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La Chine, un importateur à l’appétit croissant

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Premier producteur mondial de blé, de riz, et deuxième pour le maïs, la Chine doit faire face à un défi de taille. Nourrir plus de 20 % de la population de la planète, aux habitudes alimentaires changeantes, avec des surfaces arables en constant recul et une pression accrue sur la ressource en eau. Ce pays n’a pas d’autre choix que d’importer. Il le fait déjà. Une tendance qui devrait s’accélérer selon Li Zhaoyu, responsable du bureau de France Export Céréales à Pékin. Une opportunité à saisir pour la France, à condition de respecter les normes qualitatives souhaitées par la Chine.

« La Chine est un grand producteur de céréales mais aussi un grand consommateur, expliquait Li Zhaoyu, responsable du bureau de Pékin à France Export Céréales, à l’occasion du congrès du Naca, le 3 mai, lors de la table ronde sur l’évolution des comportements alimentaires. Avec 5 % de la surface agricole mondiale et 7 % des ressources d’eau douce de la planète, ce pays doit nourrir plus de 20 % de la population mondiale ».

Avec ses 600 Mt de céréales collectées chaque année, la Chine occupe toujours la première place du podium des pays producteurs de blé (130 Mt) et de riz (210 Mt), et la deuxième pour le maïs (257 Mt). Mais derrière ces chiffres se cache une réalité : ce pays se confronte, comme d’autres, à de nouveaux enjeux tant sociaux qu’environnementaux.

800 000 ha agricoles en moins chaque année

Tous les ans, plus de 12 millions d’agriculteurs chinois quittent la production et partent s’installer en ville. « L’exode rural est irréversible, tout comme la perte des terres agricoles, poursuit-il. Elle atteindrait 800 000 ha chaque année : un chiffre à mon sens sous-estimé. Les raisons de ce recul : construction de logements, d’autoroutes, d’aérogares, de chemins de fer… auxquelles il faut ajouter l’érosion, la désertification, la reforestation et la sécheresse. Plus de 400 villes chinoises, sur les 600 que compte le pays, souffrent aujourd’hui du manque d’eau : notamment dans le Sud où se concentre la production de riz. La ressource en eau par habitant est de 2100 m3 par an, soit quatre fois moins que la moyenne mondiale, évaluée à 8000 m3 ».

139 Mt de produits agricoles importés

La Chine n’a pas d’autre choix que d’importer. Elle le fait déjà. « 139 Mt de produits agricoles ont été importées en 2017, précise Li Zhaoyu : 3 Mt de blé, 4 à 5 Mt de riz, 3 Mt de maïs, 7 à 8 Mt d’orge, 5 Mt de sorgho, 8 Mt de manioc, 8,5 Mt de colza, 5,2 Mt d’huile de palme… mais aussi 97 Mt de soja ! Ce qui en fait le plus gros importateur de soja au monde. 85 % des quantités consommées en soja en Chine sont importées : du Brésil, des États-Unis, de l’Argentine… » Pour produire ces 139 Mt, la Chine aurait besoin de 69 Mha supplémentaires, alors qu’elle ne dispose actuellement que de 110 Mha !

La France pèse pour 8 % dans les importations de blé

Pour limiter cette dépendance à l’importation, la Chine loue des terres, en Ukraine notamment pour y produire du blé et de l’orge. Une stratégie jugée « immuable » par Li Zhaoyu. Mais cela ne suffit pas. Les importations devraient continuer à croitre, d’autant que les habitudes alimentaires des chinois évoluent : celles-ci étant directement liées à l’urbanisation et à l’élévation du niveau de vie. Comme partout dans le monde, les jeunes veulent manger rapidement, cuisinent de moins en moins, se tournent davantage vers des produits à base de blé. « 64 % des blés importés proviennent du Canada, 21 % du Kazakhstan, 8 % de la France, 4 % de la Russie et 3 % de l’Australie, liste Li Zhaoyu. La Chine importe les grains qu’elle ne produit pas. Or, la qualité du blé chinois est assez similaire à celle produite en France. Voilà pourquoi, ce pays n’est pas un client régulier. Les acheteurs se tournent avant tout vers des blés de force et des blés biscuitiers. »

Être autosuffisant à 85 % pour les céréales de base

En orge, la situation est toute autre car ne l’oublions pas, la Chine reste le premier producteur mondial de bière. La promotion faite, localement, par France Export Céréales des orges françaises a fonctionné. La qualité française séduit et reste, malgré les coûts logistiques, attractive. La France est le troisième fournisseur d’orge de la Chine (385 000 t en 2018/19), loin derrière l’Australie avec 1,28 Mt et le Canada (905 000 t).

Dans les années à venir, la Chine restera un acteur majeur des équilibres mondiaux des céréales et des graines oléagineuses. D’autant que la politique chinoise en matière d’autosuffisance est claire : à moyen terme, elle doit être de 90 % et à long terme de 85 % pour les céréales de base. Et ce, dans un contexte où les réserves stratégiques du pays tendent à se réduire du fait de leur coût et de la dégradation de la qualité des quantités stockées. Des opportunités à saisir pour le marché français.