Jean-François Lépy, Soufflet Négoce, « d’ici à la fin de campagne, l’Ukraine n’exportera plus de blé »
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La crise ukrainienne pèse lourd sur les exportations de céréales et la sécurité alimentaire mondiale. C’est ce qu’ont rappelé les intervenants de la matinée export Intercéréales, organisée à Paris le 23 mars. Pour Jean-François Lépy, directeur général de Soufflet Négoce et vice-président du Synacomex, des pénuries sont à envisager pour les campagnes à venir.
Si organisateurs et participants étaient heureux de l’organisation de l’événement en présentiel, les discours de la 13e matinée Export Intercéréales, focalisée sur les conséquences de la guerre en Ukraine, étaient emprunts de gravité. « Début mars, 18,2 Mt de blé avaient été exportées sur les 25,3 Mt potentielles, explique Jean-François Lépy, directeur général de Soufflet Négoce et vice-président du Synacomex. L’Ukraine a décidé de mettre un ban sur les quantités restantes pour assurer sa sécurité alimentaire, il n’y aura donc plus de blé ukrainien à l’export pour la fin de la campagne. » En ce qui concerne le maïs, le reste à exporter est de 15 Mt (sur un objectif de 32 Mt). Il est de 0,6 Mt pour l’orge, et entre 1 et 1,5 Mt pour les oléagineux.
17 à 35 Mt de baisse de production estimées
Alors que le pays a connu une campagne 2021-22 record, à 106 Mt, toutes productions confondues, la crise actuelle pourrait peser lourd sur la prochaine récolte. Le gouvernement ukrainien aurait annoncé des rendements en baisse de 20 %. En cause : la moindre disponibilité des engrais (- 20 %), des produits phytosanitaires (- 50 %) et les incertitudes sur la disponibilité en carburant. Pour l’heure, 15 des 25 Mha de semis de printemps ont été faits. Mais les surfaces semées en maïs et orge pourraient reculer de 30 %, et celles en tournesol de 50 %. Là aussi, les inconnues sur la disponibilité en semences, en main d’œuvre et de carburant pourraient coûter cher. De fortes baisses de production seraient donc à attendre, entre 25 et 40 %, soit 17 à 35 Mt de manque à gagner. « Désormais, le blé n’est plus une commodité mais une arme géopolitique, assure Jean-François Lépy. La menace sur la sécurité alimentaire est réelle, des pénuries sont possibles. »
Ne pas compter sur les ports ukrainiens pour la prochaine campagne
Changement de régime, renationalisation, retour aux affaires : l’avenir de l’Ukraine est incertain et rend les projections très compliquées. « Ce qui est sûr, c’est qu'il faudra des mois pour que les ports ukrainiens retrouvent leur activité, souligne Jean-François Lépy. Nous ne devons pas compter sur eux pour une bonne partie de la campagne 2022-2023. »