7000 abeilles appareillées ici). Par ailleurs, même si l’expérimentation n’a pas démontré de baisse de la production de miel, elle établit le coût biologique de l’exposition au thiamétoxam de l’individu « ruche » par la réorientation de la ruche vers la production de butineuses. En outre, dans cette expérimentation les chercheurs soulignent la contamination non prévue par de l’imidaclopride des colonies et le caractère multifactoriel de l’exposition lors de ces expérimentations de plein champ. Les conclusions de cet article rejoignent celle du rapport de l’Anses publié en septembre 2015 sur la co-exposition des abeilles aux facteurs de stress. Certains co-auteurs de cet article étaient parmi les experts membres du groupe de travail auteur de ce rapport. Ce rapport sera présenté le 30 novembre lors de la journée Abeilles de l’Anses « Santé des abeilles : impact de la co-exposition aux facteurs de stress » R.E. : Les test toxicologiques des dossiers d’homologation pour les traitements de semences vont-ils être réévalués en ce sens au niveau européen ? G.S. : Les tests d’homologation sont en évolution permanente. L’intégration de nouvelles modalités d’expérimentation et d’exposition des abeilles dépend effectivement d’une décision au niveau européen. Cet article renforce la pertinence du système RFID pour le suivi du comportement des abeilles exposées ou co-exposées et va dans le sens de l’une des recommandations de notre travail. En effet, l’Anses préconise l’introduction de test adéquats pour mesurer les effets en plein champ de la co-exposition des abeilles à plusieurs pesticides lors de l’homologation d’un insecticide, dont au moins un insecticide ayant le même mode d’action et un fongicide. Le tout sur des colonies naturellement contaminées par des pathogènes. Cette expérimentation, par son ampleur, renforce la crédibilité de la méthode du recours aux puces RFID et son application possible dans l’élaboration future des dossiers d’homologation.